Des rencontres professionnelles aux multiples vertus

27ème édition du Festival international d’ art vidéo


Chady Chaabi
Vendredi 26 Novembre 2021

Des rencontres professionnelles aux multiples vertus
Quand les organisateurs de la 27ème édition du Festival international d’art vidéo (FIAV), ont érigé le partage d’expérience et la collaboration entre artistes marocains et québécois comme priorité, ce n’était pas des paroles en l’air. Nous en avons eu le cœur net en assistant aux rencontres professionnelles organisées dans la matinée de jeudi, à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Ben M'sik. Un événement aussi insolite que marquant à défaut d'être fructueux à court terme.

Même si le ciel grisâtre et chargé avait ouvert ses vannes pour ne quasiment plus les refermer de la journée, les artistes marocains et québécois n’ont pas fait défaut à un évènement aux multiples vertus. A commencer par “Montrer un éventail de la création québécoise actuelle” souligne Yves Doyon, coordinateur chargé de projet du “Focus Québec” au Maroc. Et d’ajouter “Plus important encore, il s’agit d’entamer un dialogue et un échange avec les structures et les artistes marocains, en vue de développer des liens et des projets à même de déboucher sur une vraie relation entre eux”.
 
Une ambition loin d'être démesurée
 
L’idée a du sens. Et l’ambition est loin d'être démesurée. D’autant que le potentiel créatif marocain n’a rien à envier à celui des artistes québécois “Je venais souvent au Maroc de 97 à 2003. Pendant cette période, j'ai assisté chaque année au festival . J’ai aussi invité des vidéastes marocains au Québec. Donc, je suis convaincu que le potentiel créatif marocain est important”, nous confie Yves Doyon.  A quelques pas de la buvette, au moment de la pause café, Camille Bernard-Gravel observe timidement les va et vient un verre de thé à la menthe à la main.

Si la représentante de la “Chambre Blanche”, un centre d'artistes québécois dont les collaborations avec des artistes internationaux sont légions (le Brésil, le Mexique, la France, la Belgique, le Japon), avoue qu’elle “n’a pas pu voir beaucoup de représentations artistiques marocaines” depuis qu’elle a posé ses valises à Casablanca. Elle n’est en revanche pas restée insensible face au charme de la soirée d’ouverture. “J’ai beaucoup aimé. De belles performances, malgré une préparation très courte”, s'enthousiasme l’artiste multidisciplinaire connue pour ces créations d’installations, de sculptures et de vidéos inspirées de la nature. ”Puis, on voyait quand même assez bien l’émulation des cultures et notamment la touche spirituelle marocaine que l’on retrouve un peu moins dans les représentations québécoise”, conclut-elle.
 
La promesse d’une complémentarité singulière
 
A l’évidence, la rencontre de l’art marocain et québécois est la promesse d’une complémentarité singulière. Singularité dans laquelle s’inscrit parfaitement le collectif d’Art numérique marocain, Pixylone. Créée en 2011 par Othmane Zouhair (artiste multidisciplinaire), Younes Atban (artiste visuel) et Omar Sabrou (artiste graphique), collectif représenté par le premier nommé lors de ces rencontres professionnelles qui n’ignorent pas le potentiel d’un tel événement, notamment en terme de réseautage. “Souvent les artistes travaillent chacun de son côté et on ne se voit jamais. Là, ça nous permet de rencontrer de potentiels futurs producteurs, des artistes avec qui collaborer. Et dans le milieu de l’art numérique, c’est très important de collaborer parce qu'on ne peut pas tout maîtriser", souligne-t-il.

Par contre, pour les cartes de visite, il va falloir repasser. “On est dans le numérique” s’amuse notre interlocuteur qui a fait forte impression pendant sa présentation.
En même temps, il faut dire que le projet qu’il a mis en avant véhicule des messages forts et dans l’air du temps. “C’est un projet encore en écriture à travers lequel on avait envie d’exprimer nos inquiétudes par rapport au réchauffement climatique et ses conséquences économiques”, nous explique t-il. Et de détailler. “L’idée était de créer un point de rencontre virtuel où les populations qui fuient la sécheresse et celles qui fuient les villes côtières à cause de la montée des eaux, vont s’y réfugier”.

L’endroit en question est judicieusement représenté par un far. Un choix en aucun cas fortuit. Au-delà du contraste saisissant entre la solitude qui caractérise les fars et l’espoir qu’ils représentent pour une masse de réfugiés dans le projet artistique de Pixylone, l’édifice a aussi été choisi car “pour les marins c’est un espoir. Le far est synonyme de survie et de repère pour se retrouver”, nous indique Othmane Zouhair. Sans surprise, le projet a fait forte impression auprès de l’assistance.
 
Une créativité en manque de structuration
 
Mais la créativité et l’imaginaire marocains, aussi fertiles soient-ils, souffrent d’un manque flagrant de structuration. Un frein qui se révèle rédhibitoire dans le cadre de potentielles collaborations entre artistes marocains et québécois. Qui plus est à court terme “Les structures ne sont pas pour le moment équivalentes entre les deux pays. Au Québec on a une structuration et un soutien financier fort (voir ci-contre). Au Maroc, même si ça fait plusieurs années que des progrès sont réalisés dans ce domaine, cela demande encore du temps pour que ça se consolide”, argue Yves Doyon en arrondissant les angles. Raison pour laquelle, il “ne croit pas beaucoup en des échanges fructueux à court terme mais plutôt sur le long terme”.

Il est vrai qu’au Maroc, il faut prouver pour être soutenu, que ce soit par des fonds publics ou privés. Mais pour prouver, il faut avoir des moyens financiers afin de lancer un projet. Bref, c’est le serpent qui se mord la queu. Pixylone en est la preuve “Ce n’est qu’après avoir participé à l’inauguration du musée Mohamed VI d’art contemporain que l’état marocain nous a suivis et nous a permis de financer un autre projet à travers le ministère de la culture”, se remémore Othmane Zouhair.

“Au Maroc, il faut prouver avant de prétendre à quoi que ce soit. Autrement dit, la force de ton travail peut imposer aux gens de te programmer malgré le manque de soutien d’une structure comme au Québec. Il faut être malin et ne pas baisser les bras. Continuer à faire ce dont on a envie et trouver le moyen d’exister artistiquement malgré les contraintes”. Une recommandation à appliquer au pied de la lettre par les artistes nationaux en herbe, même si le Québec semble prêt à participer à l’envol de l’art marocain.
 
Chady Chaabi

La technologie au service des arts numériques

 
Cette année, le FIAV a bénéficié du soutien d’Epson, leader mondial de la technologie et de l’innovation. Ce partenariat s’inscrit dans la démarche globale engagée par le premier fabricant mondial de projecteurs consistant à soutenir toutes initiatives visant l’innovation technologique et l’évolution de la création numérique, aujourd’hui composante majeure du développement culturel.

A travers les solutions Epson, les artistes peuvent repousser les limites de leur pratique et développer de nouvelles approches par le biais de l’image, de la vidéo ainsi que des arts sonores et électroniques. C’est dans cet esprit qu’Epson a soutenu le spectacle d’ouverture du FIAV, une création originale et hybride entre danse et art numérique, intitulée Maraya Arrouh (miroirs de l’âme), production issue de la collaboration entre le FIAV, l’Institut Français de Casablanca et les compagnies K.

Le projecteur laser Epson de 12000 Lumens mis à disposition des artistes a magnifié l’œuvre en lui conférant un attrait particulier, suscitant l’émerveillement des spectateurs. Ahlam El Morsli, chorégraphe et co-fondatrice de la compagnie Col’Jam annonce à ce sujet « A partir du moment où nous avions pu utiliser le vidéo projecteur Epson, le spectacle a pris sa réelle dimension. Une image brillante et bien définie a projeté l’hybridation entre la danse et l’art numérique vers de nouveaux sommets qui font hommage à la réalisation dans son ensemble. Ce nouveau dispositif technologique, connecté à nos ordinateurs, permettra au spectacle de rencontrer de larges publics au Maroc et à l’international».



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