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Ce vilain virus qui guette nos bêtes : L’ONSSA à pied d’œuvre

Pourquoi la fièvre aphteuse appréhendée du côté de l’Oriental s’est déclarée des centaines de kilomètres plus loin


Chady Chaabi
Jeudi 17 Janvier 2019

Conjuguée au passé depuis quelques années, la maladie de la fièvre aphteuse (FA) est récemment revenue sur le devant de l’actualité. Dans un communiqué publié le 7 janvier courant, l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires a confirmé la découverte d’un foyer, dans une exploitation située à Douar Ouled Sidi Chennane, dans la province de Fquih Ben Salah. Une confirmation faisant suite aux habituelles investigations cliniques et de laboratoires réalisées sur les bovins ayant présenté des symptômes de cette maladie.
En partant du principe énoncé par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et selon lequel la  fièvre  aphteuse  est  une  maladie  virale du  bétail,  hautement  contagieuse et qui entraîne des répercussions économiques significatives, anéantir ou du moins diminuer les risques de sa propagation se révèle donc capital, d’autant plus que sa gravité réside justement dans sa  propagation rapide.
Contacté par nos soins, le Dr Douk Abdelwahed, chef de service des actions prophylactiques, à la direction de la protection du patrimoine animal et végétal ONSSA rassure, en évoquant un plan d’urgence sanitaire dicté par l’OIE (Code sanitaire pour les animaux terrestres de l’OIE) en cas de foyers. « Nous avons procédé à l’abattage de tous les animaux infectés, avant leur élimination, ainsi que tous les produits d’origine animale, principalement le lait et les peaux de moutons», a-t-il indiqué.
La maladie n’est pas uniquement transmissible via la salive, le lait ou la semence des animaux, mais aussi à travers l’utilisation d’enclos, de bâtiments ou de véhicules contaminés. Sans oublier le port de vêtements ou de chaussures contaminés, le Dr Douk Abdelwahed décrit un spectre de mesures beaucoup plus large : «A savoir, d’une part, le nettoyage des locaux et des matériaux de l’exploitation et d’autre part, l’interdiction d’accès à l’exploitation en question ». Mais pas que. Puisqu’une vaccination en anneau a également été réalisée. Selon lui, cette opération consiste en la vaccination de toutes les bêtes se trouvant dans un rayon de trois kilomètres à partir du foyer (environ 2000 vaccinations). «Enfin, avec l’étroite collaboration des autorités locales, nous avons interdit tous les lieux de rassemblement des animaux, comme les souks», a-t-il ajouté.
Cependant, plusieurs questions restent en suspens : comment expliquer la découverte de ce foyer, quatre ans après le dernier cas? Et aussi, quid de son origine? Notre interlocuteur à l’ONSSA nous a tout d’abord affirmé qu’une enquête épidémiologique était en cours. Ensuite, en attendant les conclusions, il a consenti à divulguer quelques éléments de réponse : « L’exploitant a acheté dans un souk deux jeunes bovins contaminés, non vaccinés et non identifiés, puis les a mis dans l’enclos au milieu de bêtes saines ». Et d’ajouter : «Une enquête de traçabilité a été lancée en collaboration avec les autorités locales ».
Interrogé sur ce qui a poussé l’exploitant à prendre le risque d’acheter des bêtes non vaccinées et non identifiées, le Dr Douk Abdelwahed n’a pas voulu trop s’avancer tant que l’enquête n’était pas bouclée. Même si, on sent bien, en filigrane, des motivations à caractère financier. Par contre, il ne nie pas que les nombreux foyers découverts en Algérie n’étaient pas totalement étrangers. Dans ce sens, « outre un renforcement des contrôles sanitaires au niveau des postes frontaliers, une campagne de vaccination a été lancée en priorité dans ces zones, avant d’être généralisée sur tout le territoire national. Jusqu’à présent, alors que la campagne suit son cours, nous avons quasiment atteint la barre des 6000 animaux vaccinés», a-t-il dévoilé.
En effet, l’Algérie, à l’instar de presque tout le continent africain (voir carte), est considérée par l’Organisation mondiale de la santé animale, comme « pays sans statut officiel pour la fièvre aphteuse ». D’ailleurs, 15 wilayas frontalières et steppiques ont enregistré la perte de dizaine de têtes de bétail à cause de la fièvre aphteuse. En tout cas, qu’un lien de causalité soit établi ou pas, l’ONSSA a décidé de se prémunir de tout risque de contamination. « La décision a été prise de prohiber l’importation des animaux vivants (ovins bovins et caprins), ainsi que les produits d’origine animale. Excepté les produits qui sont traités par un procédé qui élimine la fièvre aphteuse pour ne pas geler le commerce. Une procédure conforme aux réglementations de l’Organisation mondiale de la santé animale», avance le Dr Douk Abdelwahed, car, pour lui, «ce virus ne sort pas de nulle part. Surtout que depuis le 13 novembre 2015, le Maroc n’a connu aucun foyer de fièvre aphteuse », a-t-il conclu.
A vrai dire, il faut avouer qu’au vu de l’historique de la fièvre aphteuse au Maroc, le foyer découvert dans la région de Fquih Ben Saleh fait office d’exception depuis quatre ans. Et pour cause, le Maroc en a fait du chemin pour éradiquer cette maladie qui se caractérise chez l’animal par une hyperthermie et provoque des lésions nasales, buccales, podales et mammaires, mais qui ne présente aucun danger pour l’homme, hormis pour sa bourse. Pour s’en persuader, il suffit de jeter un coup œil sur l’évolution des cas découverts depuis 1977. Une année où 1612 cas ont été constatés, contre 82 en 1992, et seulement 6 en 2015. Ces résultats ne sont pas dus au hasard, mais plutôt sont le fruit de la stratégie nationale basée sur un programme de vaccination annuel des bovins d’une part, et l’épidémiosurveillance du cheptel sensible (bovins, ovins, caprins), d’autre part. Et enfin, la conduite régulière d’enquêtes sérologiques (bovins, ovins, caprins...) et l’application systématique et obligatoire des mesures sanitaires prévues par la réglementation en vigueur : isolement, séquestration, abattage des animaux atteints et cohabitants, indemnisation. Une avancée qui a valu au Maroc en 2012, l’obtention du programme officiel de l’OIE pour le contrôle de la FA sans vaccination.


 


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