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Pour éveiller le “legs dormant” d’Ibn Rochd, Ksikes imagine un récit à plusieurs entrées où la pensée du philosophe fait l’objet d’autant de tentatives d’approche et de réinterprétation, a-t-il relevé, notant que le dialogue de Ksikes avec la vie et la pensée d’Averroès est aussi un appel subliminal à prolonger l’effort de lecture et d’interprétation dans le champ pluriel du langage. Et d’ajouter que de la philosophie à la musique, en passant par le théâtre, la question centrale demeure celle de la transmission : “Comment traduire l’ineffable, le sensible, l’imperceptible dans un langage intelligible ?”. Par-delà la quête d’Averroès, le roman de Ksikes est une ode à l’éclatement des lieux et des formes d’écriture dans la mesure où il alterne les dialogues fictionnels, les discours rapportés, les échanges épistolaires, mais aussi les confessions, les emails et les extraits de journaux ou de carnets de bord. Car d’après Khalid Lyamlahy, la lecture s’apparente à une navigation entre divers genres et plusieurs niveaux de commentaires, prolongeant en filigrane l’oscillation entre la tentation du roman historique et le désir d’un témoignage au présent.
Si le roman tente ainsi, et à de nombreuses reprises, de jeter un pont entre le passé et le présent, il s’emploie également à dénoncer les dérives d’une époque contemporaine où les débats sont marqués aussi bien par “la rapidité et la virulence des réactions” que par le “simplisme des arguments”, écrit le critique littéraire. Selon lui, le récit est aussi une reconstruction des malentendus et des incompréhensions qui empêchent désormais l’effort et le renouvellement de la pensée, une reconstruction menée notamment à partir de l’opposition entre la bulle déchaînée et incontrôlable des réseaux sociaux et le monde exigeant et tourmenté de la philosophie. En utilisant la forme romanesque pour réactiver au présent la pensée d’Averroès tout en éclairant son ancrage historique et sa dimension prospective, Ksikes s’inscrit dans une longue tradition qui n’a cessé d’interroger le rapport à la culture dans ses lignes de rupture et de croisement, at-il argué.
En fait, le roman éclaire de manière particulièrement efficace la fracture entre les pratiques sociales, noyées dans la superficialité et la violence, et l’effort de la pensée critique, incarné par un Ibn Rochd/Averroès qui résiste à toute récupération simpliste ou dogmatique, conclut ce spécialiste de la littérature maghrébine . Paru au Maroc en 2017 et réédité en France en 2019, “Au détroit d’Averroès” est le journal recomposé d’Adib, un enseignant de philosophie dans un lycée à Casablanca, qui tente encore désespérément de faire entendre la voix de cet humaniste musulman, père de la raison, banni par les siens.
Mohamed Melihi
