La Libye devait officiellement ouvrir dimanche, trois jours après la mort de Mouammar Kadhafi entre les mains des ex-rebelles, un nouveau chapitre de son histoire en lançant un processus de transition vers la démocratie. Des dizaines de milliers de personnes étaient attendues sur la place centrale de Benghazi, le berceau du soulèvement contre l'ancien "guide", pour entendre Moustapha Abdeljalil, président du Conseil national de transition (CNT), proclamer la "libération" de la Libye après 42 années de domination de Mouammar Kadhafi. Cette annonce va ouvrir la voie à la formation d'un gouvernement intérimaire et à l'organisation, dans un délai de quelques mois, d'un scrutin pour élire une assemblée constituante. L'objectif est d'instaurer de nouvelles institutions démocratiques en 2013. Avec d'importantes ressources en hydrocarbures et une population relativement faible de six millions d'habitants, la Libye dispose des atouts pour devenir un pays prospère. Elle est cependant traversée de rivalités régionales et tribales qui alimentent les craintes sur la viabilité du processus de transition. Les nouveaux dirigeants libyens disposent d'une "occasion très courte" de mettre de côté leurs différences pour lancer la période de transition sur de bonnes bases, a prévenu samedi le Premier ministre par intérim, Mahmoud Djibril, en annonçant sa démission en raison de la fin officielle d'une guerre civile de huit mois contre le régime kadhafiste. "D'abord, quelle sera la détermination affichée par le CNT au cours des prochains jours?", s'est-il interrogé. "Et l'autre aspect de la chose dépend essentiellement du peuple libyen et de sa capacité à faire la distinction entre le passé et l'avenir", a-t-il ajouté.
"Je compte sur eux pour qu'ils aillent de l'avant et se souviennent des souffrances qu'ils ont endurées au cours des 42 dernières années", a-t-il dit. La révolution a été accomplie par des brigades disparates et peu disciplinées représentant chacune une ville différente. Elles réclament désormais leur place au sein du futur pouvoir, notamment celles de Misrata et de Benghazi qui pensent avoir payé un lourd tribut pour le renversement de Mouammar Kadhafi. La dépouille du "guide" a ainsi été exposée vendredi et samedi à Misrata, dont les combattants se prévalent de la capture de l'ancien dirigeant jeudi aux abords de Syrte. Le sort à réserver au cadavre de Mouammar Kadhafi est lui-même un sujet de tensions entre les différents mouvements de la nouvelle Libye. Contrairement aux principes de l'islam, le corps n'a pas été enterré rapidement et il a commencé à se décomposer. Ceux qui venaient le voir samedi à Misrata étaient obligés de se couvrir le visage avec un masque. La famille de Mouammar Kadhafi a réclamé la restitution de son cadavre et de celui de son fils Mouatassim. Des responsables du CNT souhaitent en revanche les enterrer dans un lieu tenu secret afin d'éviter de créer un lieu de pèlerinage. Les habitants de Misrata n'en veulent pas sous leur ville.