Une nouvelle trêve entre en vigueur au Soudan


Libé
Lundi 19 Juin 2023

Une nouvelle trêve de 72 heures est entrée en vigueur dimanche au Soudan, annoncée la veille par les médiateurs saoudiens et américains pour tenter de mettre un terme à deux mois de combats qui ont plongé le pays dans une crise majeure.


Entrée en vigueur dans tout le pays à 06H00 locales (04H00 GMT), il s'agit d'une énième trêve entre l'armée, commandée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), dirigés par le général Mohamed Hamdane Daglo, en guerre depuis le 15 avril.


Outre l'arrêt de tout mouvement et d'attaque pendant trois jours, les deux camps ont convenu d'acheminer de l'aide humanitaire dans l'ensemble du Soudan.

Dans ce pays d'Afrique de l'Est, l'un des plus pauvres au monde, plus de 2.000 personnes ont été tuées, selon l'ONG ACLED.

L'ONU estime que plus de 2,2 millions de personnes ont été déplacées par le conflit et que 25 des 45 millions d'habitants dépendent désormais de l'aide humanitaire pour survivre.
 La trêve intervient alors qu'une conférence internationale sur l'aide au Soudan, parrainée par l'Arabie Saoudite, est prévue ce lundi à Genève.


Une heure après son entrée en vigueur, la situation à Khartoum était "calme", selon des habitants. 
"Le problème est que les jours qui suivent la trêve sont généralement très difficiles. C'est comme si les combattants voulaient rattraper (les jours de cessez-le-feu)", lâche Hana'a Hassan, résidente du centre de Khartoum.


A Oumdourman, ville-jumelle de la capitale, Sami Omar dit vouloir "un cessez-le-feu complet, car une trêve ne suffit pas pour que nous retournions à nos vies."

"Ils peuvent arrêter de se battre, mais les FSR ne quitteront pas les maisons (qu'ils occupent), et passer par les points de contrôle est aussi difficile" que pendant les jours de combats, souligne-t-il.


Les affrontements s'étaient intensifiés avant que les deux camps ne s'engagent à respecter la trêve dans des déclarations séparées samedi soir.

"Malgré notre engagement en faveur du cessez-le-feu, nous répondrons résolument à toute violation commise par les rebelles (FSR, ndlr)" pendant la trêve, a affirmé l'armée.


Les paramilitaires ont pour leur part promis "d'honorer (leur) engagement en faveur d'une cessation complète des hostilités dans toutes les régions du Soudan, dans le but principal de faciliter l'acheminement d'aide humanitaire vitale aux civils.

"
Riyad a prévenu samedi dans un communiqué annonçant la trêve que "dans le cas où les parties ne respecteraient pas le cessez-le-feu de 72 heures, les facilitateurs seraient contraints d'envisager un report des pourparlers de Jeddah" en Arabie Saoudite, où les deux camps rivaux ont tenu des négociations pendant plusieurs semaines.

Samedi encore, les combats ont fait de nouvelles victimes civiles, ont indiqué à l'AFP des témoins à Khartoum. Les FSR ont accusé l'armée de cibler spécifiquement des quartiers résidentiels, et affirmé avoir abattu un avion de chasse.


Sur une vidéo partagée par les paramilitaires sur Twitter samedi, on peut voir des maisons en briques détruites et des couvertures qui recouvrent ce qui semble être des cadavres.

Des quartiers entiers de la capitale sont privés d'eau potable et l'électricité ne fonctionne que quelques heures par semaine.


La situation est tout aussi alarmante au Darfour, vaste région de l'Ouest du Soudan où "la violence fait rage", a alerté samedi l'ONG Médecins sans frontières (MSF).
Les témoignages sur des violences de grande ampleur contre les civils s'y multiplient, et selon l'ONU, plus de 149.000 personnes ont fui vers le Tchad depuis le début des combats le 15 avril.
Ces derniers jours, "6.000 personnes ont fui la ville d'El-Geneina" (Darfour-Ouest), pour trouver refuge dans la ville d'Adré au Tchad, a indiqué MSF samedi.
"La situation est franchement accablante", affirme le Dr Seybou Diarra, coordinateur de MSF pour la région d'Adré.

Déjà dévasté dans les années 2000 par une guerre civile particulièrement sanglante, le Darfour se dirige vers un nouveau "désastre humanitaire" que le monde doit empêcher, avait plaidé jeudi le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.

Le chef de la mission de l'ONU au Soudan, Volker Perthes, s'était dit mardi "particulièrement alarmé" par la situation au Darfour où les violences pourraient constituer des "crimes contre l'humanité".


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