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Un an après la révolution : Les victimes de Ben Ali en mal de reconnaissance


AFP
Vendredi 13 Janvier 2012

Un an après la révolution : Les victimes de Ben Ali en mal de reconnaissance
«Je regrette énormément d’avoir participé aux manifestations». «J’ai risqué ma vie pour rien». Un an après la chute de Zine El Abidine Ben Ali, l’amertume et la désillusion dominent chez ceux qui ont payé le prix fort de la révolution.
Confronté depuis décembre 2010 à des manifestations de plus en plus importantes, Ben Ali a tenté d’écraser dans le sang le mouvement avant de jeter l’éponge le 14 janvier et de fuir avec son épouse et quelques proches en Arabie saoudite.
Selon un décompte de l’ONU, 300 Tunisiens ont été tués et 700 blessés durant le soulèvement de décembre-janvier.
«J’ai cru en une Tunisie démocratique et libre mais j’ai risqué ma vie pour rien!», crie Béchir Habachi, 21 ans, blessé par balle à la jambe gauche et devenu diabétique depuis.
«Il n’y a ni dignité ni reconnaissance, et je regrette de n’être pas resté à la maison à suivre les informations à la télé comme la plupart des Tunisiens», poursuit-il.
Tout maigre et cachant une petite trousse dans son grand gilet bleu, Béchir en montre nerveusement le contenu: seringue d’insuline et morceau de sucre.
«Ma vie est réduite à ça», dit-il en dénonçant «une marginalisation et une absence de volonté réelle du gouvernement d’honorer les vrais acteurs de la révolution.
«Nous ne voulons pas être traités comme des mendiants et ce ne sont pas des discours bidon et des cartes de handicapés qui soulageront nos souffrances et apaiseront notre colère», s’énerve un autre blessé, Nejmeddine El-Naoui, 23 ans.
Le nouveau gouvernement versera à partir du 16 janvier une deuxième tranche d’indemnités aux familles des «martyrs» et offrira aux survivants la gratuité des transports et soins médicaux.
L’Etat a déjà versé 20.000 dinars (10.000 euros) à chaque famille des morts de la révolution et 3.000 dinars (1.500 euros) à chaque blessé.
«Cette somme suffit à peine à se soigner», lance Lamia Farhani, présidente de l’Association des familles des martyrs et blessés de la révolution tunisienne et soeur d’un «martyr» abattu le 13 janvier.
La commission d’investigation mise en place après la révolution n’a pas encore publié de liste des victimes. «Pourquoi ce mutisme ?», s’interroge Mme Farhani.
«On ne peut pas célébrer le 14 janvier tant qu’on n’aura pas eu tous nos droits et tant que le gouvernement n’aura pas exprimé sa reconnaissance aux héros», lance-t-elle.
Elle réclame surtout que soient jugés les tueurs et leurs commanditaires, et des procès dignes de ce nom, alors que Ben Ali a déjà été condamné trois fois par contumace de manière expéditive.
Les victimes du régime sont aussi des personnes brisées financièrement et psychologiquement. Parmi elles, Mohamed El Boussaïri Bouebdelli. Avec son épouse il avait créé la première institution d’enseignement supérieur privé, l’Université libre de Tunis, le lycée Louis Pasteur et une Fondation regroupant un collège et une école primaire. Mais dès 2004, Ben Ali s’est acharné contre eux, les obligeant à fermer ces institutions. La création de l’Ecole internationale de Carthage par l’ex-Première dame Leïla Trabelsi a porté un coup fatal aux établissements des Bouebdelli.
«Nous étions atteints moralement et avons perdu quelque 35 millions de dinars (18 millions d’euros)», se souvient-il, évoquant le harcèlement de la police, le contrôle des e-mails et les communications téléphoniques sur écoute. «Je ne pourrai jamais pardonner à Ben Ali», renchérit son épouse Madeleine.
M. Bouebdelli a déposé pour le moment un dossier à la Commission d’investigation sur les affaires de corruption et de malversation (CICM), créée en février 2011 et qui a pour but d’indemniser les personnes spoliées par l’ancien régime. Sans résultat pour le moment. «Ben Ali est passé aux oubliettes mais nos blessures restent aussi profondes», estime Mme Farhani. «Le 14 janvier ne peut être qu’un jour de tristesse et de douleur», ajoute-t-elle.


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