-
Rabat à l'heure du 1er Forum international académico-industriel
-
La CMC de Béni Mellal répond aux besoins spécifiques du marché du travail régional
-
Marrakech : Lancement de la 10è campagne de don de sang à l'Université Cadi Ayyad
-
Une délégation du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en visite à Fès-Meknès
-
Participation citoyenne: Débat à Azrou sur les enjeux de la société civile locale
Le domaine de Villa Harris constituait avec d’autres sites naturels situés à la périphérie de Tanger, tout au long de la première moitié du XXème siècle, en plus de leur qualité écologique, des espaces de repos, de ressourcement, de récréation et de loisirs pour les habitants de la ville.
Le domaine planté fait environ 9 ha de superficie. Il fut créé vers la fin du XIXème siècle par le journaliste anglais Walter Burton Harris (1866-1933), envoyé du célèbre journal londonien «The Times» à l’époque internationale de Tanger. Après son décès, le site passa à l’entrepreneur espagnol Onofre Zapata qui le transforma en Casino-Parc. En 1940, l’occupation de la ville par les troupes espagnoles mit fin à cet espace de spectacles et de loisirs et vers les années 70 il fut transformé en Club Méditerranée.
Walter Harris a planté sur son site des essences rares de plantes et d’arbres de différentes espèces qu’on retrouve également dans la forêt de Perdicaris et a construit une demeure de style hispano-mauresque avec de remarquables panneaux de décoration intérieure en bois sculpté et peint sur les plafonds et en plâtre sculpté et zellige polychrome sur les murs.
Le site de la Villa Harris occupe de nos jours une place de choix à l’intérieur de la ville de Tanger en raison de sa situation privilégiée dans la zone de Malabata, vouée au tourisme et aux activités de plaisance et de distraction, et sa dimension environnementale et écologique affirmée par la présence de plusieurs espèces de plantes rares et d’arbres centenaires et son intérêt patrimonial justifié par la demeure de W. Harris datant de la fin du XIXème siècle et qui revêt une valeur historique et architecturale incontestable.
Ces multiples valeurs combinées ont favorisé l’inscription de ce site comme espace d’intérêt historique et naturel sur la liste du patrimoine culturel national le 13 septembre 2007.
Cette inscription constitue une mesure de conservation importante qui vise la sauvegarde de ce site avec ses composantes naturelle et architecturale et sa protection juridique contre toute agression de quelque nature que ce soit.
Après son abandon vers les années 80, le site de la Villa Harris se trouve malheureusement de nos jours dans un état de dégradation inquiétante à cause des effets néfastes des intempéries et l’absence totale d’opérations d’entretien et de nettoyage.
Le site appartenant au domaine de l’Etat, laissé curieusement sans gardiennage depuis quelque temps, devient le refuge des vagabonds et la Villa de W. Harris et les installations touristiques héritées de la période des années 30 et de la période du Club-Med se trouvent la cible préférée des actes de vandalisme et de saccage continus au vu et au su de tous dans une zone touristique qui abrite une institution hôtelière de renom et qui se trouve tout le temps sous l’œil vigilant des forces de sécurité.
Devant la triste situation dans laquelle se trouve le site de Villa Harris, les pouvoirs publics de Tanger initient une demande étrange et inattendue de déclassement de la majeure partie du site ou sa zone naturelle de la liste du patrimoine national pour ne laisser qu’une infime partie tout autour de la demeure du journaliste anglais.
La commission interministérielle compétente faisant suite à cette demande n’a heureusement pas validé la demande de déclassement et a invité ses auteurs à respecter les valeurs naturelle et historique du site.
Toutefois, on a appris dernièrement, avec amertume que ceux qui sont derrière cette affaire ne comptent pas baisser les bras et persistent à vouloir déclasser le site. Des négociations sont engagées à cet effet avec le ministère de la Culture pour le convaincre de la nécessité de réduire la zone de classement et de sacrifier plusieurs arbres centenaires et des plantes rares et un milieu environnemental de valeur écologique certaine en faveur d’un «Grand projet touristique» dans la zone de Malabata.
Pourquoi vouloir à tout prix massacrer un espace vert aussi intéressant et sensible? Pourquoi ne pas adopter un comportement civique vis-à-vis de ce domaine public de l’Etat? Pourquoi ne pas le convertir en parc urbain comme il l’a toujours été et offrir ainsi aux citoyens de Tanger un lieu de distraction et de promenade dont ils ont tellement besoin?
Pourquoi ne pas s’inspirer du modèle de Arasat Moulay Abdeslam à Marrakech?
C’est un modèle de partenariat entre l’Etat et le secteur privé pour aménager un espace vert urbain resté pendant longtemps abandonné et source de multiples nuisances. Les citoyens et les visiteurs de Marrakech découvrent dans le nouveau look de cet espace vert un havre de paix et de repos avec des arbres et des plantes verdoyants et pleins de vie et un mobilier urbain intégré et approprié.
Cessons de tout construire à Tanger aux dépends de son héritage historique et de son potentiel environnemental.
Le domaine de la Villa Harris mérite un traitement et un devenir autre que celui qu’ils sont en train de lui préparer. Rappelons, une fois encore, l’opération modèle de Arasat Moualy Abdeslam à Marrakech et l’intervention d’une entreprise citoyenne et l’initiative d’un pouvoir public averti et attentif.
Agissons tous et maintenant, avant qu’il ne soit trop tard, pour arrêter cet acte d’agression qui se prépare à l’insu de tous à l’encontre du site de Villa Harris, l’un des derniers espaces verts de la ville de Tanger.
* Président de l’Association Tadaoul pour l’éducation,
le patrimoine et l’environnement.