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Au Maroc, malheureusement, nous n’avons pas encore l’impression que la réforme parvienne à mobiliser les acteurs principaux du changement, à commencer par les premiers concernés, les enseignants. La première explication est de nature historique. Trop de fausses réformes ont écrasé toute volonté d’adhésion à un quelconque mouvement de changement. Les retards accumulés dans la gestion de certains dossiers de type syndical ont fini par achever ce désir d’espérance propre aux pédagogues; la configuration administrative du système trop centralisé (la hiérarchie est exportée même avec la décentralisation) neutralise l’esprit d’initiative.
L’autre explication émanant d’ailleurs de la première est l’existence d’une certaine perception verticale de la réforme: le changement n’est perçu qu’émanant d’un centre névralgique. Si ce n’est le ministre, ça doit être un directeur, un inspecteur...un centre. Or un des aspects majeurs de toute réforme qui réussit est justement l’apport au niveau des initiatives locales, sous forme de démarches pédagogiques nouvelles, de propositions didactiques, ou de formules d’organisation et de gestion de la vie en classe et dans les établissements.
En d’autres termes, l’institution met en place le cadre général de la réforme, les enseignants, les administrateurs pédagogiques lui donnent un contenu.
Le ministère de l’Education nationale a mis en place un ensemble de structures pour la révision des programmes et pour la conception de nouveaux manuels scolaires. C’est-à-dire les aspects les plus immédiats et les plus fondamentaux de la réforme du système scolaire. Les programmes sont en effet le quotidien de l’école. Ce à partir de quoi se forme le célèbre triangle didactique, avec ses pôles: savoir, enseignant, apprenant. C’est en fait un immense chantier, aussi crucial que le travail mené en amont pour la structuration générale du système. Pour une partie de l’opinion publique, la réforme même se ramène à ça: les contenus de l’enseignement. Car aujourd’hui on sent que l’école est inopérante dans ce qui a fait sa première légitimité au Maroc, à savoir un facteur de régulation, voire de promotion sociale. Le formidable ascenseur affiche un trop plein qui dégage malaise et désespoir.
On n’hésite pas, épousant en cela l’idéologie en vogue, à dire que l’école n’a plus cette fonction. Le système éducatif doit être géré comme une entreprise, qui doit être à l’écoute de l’économie, fonctionner en termes d’adéquation avec le marché. Introduire en somme le principe de la rentabilité et de l’efficacité. Les contenus du savoir à enseigner doivent ainsi être conçus en termes opérationnels, en termes de capacités spécifiques. Les enseignements moyens devraient être privilégiés pour assurer une adaptation rapide aux mutations de la demande.
Nous pensons pour notre part que ce discours n’est pas pertinent. Il fait l’économie de la dimension finalité sociale et éducative de l’école publique. L’école est concernée par la question de la cohésion sociale. Ce n’est pas un territoire neutre, extra-territorial. Au moment où l’on réfléchit au quoi enseigner, il est important de le mener en parallèle avec le comment enseigner pour tenir compte du principe démocratique, fondateur de l’école marocaine moderne. Une école démocratique est celle justement qui est interpellée par la question de l’inégalité. L’école n’est pas passive à ce sujet, elle est un acteur efficace, dans les deux sens de l’échelle sociale. Je rappelle que l’une des découvertes les plus importantes de la sociologie de l’éducation : l’inégalité vient aussi de ce qui se passe à l’école. “Autrement dit, l’école est responsable pour le meilleur comme pour le pire”, dit le sociologue Alain Touraine. Messieurs les pédagogues, votre mission est aussi un engagement sur un projet de société.