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A la mi-juillet dernier et lors d’un débat organisé par l’OMDH sur «La réforme des établissements pénitentiaires à la lumière du projet de loi 10.23», le directeur du greffe judiciaire à la DGAPR, Hassan Hmina, avait déjà mis en garde contre la surpopulation carcérale. «Le principal défi reste maintenant la surpopulation carcérale», a souligné ce cadre de la DGAPR, indiquant que le nombre des détenus dépasse audit mois 99.000 personnes.
Contactée par Libé, une source bien informée a indiqué que le taux de surpopulation carcérale dans la prison d’Oukacha à Casablanca a atteint 300% de sa capacité d’accueil, affirmant que cela met la DGAPR dans l’embarras, car elle se trouve dans l’obligation d’abriter cette population. Le communiqué de la DGAPR a provoqué un tollé et suscité la réaction de plusieurs institutions.
Ainsi, la Présidence du Ministère public a rendu public, mercredi dernier, un communiqué dans lequel elle informe «l'opinion publique de certains éclaircissements sur les facteurs et contraintes qui influent sur le nombre des pensionnaires des établissements pénitentiaires », précisant que « l'évolution qualitative, ces dernières années, de la criminalité aussi bien sur le plan de la gravité des actes commis que des moyens utilisés ou la nature de leurs auteurs, surtout les récidivistes, avec leurs conséquences sur la quiétude du citoyen et la société, a contraint les parties chargées de l'application de la loi à faire face à tous ces phénomènes en vue d'assurer la sécurité des personnes et de préserver leurs biens ».
La Présidence du Ministère public a relevé que les services de sûreté et la police judiciaire déploient et continuent toujours à consentir des efforts inlassables face aux hors-la-loi en vue de les appréhender et de les déférer devant les parquets compétents, affirmant que leur nombre s'est établi, durant le premier semestre de 2023, à 309.259 personnes poursuivies, dans leur grande majorité, pour trafic de drogue, hooliganisme et crimes financiers en rapport avec la lutte contre la prévarication financière ou encore l'agression des personnes dans le cadre de bandes criminelles, les vols qualifiés et autres crimes graves.
Et la même source de préciser que « les efforts considérables déployés par les services de la police judiciaire, toutes catégories confondues, dans le cadre de leur contribution à la lutte contre l'impunité et à l'arrestation des fugitifs, ont permis l'interpellation, au cours du premier semestre de 2023, de 162.545 personnes faisant l’objet d’avis de recherche nationaux, qui ont été déférées devant les parquets compétents pour prendre les dispositions juridiques qui s’imposent à leur encontre », ajoutant que «les parquets ont veillé à exécuter les jugements de peines privatives de liberté prononcées contre les condamnés en état de liberté».
C’est le cas également pour un ensemble de personnes faisant l’objet d’ordonnances de contrainte par corps pour non paiement des amendes, des dettes publiques ou privées qui leur étaient dues conformément à la loi. « Il ne fait aucun doute donc que ces facteurs ont contribué à augmenter la population carcérale des établissements pénitentiaires », a estimé la Présidence du Ministère public.
Tout en mettant l’accent sur l’importance de la teneur du communiqué de la DGAPR au sujet du diagnostic de la situation des établissements pénitentiaires, la Présidence du Ministère public a affirmé que la situation actuelle requiert le traitement de la question de la surpopulation carcérale à travers diverses approches visant à humaniser les établissements pénitentiaires et à assurer les conditions adéquates au personnel y travaillant pour mener à bien sa mission, tout en gardant à l’esprit l'obligation de garantir la sûreté et la sécurité de la société.
En ce sens, elle réaffirme sa volonté de convoquer, en septembre prochain, une rencontre réunissant l’ensemble des institutions et parties concernées pour discuter de cette question, ainsi que des opinions, propositions et moyens pour transcender toutes les difficultés et contraintes liées à la gestion de la détention préventive et à la situation des établissements pénitentiaires, dans la perspective d’une intervention prochaine du législateur afin de trouver les solutions législatives adéquates concernant l'adoption de nouvelles dispositions susceptibles de consolider les mesures alternatives à la détention préventive et d’accélérer la promulgation des dispositions relatives aux mesures alternatives aux peines privatives de liberté, au Code de la procédure pénale et au Code pénal en général.
Face à la position modérée de la Présidence du Ministère public, celle de l’Alliance des magistrats était plutôt virulente. « L’Alliance refuse de manière catégorique toute immixtion de nature à remettre en cause l’indépendance du pouvoir judiciaire ou d’influer sur les décisions des magistrats, y compris en cas de poursuite en liberté ou dans le cadre d’une détention », a-t-elle ajouté dans un communiqué.
Pour sa part, l’Observatoire marocain des prisons (OMP) qui n’a cessé depuis des années d’alerter les autorités sur la situation alarmante dans les établissements pénitentiaires, a affirmé dans un communiqué : « Nous, à l’Observatoire marocain des prisons (OMP), comprenons la position de la DGAPR, et nous comprenons les réactions de certaines associations de magistrats à ce sujet, mais l'enjeu aujourd'hui n'est pas la recherche des causes de la situation alarmante dans nos prisons (…), nous avons plutôt besoin de solutions politiques et judiciaires, et une réelle mise en œuvre des dispositions constitutionnelles. Nous avons besoin d'un dialogue national sur les prisons, la détention provisoire et la justice pénale ».
Dans ce cadre, l’OMP a appelé à la mise en place d'une « Commission nationale de suivi et de salut » composée de différentes personnalités pour effectuer des visites aux établissements pénitentiaires et s’enquérir in situ de la situation des détenus, et à prendre des mesures urgentes pour réduire le taux de la détention provisoire, et libérer les prisonniers dont les peines expirent dans les trois prochains mois, ou dont les dossiers sont en stand-by.
Mourad Tabet