NFT, nouvel investissement des passionnés et des spéculateurs


Asmae Sellak (Stagiaire)
Jeudi 5 Mai 2022

Une révolution des codes du marché de l’art

80.000$ ! C'est le prix proposé pour les cinq œuvres artistiques réalisées par le Nigérian Hockney Osinachi, lors d’une enchère en ligne du catalogue Christie’s.
Osinachi marque l’actualité artistique numérique à travers son exposition « Different shades of water ». Sa touche particulière repose sur l’utilisation de l’outil Microsoft Word, où l'on peut vite constater la centralité des corps des personnages sombres et la magnificence des couleurs utilisées. C’est ainsi que Osinachi devient le premier artiste NFT africain à être honoré par une grande maison d'enchères. Cette première réussite est au cœur du marché crypto-art, notamment celui des NFT où l'authenticité et la singularité de l'œuvre sont mises en valeur par le biais de sa technologie décentralisée de la blockchain qui assure sa traçabilité et sa propriété artistique numérique. Une décentralisation qui joue au profit des artistes puisqu’elle leur permet d’être en lien direct avec les collectionneurs et les acheteur ssans passer parles institutions intermédiaires, et de vendre leur produit à un public mondial. C’est un renouvellement du monde de l’art offrant aux acheteurs la possibilité de posséder un bien exclusif. "Quand on dit qu’on crée un NFT, on inscrit une carte d’identité de l’œuvre d'art dans la blockchain. L'avantage, c'est que quand on écrit une transaction dans cette blockchain, elle ne disparaît jamais. Un papier, ça se perd, un NFT, ça ne se perd pas", explique Albertine Meunier, artiste en art numérique. Aujourd'hui, nombreux sont les artistes africains qui veulent prendre ce virage et goûter à cette nouveauté digitale qui a révolutionné le marché artistique. Une révolution qui constitue leur véritable moyen de transmettre leur culture au monde, et mettre en valeur l’identité africaine. Dans la plupart des pays d’Afrique, les travaux artistiques traditionnels sont généralement financés par des organismes, des associations internationales, ou des institutions financières. Grâce au NFT, des créateurs reçoivent systématiquement le pourcentage des prix de vente qui est versé automatiquement dans un portefeuille cryptomonnaie, ouvrant la voie à des revenus beaucoup plus intéressants. Bien que plusieurs artistes africains tracent la scène artistique et remplissent les maisons d’art contemporain depuis quelques années, le marché d’art africain compte encore peu de fondations et de galeries. Ce sont surtout les galeries françaises ou américaines qui présentent l’art africain, dont les plus célèbres sont situées à New York, Paris, et Londres. Un besoin fréquent des Occidentaux qui limite la productivité de l'art africain, et pousse les artistes à vendre leurs produits à des prix très bas. Or, dans un marché d'art, une valorisation locale des œuvres artistiques est cruciale. L'avènement des NFT est aujourd'hui un exutoire pour la majorité des artistes africains qui profitent d’une mondialisation de leurs œuvres tout en conservant leur authenticité et leur originalité. Toutefois, les NFT ne constituent pas uniquement des œuvres artistiques, mais aussi des biens numériques uniques, des fonds d’investissement dont la valeur est instable et soumise à la volatilité du marché ( non fongible ), ce qui présente un risque de perte de capital. Prenons l’exemple du tout premier post Twitter vendu à 2,9 millions à un homme d’affaires, qui a annoncé à son tour vouloir le revendre. Toutefois, les offres proposées ne dépassent pas les 12.000 dollars. Le marché des NFT a considérablement progressé en 2021 avec des ventes ayant suscité de nombreux débats dans la sphère artistique. 69,3 millions de dollars sur le catalogue Christie’s pour une création numérique intitulée Everydays : The First 5000 days de l'artiste américain Beeple. Il s'agit d’un collage de 5000 œuvres numériques représentées par des personnages de la culture populaire et des personnalités publiques, où l’artiste s’est engagé à dessiner chaque jour une œuvre en formant des mosaïques d’images qui peuvent être agrandies sans perte de qualité d’image. L'œuvre The Merge de l’artiste Pak vendue à 91 millions de dollars en décembre 2021 sur la plateforme d'enchères en ligne NIFTY, a aussi défrayé la chronique avec sa grande particularité : l’oeuvre a été achetée par 28.984 personnes qui se sont procurées 266.445 unités permettant la réalisation de l’oeuvre finale. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui investissent sur le marché numérique des NFT, beaucoup plus que sur le marché traditionnel physique. Une croissance à l’échelle mondiale qui peut également augmenter les risques de fraude et de plagiat en raison du vol des droits d’auteurs. Opensea, une plateforme spécialisée dans la vente des jetons numériques, a récemment révélé sur Twitter que 80% des NFT commercialisés sont des fraudes, des spams, ou du plagiat. Ces risques se manifestent sur deux volets essentiels: Il y a d’abord le cas où une personne se fait passer pour un célèbre artiste et vend de faux NFT, et celui où un faux magazine en ligne met en vente des NFT qui ne sont même pas présents sur l’espace numérique. Ceci est étroitement lié aux droits de la propriété intellectuelle pour la technologie blockchain décentralisée, qui ne sont pas tout à fait similaires aux droits d’auteur dans le marché d’art classique. D’où la nécessité d'une réglementation et d’une conception d’un modèle juridique, particulièrement en Afrique où la popularité des NFT est considérablement croissante.


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