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Les avocats dans la rue à Alger pour maintenir la pression sur le pouvoir


Lundi 25 Mars 2019

Un millier d'avocats ont manifesté samedi en robe noire dans le centre d'Alger pour appeler au changement de régime, maintenant la pression au lendemain de nouveaux cortèges monstres à travers le pays réclamant le départ du président Abdelaziz Bouteflika.
Un mois après le début de ces rassemblements inédits, la contestation du "système" ne montre pas de signe d'essoufflement, note la presse privée, alors que le quotidien d'Etat juge "pragmatique" la transition proposée par le pouvoir pour régler la crise.
"Non à la violation de la Constitution", "Avocats aux côtés du peuple", pouvait-on lire sur des pancartes brandies par des avocats, venus de plusieurs régions du pays et rassemblés sur le parvis de la Grande Poste, bâtiment emblématique au coeur de la capitale algérienne.
"Y en a marre de ce pouvoir", "Système dégage!", ont-ils scandé en agitant des drapeaux algériens --vert et blanc, frappés de l'étoile et du croissant rouges. Une avocate du barreau de Blida (40 km au sud d'Alger), Rabea Marenes, s'est fait confectionner une robe d'avocat aux couleurs nationales. "Le peuple est maître de la situation, il faut l'écouter", a-t-elle dit.
Le 23 mars est en Algérie la Journée nationale de l'avocat, instituée en souvenir de l'avocat indépendantiste Ali Boumendjel, torturé et tué par l'armée française le 23 mars 1957 durant la guerre d'indépendance (1954-1962).
Les avocats ont forcé un cordon de police pour défiler dans le centre de la capitale, avant de se disperser sans incident.
Pour Me Noureddine Benissad, un des ténors du barreau d'Alger et militant des droits humains, "la famille de la défense s'est rassemblée aujourd'hui pour dire +game over+" (la partie est finie).
Confronté depuis le 22 février à une contestation sans précédent depuis son élection en 1999, M. Bouteflika a promis la mise sur pied à une date non précisée d'une "Conférence nationale" devant réformer le pays et élaborer une nouvelle Constitution.
Mais il a également repoussé la présidentielle prévue le 18 avril à après la fin de ladite Conférence, prolongeant de fait sine die la durée de son quatrième mandat au-delà de son expiration constitutionnelle, le 28 avril.
"Nous sommes contre une transition pilotée par le système. Le changement et la transition c'est maintenant", a déclaré Me Benissad.
Me Nora Ghidouche, avocate à Alger, a dit être "ici pour dénoncer la violation de la Constitution" par le président. "Nous sommes les représentants du peuple devant la loi. Et le peuple réclame le changement".
Avocat au barreau de Boumerdes (40 km à l'est d'Alger environ), Me Khaled Djatit est venu manifester avec sa fille de cinq ans, Fatma, qu'il porte sur ses épaules. "C'est pour nos enfants que nous manifestons pour une Algérie meilleure", a-t-il dit à l'AFP.
Samedi, une partie de l'opposition a proposé une feuille de route pour sortir le pays de la crise, prévoyant une "période de transition" de six mois, débutant à l'expiration de l'actuel mandat de M. Bouteflika.
Une "instance présidentielle" collégiale, composée de "personnalités nationales connues pour leur crédibilité, leur probité et leur compétence", serait chargée de la gestion de l'Etat et de l'organisation d'une présidentielle, à laquelle les membres de l'instance ne devront pas se présenter et pour laquelle ils ne pourront pas soutenir de candidats.
La veille et pour le cinquième vendredi consécutif, les Algériens ont manifesté en masse dans la quasi-totalité du pays, et principalement à Alger, pour réclamer le départ du chef de l'Etat, de son entourage et du "système".
Outre les avocats, de multiples manifestations de médecins, d'étudiants ou encore de journalistes ont contribué ces dernières semaines à maintenir la pression en faveur de changements profonds et à rejeter les propositions du pouvoir, vues comme un moyen de jouer la montre.
Pour le quotidien francophone Liberté, "la fin approche" et "un mois de mobilisation aura suffi pour ébranler le système en place et surtout éprouver sa terrible fragilité".
Autre journal francophone, El Watan, assure que "le navire coule" et prédit qu'il sera "abandonné par ses occupants et son équipage dans les prochaines semaines".
"A ceux qui pariaient sur l'essoufflement du mouvement avec le temps, les Algériens ont montré qu'ils ne sont pas prêts d'abandonner les rues", écrit de son côté le quotidien arabophone El-Khabar.
A l'inverse, le quotidien gouvernemental El Moudjahid souligne qu'il existe aussi des "familles" qui demeurent "sceptiques" face aux bouleversements réclamés par les manifestants.
"Ces marches traduisent un ras-le-bol", reconnaît-il, tout en estimant que face aux "problèmes réels du pays", la transition proposée par le pouvoir offre une perspective "réaliste et pragmatique".

La feuille de route de l'opposition pour une sortie de crise sans Bouteflika

Une partie de l'opposition algérienne a proposé samedi une feuille de route présentant une Algérie sans le président Abdelaziz Bouteflika, dont la volonté de se maintenir au pouvoir a suscité une crise secouant le pays depuis un mois.
D'après un communiqué, la feuille de route prévoit "une courte période de transition" d'une durée de six mois, débutant dès l'expiration constitutionnelle de l'actuel mandat du chef de l'Etat, le 28 avril. La gestion de l'Etat serait alors confiée à une "instance présidentielle" collégiale.
La feuille de route de l'opposition --totalement marginalisée par le mouvement de protestation dans lequel elle ne joue aucun rôle-- a été adoptée à l'issue d'une réunion à laquelle ont notamment participé des syndicats autonomes, en plus de partis.
Parmi ceux-ci figurent l'Avant-garde des Libertés d'Ali Benflis, principal adversaire du président Bouteflika lors des présidentielles de 2004 et de 2014 et chef de la principale formation islamiste, et le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP) d'Abderrazak Makri, qui a rompu avec la majorité présidentielle en 2012.
Le document prévoit que l'"instance présidentielle" collégiale soit composée de "personnalités nationales connues pour leur crédibilité, leur probité et leur compétence".
Les membres de cette instance devront s'engager à ne pas "se porter candidat et à ne pas soutenir de candidats" lors de la présidentielle organisée à l'issue de la période de transition, d'après la feuille de route.
L'instance détiendra les "prérogatives de président de l'Etat" et sera chargée notamment de nommer "un gouvernement de compétences nationales pour expédier les affaires courantes", de créer "une instance indépendante chargée de l'organisation des élections" et d'amender la loi électorale pour "garantir la tenue d'élections libres et transparentes".


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