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Les PPP ont le vent en poupe en Afrique

Pour une capitalisation de bonnes pratiques des partenariats public-privé sur le continent


Alain Bouithy
Jeudi 15 Novembre 2018

 Casablanca a abrité les 12 et 13 novembre la deuxième édition du Forum Partenariat public-privé (PPP Afrique).
Placée sous le thème «Promouvoir l’agriculture et les technologies de l’information (TIC) grâce aux partenariats public-privé (PPP)», cette deuxième édition faisait suite à la première tenue en octobre dernier à Paris et qui avait réuni  plusieurs décideurs africains et investisseurs internationaux.
Comme dans la capitale française, le deuxième Forum PPP Afrique, initié par le Centre international de formation professionnelle continue (Trainis), en partenariat avec le spécialiste français en gestion d’événements (Evenium), a réuni 300 décideurs africains et européens dont des ministres, hauts fonctionnaires, chefs d’entreprise, financiers, bailleurs de fonds et consultants venus partager leurs expériences sur ce modèle. Mais aussi s’enrichir des échecs des uns et des autres.
Inscrite dans une démarche de capitalisation des expériences et de développement des bonnes pratiques dans la mobilisation du secteur privé pour le développement du continent, l’édition 2018 du Forum PPP Afrique visait à mettre en avant «la longue et fructueuse expérience du Royaume du Maroc dans la mise en place de partenariats public-privé, ainsi que l’excellence et le savoir-faire des entreprises marocaines dans ce domaine », a indiqué à Daouda Coulibaly, PDG de Trainis et président du Forum PPP Afrique.
La décision d’organiser au Maroc cet important rendez-vous, qui nourrit l’ambition d’être un catalyseur de nouveaux contrats de PPP, dans lequel les acteurs publics et privés occuperont une place centrale, « s’inscrit aussi en cohérence avec l’engagement de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, pour le développement économique de l’Afrique dans une logique de partenariat équilibré et gagnant-gagnant», a-t-il souligné à l’ouverture de cette rencontre internationale.
Adjointe au directeur de la DEPP, au ministère de l’Economie et des Finances, Najat Saher s’est, pour sa part, réjouie du thème choisi  qui «constitue une occasion pour les participants d’échanger et de profiter du retour d’expérience et de s’enquérir surtout de l’expertise des pays participants».
Revenant sur  l’expérience et l’expertise du Maroc en matière des PPP, elle a rappelé que «le Maroc s’est inscrit depuis plusieurs années dans la dynamique du recours à ce mode innovant dans la réalisation des projets de grande envergure à l’échelle aussi bien nationale et que dans le cadre de la coopération Sud-Sud».
Poursuivant son exposé, Najat Saher a expliqué, en outre, que  «dans un contexte mondial caractérisé par la persistance de fragilités économiques et financières, le recours aux PPP répond aussi à un besoin de financement croissant pour accélérer l’amélioration de l’offre publique en infrastructures et services et partant renforcer la compétitivité et l’attractivité de nos pays et améliorer surtout les conditions de vie de nos citoyens ».
Soulignant également l’intérêt de cette rencontre,  Moulay Ahmed Boubacar, ministre malien du Développement industriel et de la Promotion des investissements, a déclaré que «ce forum revêt une importance particulière pour les pays africains. D’autant plus que le thème cadre parfaitement avec les enjeux actuels et les différentes interventions que j’ai entendues le confirment».
A noter qu’au cours de leurs échanges, les différents intervenants ont souvent souligné l’exemple du Royaume, cité les projets tels que les Agropoles de Meknès, la mise en location de terre, les réseaux d’irrigation mis en place au Maroc à travers des PPP.
Saluant l’expertise du Maroc, Zavier Reille, directeur du Bureau Maghreb, IFC-Banque mondiale, a indiqué que le Royaume a effectué une trentaine de PPP intéressants pouvant inspirer d’autres pays, soulignant qu’il a fait le premier PPP en irrigation dans le monde et a réussi à le faire fonctionner.
«C’est un très beau succès qui a permis à 2000 fermiers dans le domaine des agrumes de monter en puissance et d’avoir une production exceptionnelle», a-t-il dit.
Marc Teyssier, délégué général du Club PPP Med’ Afrique, en est convaincu : «Plus on dialogue, plus on échange entre nous, plus on renforcera notre connaissance des PPP qui est une matière complexe et évolue avec le temps. C’est en s’enrichissant des succès et des échecs que vous pouvez dans vos pays respectifs essayer d’apporter au mieux des solutions de l’avantage du PPP», a-t-il lancé estimant que le PPP est la meilleure transparence du vrai financement public.
Aussi, grâce aux PPP, «on peut faire en 2 ans ce que l’on faisait en 20 ans, que ce soit pour l’agriculture ou pour les TIC», a-t-il soutenu citant quelques exemples de réalisations en France, notamment.
Il est à signaler qu’à l’issue de ce forum, il a été annoncé un partenariat avec  l’Agence marocaine de coopération internationale (AMCI) pour une capitalisation de bonnes pratiques en PPP sur le continent africain qui se traduira par un cycle de séminaires sur le sujet autour de formations et de visites d’entreprises au profit de 20 pays africains. Ce, à partir du mois d’avril prochain.
Enfin, le Forum s’est achevé par la remise du Trainis PPP Awards  qui récompense chaque année des personnalités ayant œuvré avec succès pour le développement des PPP en Afrique. Cette année, le prix a été attribué à Soumeylou Boubèye Maiga (Premier ministre du Mali), à l’ambassadeur Si Mohamed Methqal (AMCI) et à Samba Bathily (président d’ADS Group).
Organisée avec le soutien de l’AMCI, l’Agence pour le développement agricole (l’ADA), la Fédération marocaine des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (APEBI) et la Chambre d’agriculture de la région Casablanca-Settat, la deuxième édition du Forum PPP Afrique «contribuera à raffermir les bases de la collaboration fructueuse entre le public et le privé, entre pays africains, dans un élan unique d’aider à promouvoir le développement des TIC et de l’agriculture en Afrique», a conclu Daouda Coulibaly.

ILS ONT DIT

Moulaye Ahmed Boubacar, ministre du Développement
industriel et de la Promotion des investissements (Mali)
Les PPP pallient l’insuffisance des moyens financiers publics



« Face à la rareté des ressources publiques, la participation du secteur privé aux efforts de développement de nos Etats apparaît comme indispensable si nous voulons nous inscrire sur la voie de l’émergence.
En effet, les PPP, à travers la mobilisation des financements et de l’expertise privée constituent des mécanismes appropriés pour pallier  l’insuffisance des moyens financiers en vue de réaliser les infrastructures publiques lourdes nécessitant un amortissement sur des longues années.
Fort de cette conviction, le gouvernement malien a initié des réformes majeures en vue d’améliorer l’environnent des affaires. Cela s’est traduit notamment par l’adoption d’une loi sur les PPP  en décembre 2016 et la mise en place d’une cellule  dédiée uniquement à la gestion des questions de PPP que nous appelons Unité PPP auprès du Premier
ministre ».

Daouda Coulibaly, président du Forum PPP Afrique
L’Afrique ne doit pas rester en marge du phénomène PPP


« En Afrique, les PPP dans l’agriculture sont récents et modifient considérablement le secteur. Ils évoluent de plus en plus vers un concept élargi qui inclut pleinement les petits agriculteurs. Malheureusement, les gouvernements africains notamment subsahariens ne consacrent en moyenne que 5% de leur budget  au lieu de 10% conformément aux engagements qu’ils ont pris  eux-mêmes à Malabo en Guinée Equatoriale.
Nous sommes persuadés que le privé peut aider à financer ce secteur, notamment par des contrats de partenariats public-privé.
S’agissant des TIC, depuis bientôt 15 ans, l’Afrique montre la voie au reste du monde en matière de paiements via le mobile, d’applications numériques et de fabrication de drones. En mettant le focus sur ce secteur, nous souhaitions  attirer l’attention des investisseurs sur les potentialités qu’offre le continent en matière numérique ».

Zavier Reille, directeur du Bureau Maghreb
de l’IFC-Banque mondiale
Il faut sortir de la logique public-public


« Nous avons adopté depuis trois ans une nouvelle vision sur les PPP. En effet, le modèle actuel de financement des besoins d’investissement s’est essoufflé. On ne peut plus continuer à financer tous les besoins uniquement par le public puisque les taux d’endettement deviennent plus importants. Il faut donc trouver un nouveau modèle. Ce modèle, c’est celui des PPP auquel nous ajoutons un 4ème P, c’est-à-dire : Priorité au partenariat public-privé.
Nous pensons que les financements ne doivent pas venir seulement de l’extérieur et qu’il faut surtout encourager l’épargne locale à investir dans  les projets. Les PPP sont une nouvelle approche qui sort de la logique public-public où pour financer les infrastructures, l’Etat va s’endetter auprès d’un bailleur de fonds en ne permettant qu’une participation minimale du secteur privé».

Najat Saher, adjointe au directeur de la DEPP
au ministère de l’Economie et des Finances (Maroc)
L’Etat encourage
la coopération avec
le secteur privé


« Le Maroc s’est inscrit depuis plusieurs années dans la dynamique du recours à ce mode innovant dans la réalisation des projets de grande envergure à l’échelle aussi bien nationale que dans le cadre de la coopération Sud-Sud.
Le développement remarquable du recours aux contrats PPP dans de nombreux secteurs d’activités va de pair avec l’évolution générale des missions de l’Etat. Dans la sphère économique, l’Etat privilégie aujourd’hui de plus en plus un recentrage de ses rôles de stratège, de facilitateur et de régulateur pour la concrétisation des PPP.
C’est dans cette vision que se sont inscrits les efforts déployés par le Royaume dans l’exploitation et le développement de nouveaux outils et mécanismes qui favorisent les initiatives privées pour une meilleure contribution de tous les acteurs publics et privés, à la modernisation de l’économie marocaine, à la diversification des sources de croissance et surtout un développement territorial du Maroc ».

Mohamed Bourrahim, vice-président du Conseil
de la commune de Casablanca en charge de la mobilité


Casablanca est par parmi
les premières villes au Maroc
à adapter la démarche PPP

« Depuis les années 80, la ville de Casablanca a signé les premiers contrats de concession  du transport par bus avec des opérateurs privés. Ce partenariat avec le privé ne cesse de se développer et a vu l’expansion à d’autres secteurs sous d’autres formes, notamment la gestion déléguée.
Dans ce cadre, la ville a signé en 1997 un premier contrat au Maroc de gestion déléguée de distribution d’eau et d’électricité avec la Lydec et en 2003 d’autres formes de contrats de gestion déléguée avec le secteur privé ont vu le jour notamment dans le domaine de la collecte des ordures ménagères et le transport par bus. Par ailleurs, dans son programme de mise à niveau 2015-2021, Casablanca compte beaucoup sur le secteur privé pour la réussite des projets programmés. »

Marc Teyssier, délégué général
du Club PPP Med’ Afrique
Le PPP n’est  pas une solution
miracle, c’es un outil parmi d’autres


« Aujourd’hui, les Etats manquent d’argent : il y a un besoin d’investissement dans les infrastructures. Donc, il faut se tourner vers les différentes solutions qui existent  dans la boîte à outils de la commande publique.
Le PPP n’est  pas une solution miracle, c’es un outil parmi d’autres. Mais très clairement, on sent que les bailleurs de fonds regardent de très près la possibilité d’aller lever de l’argent sur le marché privé notamment pour tout ce qui est PPP marchand. Mais, en même temps, on ne peut pas simplement investir dans les routes et les aéroports sans investir dans les écoles et les hôpitaux ou la santé. C’est là que le PPP social peut prendre toute sa place. Reste à changer les habitudes. Car, le bon vieux marché public a ses avantages mais aussi ses inconvénients ».
Propos recueillis par
Alain Bouithy

 


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