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L'ONU, temple du multilatéralisme ébranlé par le coronavirus


Lundi 16 Mars 2020

L'ONU, temple du multilatéralisme ébranlé par le coronavirus
Au siège de l'ONU à New York, la vie est désormais au ralenti. Temple du multilatéralisme, des petites et grandes réunions sur tous les conflits et sujets, l'Organisation vacille sous le coup de la pandémie de coronavirus, incompatible avec le travail de diplomates cherchant au quotidien des consensus grâce aux contacts humains.
"Tout devient un peu plus compliqué", confie un diplomate en évoquant le télétravail auquel il est astreint comme une majorité d'employés du secrétariat (3.000 fonctionnaires) et des centaines de collègues travaillant au sein des missions des 193 Etats membres.
Un premier signalement d'un cas de Covid-19 --une diplomate philippine-- est survenu jeudi, entraînant la fermeture de sa mission. Le lendemain, le bâtiment de l'Agence pour l'enfance (Unicef), situé près du siège de l'ONU, était brusquement fermé après l'annonce de symptômes de grippe chez trois employés, sans même de confirmation de coronavirus.
Dans une lettre à tous les fonctionnaires de l'ONU, obtenue par l'AFP, le secrétaire général de l'organisation Antonio Guterres, qui a annulé vendredi un voyage en Afrique et a imposé un télétravail au personnel non essentiel jusqu'au 12 avril, souligne la nécessité de "rester calme et déterminé".
"Les Nations unies font face à l'un des plus gros défis de notre histoire", ajoute-t-il, en évoquant "un impact majeur" sur les employés et leur travail.
Le secrétariat de l'ONU gère quelque 100.000 Casques bleus dans une quinzaine d'opérations de paix et vient en aide quotidiennement à des millions de gens dans le monde.
Plusieurs mesures affectent le Conseil de sécurité, garant de la paix et de la sécurité mondiales.
En vertu d'une décision de la Chine, présidente en mars de cette instance, les délégations ne doivent pas comprendre plus de trois personnes et les consultations à huis clos se tiennent dans la vaste chambre dédiée aux réunions publiques qui permet davantage de distance entre diplomates que la petite salle utilisée jusqu'alors.
Dans la semaine à venir, plusieurs sessions ont été annulées pour ne garder qu'une réunion sur le Darfour et une autre sur le... multilatéralisme.
Un essai récent d'une réunion des quinze membres du Conseil par télé-conférence s'est révélé catastrophique. "Cela a été une faillite technique", reconnaît un ambassadeur sous couvert d'anonymat.
Très attachée aux procédures, la Russie n'est pas favorable aux sessions sans "rencontres physiques".
L'alinéa 3 de l'article 28 de la Charte des Nations unies prévoit des réunions "à tous endroits" mais "pas virtuelles", indique à l'AFP l'ambassadeur russe adjoint à l'ONU Dmitri Polyanskiy, notant que rien ne s'oppose à ce qu'un Etat membre y participe via vidéo s'il le désire.
Nul n'est en mesure de prévoir la fin des entraves au travail des diplomates et de l'ONU qui comptait célébrer en grande pompe son 75e anniversaire à l'occasion de l'Assemblée générale en septembre qui réunit chaque année des dizaines de chefs d'Etat, de gouvernement ou de ministres.
La pandémie "aura très probablement un impact sur l'Assemblée générale mais il est trop tôt pour en connaître les détails", affirme Stéphane Dujarric, porte-parole de l'ONU.
Dans les couloirs du vaste complexe situé au coeur de Manhattan, c'est la "ville fantôme", soupire un garde à un point de contrôle, en ne comptant plus les passages mais les heures... "On vient mais il y a de moins en moins de réunions, les consensus vont être plus difficiles à trouver", renchérit un ambassadeur, bien esseulé à l'entrée du bar des délégués.
Dans le bâtiment, fermé tardivement aux touristes, le self-service est depuis peu banni dans les cafétérias, des désinfectants ont été disposés un peu partout et les saluts ne se font plus qu'à distance respectable. La vie diplomatique onusienne qui se poursuit chaque soir à New York avec une ou plusieurs réceptions organisées par les missions auprès de l'ONU est pour sa part quasiment à l'arrêt.
Le coronavirus a au moins un avantage, note Stéphane Dujarric. Moins de voyages, moins de réunions, cela veut dire que l'ONU, confrontée à des problèmes budgétaires récurrents, "dépensera moins d'argent".

Le défi de taille qui attend la Fed

La Fed n'aura qu'une seule mission mercredi, à l'issue de sa réunion monétaire: convaincre marchés, entreprises et consommateurs qu'elle est prête à tout pour limiter l'impact du coronavirus sur l'économie américaine, même si ses outils ne sont pas les mieux adaptés à cette menace inédite.
La Réserve fédérale américaine devrait notamment dégainer son arme habituelle face à la crise, et annoncer une baisse des taux, comme l'anticipent désormais l'ensemble des analystes.
Une carte qu'elle a déjà sortie début mars, alors que l'épidémie de nouveau coronavirus commençait à dangereusement s'étendre aux Etats-Unis, menaçant l'activité du pays. La Fed avait alors abaissé d'un demi-point de pourcentage ses taux, jusqu'à une fourchette comprise entre 1% et 1,25%.
Et ce sans même attendre son habituelle réunion monétaire, qui se déroule toutes les six semaines. Une mesure qu'elle n'avait pas prise depuis 2008, alors que la crise des subprimes faisait rage.
Mercredi, son président Jerome Powell pourrait même décider de descendre jusqu'à zéro, et ainsi rejoindre beaucoup d'autres banques centrales.
C'est en tout cas ce que réclame depuis des mois le président Donald Trump, qui reproche à la Fed de ne pas en faire assez, de ralentir la croissance de l'économie.
"La Réserve fédérale doit enfin abaisser les taux, jusqu'à un niveau comparable aux banques centrales concurrentes", a-t-il encore tancé vendredi sur son compte Twitter, quelques heures avant de décréter l'urgence nationale.
Si Donald Trump tempête en permanence contre Jerome Powell, il a toutefois assuré samedi qu'il n'avait pas l'intention de nommer quelqu'un d'autre à la tête de la Fed.
L'abaissement des taux, qui permet de baisser le coût du crédit et ainsi de stimuler la consommation, fonctionne pour soutenir l'économie lors d'une crise classique. Mais rien ne dit que cela sera efficace pour lutter contre cette crise inédite.
Le défi qui attend la Réserve fédérale américaine est de taille, alors que la récession guette l'économie américaine et que Wall Street a connu jeudi sa pire journée depuis le krach boursier d'octobre 1987.
"L'enjeu est d'apporter des fonds aux entreprises dont le flux de trésorerie a été sévèrement touché par le virus, principalement dans le transport, l'hôtellerie, la restauration et d'autres secteurs des services pour lesquels la demande a chuté", explique Keith Wade, chef économiste du gestionnaire d'actifs Schroders.
Car si un nombre trop élevé d'entreprises doivent mettre la clé sous la porte, "le danger est qu'un choc temporaire ait un effet durable", souligne-t-il.
Son pronostic pour la semaine prochaine? Une nouvelle baisse des taux, mais aussi racheter de la dette de sociétés: "Bien que cela nécessiterait un changement de la loi aux Etats-Unis, cela pourrait être plus efficace que les baisses de taux".
Face à l'affolement, la Fed a en effet abreuvé les marchés en liquidités toute la semaine, apportant plusieurs milliers de milliards de dollars, et a renoué avec les rachats de dette américaine à travers les bons du Trésor.
Les observateurs y ont immédiatement vu le retour d'un outil utilisé pour combattre la crise de 2008: le quantitative easing (QE), ou assouplissement quantitatif, qualifié par des analystes de Barclays de "bazooka de la liquidité".
"La Fed est intervenue de manière agressive pour rétablir le calme sur les marchés, mais on attend encore plus de sa part", ont commenté des analystes d'Oxford Economics dans une note.
Cette réunion "pourrait être le moment +peu importe le prix+ de la Fed", avec une baisse des taux au plus bas, et "l'annonce officielle de la renaissance des QE", ajoutent-ils. Depuis la dernière réunion monétaire de la Fed, la face de l'économie américaine et mondiale a complètement changé. Ce qui n'était qu'un risque aux conséquences encore très incertaines fin janvier est aujourd'hui en train de mettre à genoux l'économie mondiale.
Jeudi, la Banque centrale européenne n'avait, en réponse au coronavirus, pas touché à ses taux, mais présenté un arsenal de mesures techniques, et estimé que la réponse devait d'abord venir des gouvernements.
Quant à la Banque d'Angleterre, elle a abaissé ses taux à 0,25%, et celle du Canada, d'un demi-point.


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