Personne ne peut prétendre qu’il n’y a pas eu recrudescence de la fuite des capitaux durant la période post- Printemps arabe. Adeptes de l’adage, selon lequel il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier, les grands fortunés du Maroc, soucieux de s’immuniser contre tous types de risques, ont fortement eu recours aux dépôts à l’étranger durant ladite période.
Nombreuses sont les statistiques à ce sujet, mais l’ensemble des institutions ou organisations (BCG, OCDI, GFI, et BRI) qui se sont penchées sur cette question n’ont prétendu détenir la vérité.
Se dire avoir des précisions à ce sujet revient à entretenir des illusions. Cependant, on peut se permettre de comparer les statistiques à ce sujet afin de se faire une idée sur la tendance.
En effet, certaines statistiques crédibles, à savoir celles de la Banque des règlements internationaux (BRI) (bank for international settlements), montrent que les dépôts de Marocains dans les banques étrangères ont connu une forte hausse au cours de l’année dernière. Les chiffres publiés par ladite banque relèvent une progression des dépôts des non-résidents estimés à 5,549 milliards de dollars contre 4,490 milliards de dollars en 2012. Ces estimations de la banque centrale, ne sont pas sans fondement. Bien qu’elles informent sur une tendance, elles sont le fruit d’une collecte d’informations auprès de plus de 40 centres financiers dans le monde. Il s’agit de dépôts effectués par des Marocains dans des banques de pays où ils ne sont pas résidents, dont une partie est faite dans la légalité. Il peut s’agir de capitaux appartenant à des personnes morales publiques ou privées, dans le cadre d’opérations autorisées par l’Office des changes.
En revanche, les dépôts d’un Marocain résidant légalement dans l’un des pays de l’Union européenne ne sont pas couverts par ces statistiques.
Au 30 septembre 2013, les montants en provenance du Royaume déclarés sont donc supérieurs à 5,5 milliards de dollars.
Cette donne a poussé le gouvernement, dont le seul souci actuellement est de renflouer les caisses du Trésor, à valider son projet d’amnistie concernant les avoirs mis illégalement à l’étranger et à encourager leurs détenteurs à régulariser leur situation auprès des pouvoirs publics.
Ce qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est que l’évaluation faite par la BRI et l’amnistie approuvée par le gouvernement ne constituent que la partie visible de l’iceberg.
Au cours des dernières années, plusieurs think tanks ont essayé de mettre la lumière sur ce phénomène. Notamment le «Boston Consulting Group » (BCG) qui a publié, en juin dernier, une étude qui est passée presque inaperçue. Cette fois-ci, c’est un signal fort émis par le think tank américain « Global Financial Integrity » (GFI), qui a publié un rapport sur la fuite des capitaux en classant le Royaume à la 45ème place sur 143 pays.
Comparé à ses voisins immédiats, le Maroc est classé devant la Tunisie qui arrive à la 128ème position avec seulement 27 millions de dollars, et derrière l’Algérie classée à la 42ème avec 1,471 milliard de dollars.
Selon un rapport du Political Economy Research Institute (PERI), la fuite des capitaux de l’Algérie est estimée à 267 Mds de dollars, alors que celle du Maroc est de 88 Mds USD.