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Fenêtre : L’homme de l’Indignation


Atmane Bissani
Jeudi 28 Avril 2011

Stéphane Hessel (93 ans) écrit dans son dernier livre « Indignez-vous ! » (Indigène, 2011) que « le motif de la résistance, c’est l’indignation. » Pour mieux expliciter son propos, Stéphane Hessel avance ceci : « Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j’ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l’histoire et le grand courant de l’histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler. Ces droits, dont la Déclaration universelle a rédigé le programme en 1948, sont universels. Si vous rencontrer quelqu’un qui n’en bénéficie pas, plaignez-le, aidez-le à les conquérir. » Le message est tellement clair qu’il n’induit point en erreur. Stéphane Hessel parle en parfaite connaissance de cause, et ce n’est pas un hasard s’il se prononce ainsi en ce moment précis de l’histoire. En effet, le monde actuel vit en pleine effervescence politique et économique. Tout se passe comme si ce monde était devenu un creuset où pullulent peur, tyrannie, insécurité et intolérance. Dans cette optique, la dynamique révolutionnaire que connaît le monde arabe en ce moment demeure fort révélatrice d’une indignation profonde que les insurgés cherchent à exprimer à cor et à cri. Qu’il s’agisse de l’occident ou de l’orient, l’indignation est toujours le résultat d’une oppression et d’une répression si profondes. S’indigner revient à dire refuser d’être à la merci éternelle des pédagogues de la normalisation de la philosophie (combien tragique) du « laisser-aller » et du « faire avec.» S’indigner revient à dire aussi que la logique de l’histoire doit l’emporter sur la logique de la nonchalance politique et intellectuelle. S’indigner c’est prendre sa place dans l’histoire, car la non-indignation est synonyme de l’acceptation du statu quo, ce qui va à l’encontre de la logique de l’histoire. Les peuples arabes, et c’est là le motif de leur indignation, ont enfin pris conscience de leur réalité morose. Ils ont enfin compris que l’histoire ne tolère pas à ceux qui n’y croient pas. Leur indignation marque un état de rupture historique avec le passé qui leur a toujours été imposé. S’ils s’indignent aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont compris la leçon de l’histoire : la révolte est une re- création de la face occultée de l’homme libre et digne de sa liberté. Il n’y a pas, dès lors, de création sans indignation. Il n’y a pas non plus de dignité sans action. Le monde change en permanence. La conjoncture d’hier n’est plus celle d’aujourd’hui. L’histoire chemine et fait cheminer l’homme de l’indignation, cet homme qui se crée à chaque instant en se saisissant dans sa grandeur et dans sa bravoure. On ne saurait définir l’homme de l’indignation que si on définit de prime abord l’homme de la révolte tel que le pense Albert Camus. En effet, ce dernier voit que l’homme révolté c’est « un esclave, qui a reçu des ordres toute sa vie, juge soudain inacceptable un nouveau commandement. » (L’homme révolté, Gallimard, 1951) Tout porte à croire ici que l’homme révolté compose avec l’homme indigné, l’homme de la colère et de l’exaspération. L’indignation prépare la révolte, et la révolte prépare l’avenir. Il faut signaler que  Stéphane Hessel insiste dans son livre « Indignez-vous ! » sur le caractère pacifique et non violent de l’action. Ceci explique le propre de l’indignation : un sentiment qui émane d’une réalité vécue et qui se transforme en action visant la libération de l’homme de l’emprise infernale de l’homme. L’indignation est aussi un affrontement du pouvoir politique en vue de lui rappeler que l’homme de l’indignation est toujours à venir, car il est l’homme de la compréhension et de l’analyse des mécanismes qui orientent tout système autoritaire. L’homme de l’indignation est fidèle à ses convictions historiques. Il cultive son avenir sur la base des acquis de ses prédécesseurs. Il ne se contente pas seulement de prendre la relève, mais il veille plutôt à parfaire la manière de faire et la manière d’agir selon le temps et l’espace auxquels il appartient. « Indignez-vous ! », nous dit  Stéphane Hessel. « Indignons-nous ! », nous dit l’histoire. Sans indignation l’homme ne reviendra jamais à sa nature d’être libre, et l’être ne récupérera jamais son essence d’être digne. Dignité et liberté nécessitent une culture de l’indignation qui puisse apprendre à tout un chacun ses droits et ses devoirs, et qui puisse également nourrir le sens de la cité, de la démocratie et de la citoyenneté…


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1.Posté par dissiple de bissani le 29/04/2011 22:19
penseur en herbe,Bissani va sans doute marquer l'histoire de la pensée humaine postmoderne du ciècle en cours...

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