«Je ne sens aucune mobilisation à l’occasion du 1er Mai qui risque de passer inaperçu dans la ville d’Essaouira ; mais le climat social au niveau national est sous tension ! », nous a confié un militant syndical qui n’a pas raté l’occasion d’exprimer son indignation quant au désengagement de la majorité de la classe ouvrière. Pourtant, Essaouira n’est pas à l’abri de tensions et crises sociales dont font les frais les citoyens toutes catégories confondues. La dernière grève des transporteurs a permis d’éveiller le souci social chez l’habitant souiri qui a commencé à comprendre que cette ville calme est aussi concernée par les soubresauts de la vie syndicale. Pourtant, les petites bourses ont dû payer doublement les pots cassés de la grève des transporteurs, à cause de la flambée des prix des légumes pendant quinze jours.
Bon nombre d’ouvrières et ouvriers (30) sont licenciés sans préavis par des établissements industriels. 360 ouvrières journalières et 28 autres permanents, à titre d'exemple, continuent de traîner espoir et précarité, attendant une solution promise de leur situation sociale après la fermeture de l’usine Agouzal spécialisée en conserves de poisson. Depuis 2006, les ouvriers en question ont été mis à la porte sans toucher le moindre centime. Pire, la CNSS a cessé depuis lors de leur verser allocations familiales et assurance maladie faute de versement des cotisations par l’employeur. La majorité de ces salariés vivent actuellement une situation sociale déplorable.
«J’étais chargé de mission au niveau de l’administration de l’usine qui n’a jamais déclaré faillite ; on ne connaît même pas la vraie situation financière de cette structure industrielle qui a fait les frais d’une gestion unilatérale du patron qui n’a pas pris en considération les intérêts de plusieurs centaines d’ouvriers mis à la porte sans aucune indemnisation », affirme un ex-ouvrier permanant de cette usine dont le dossier vient d’être soumis à la commission centrale.
Après avoir refusé de se présenter devant la commission provinciale chargée de la résolution de ce dossier, le patron a convaincu les membres de cette commission présidée par le gouverneur de l’inutilité de toute démarche de réconciliation. «Je dispose d’un jugement du tribunal de première instance à Essaouira qui demande au patron de l’usine de nous verser les salaires depuis 2006 ; mais personne n’arrive à mettre en application ce jugement totalement ignoré par le patron », ajoute cet ouvrier. « La plupart des victimes sont maintenant convaincues de l’inutilité de la voie légale. On ne croit plus à l’efficacité des démarches et luttes syndicales, l’impunité et les soucis du pain quotidien ont complètement changé notre vision des choses», soutient-il.
Certes, la célébration du 1er Mai à Essaouira a connu un grand recul au niveau de la mobilisation et de la représentativité des travailleurs. Mais, du côté des acteurs syndicaux, on s'attache toujours à l'espoir d'instaurer une pratique syndicale à même de rivaliser avec les grandes villes du Royaume. " Essaouira est une petite ville, elle a été toujours maîtrisée par le Makhzen, on ne peut espérer mieux, l'essentiel c'est qu'on arrive toujours à maintenir une dynamique syndicale en dépit d'une grande réticence de la part des citoyens", confie un acteur syndical de la ville.
La fête du travail de 2009 ne sera pas du tout à l'abri des calculs et manœuvres de certains candidats aux communales du 12 juin prochain. Pour certains d’entre eux, la voix syndicale reste assez efficace pour que ces derniers puissent se positionner à l’horizon des prochaines échéances. Ce qui est sûr, c'est que le faible pouvoir d'achat des citoyens à Essaouira risque d’attiser les convoitises des corrupteurs et fraudeurs en cette occasion. Les services et infrastructures de base seront sûrement les préoccupations des syndicats lors des défilés du 1er Mai 2009 à Essaouira.