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Des myrtilles écossaises données faute de rentabilité


Libé
Dimanche 6 Novembre 2022

Des myrtilles écossaises données faute de rentabilité

En raison de la concurrence des importations à bas prix, des coûts élevés et de la pénurie de main-d'oeuvre, les myrtilles de Peter Thomson ne sont pas viables économiquement. Face à cette situation, l'agriculteur écossais a décidé de donner sa récolte à des associations.

Installé à Blairgowrie, dans le nord de l'Ecosse, Peter Thomson, qui produit chaque année 300 tonnes de myrtilles, fait ce constat amer: les producteurs au Pérou ou en Afrique du Sud peuvent vendre leur production bien moins cher au Royaume-Uni, où les bras manquent pour les ramasser.

"Leurs coûts de production sont si bas qu'on ne peut pas lutter", explique cet agriculteur installé depuis 1976.

En temps normal, 200 ouvriers devraient être là pour récolter environ 300 tonnes de myrtilles, sans compter 50 autres personnes pour le conditionnement.

La récolte aurait pu atteindre 3 millions de livres sterling (3,5 millions d'euros) voire plus, mais cette année, elle ne dépasserait pas les 2 millions.

En 2014, les producteurs écossais touchaient 17,50 livres au kilo. Aujourd'hui, les supermarchés ne paient que 7 livres.

Dans le même temps, le coût de la main-d'oeuvre est passé de 7 livres de l'heure à plus de 10 livres aujourd'hui, avant cotisations sociales et congés payés.

Les détaillants refusent de payer plus pour des produits écossais, car les consommateurs chassent les bonnes affaires sous la pression de l'inflation, explique le producteur.

Les importations à bas prix ont commencé l'année dernière, après que des pays comme le Pérou et l'Afrique du Sud ont commencé à utiliser une nouvelle variété de myrtille.

Le fruit nécessite une gelée avant de fleurir, si bien que les agriculteurs écossais avaient le marché pour eux en septembre et octobre, avec la possibilité de faire monter les prix.

Mais la nouvelle variété n'a pas besoin de geler. Elle est appréciée dans les supermarchés car les myrtilles sont plus grosses, plus fermes, et peuvent être expédiées jusqu'aux rayons britanniques sans risquer de se gâter après plusieurs semaines.

Le Brexit a également accru les coûts, et rend plus difficile de trouver des saisonniers qualifiés.

Avant la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, les caravanes de l'exploitation étaient pleines de travailleurs européens expérimentés, à même de cueillir à bon rythme. Aujourd'hui, elles sont désespérément vides.

"Le Brexit a eu pour conséquence de rendre la main-d'oeuvre plus chère", explique M. Thomson. "On a maintenant de la main-d'œuvre venant d'endroits comme le Turkménistan, le Kirghizstan ou le Népal, et elle vient de si loin qu'elle en est chère."

Alors, l'agriculteur a invité le public à remplir des seaux de myrtilles en échange d'un don à une association luttant contre le cancer. Une part est également reversée à des banques alimentaires

Les habitants des alentours ont répondu par centaines à l'invitation et arrivent munis de seaux et de cartons.

Amandla Taylor, venue cueillir des myrtilles, se dit effondrée de voir les baies pourrir au sol quand tant de gens peinent à acheter de quoi manger.

"C'est triste d'avoir à faire venir en avion des produits depuis le Pérou quand on en a sur le pas de sa porte", se désole-t-elle.

Pauline Cropper, bénévole pour organiser la cueillette sur l'exploitation, souligne que les gens ont des difficultés pour payer leurs courses et se rabattent sur les options les moins chères. "Pendant ce temps, les myrtilles restent sur les buissons et vont à la poubelle quand elles tombent, mais ce n'est pas rentable pour l'agriculteur du coin de payer un salaire correct."

Les arbustes pourraient encore donner des fruits pendant 50 ans, explique l'agriculteur, mais leur entretien est trop cher.

"C'est dévastateur pour nous, mais ça n'a pas de sens économiquement de mener ces fruits jusqu'aux magasins", déplore-t-il. "On n'a aucune perspective réaliste de gagner de l'argent, à moins que les supermarchés ne soient prêts à payer pour des myrtilles écossaises."



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