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Ces enclaves algériennes, érigées par les pantins du polisario comme bastions d’un combat séparatiste usé, se révèlent aujourd’hui pour ce qu’elles sont devenues : des incubateurs de radicalisme, des viviers pour les organisations djihadistes les plus dangereuses opérant dans la bande sahélo-saharienne. Ce tournant dramatique, longtemps redouté par les analystes, confirme l’échec cuisant de la communauté internationale à prévenir une convergence explosive entre séparatisme armé et extrémisme religieux.
L’alerte espagnole ne saurait être minimisée. Ce ne sont plus de simples individus isolés qui quittent les camps pour rejoindre les rangs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique ou de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest. Ce sont désormais des cadres opérationnels issus du polisario qui accèdent à des postes de commandement au sein de ces nébuleuses terroristes, au cœur de ce que les services européens qualifient désormais de “zone rouge planétaire”. La transformation est d’autant plus préoccupante que ces profils, souvent jeunes, parlent espagnol, connaissent les codes sociaux européens et maîtrisent les dynamiques géopolitiques de la région.
Ce qui se joue ici dépasse de loin le cadre d’un conflit régional artificiel. Le front sahélien n’est plus une ligne de fracture lointaine. Il s’est mué en champ de bataille global, où les groupes armés opèrent en toute liberté, testent leurs capacités et projettent leurs ambitions au-delà des frontières poreuses. L’arc de déstabilisation va désormais du bassin tchadien aux rives de l’Atlantique, en passant par la Mauritanie, le Mali, le Niger et le sud algérien. Et dans ce paysage fracturé, les anciens enfants des camps de Tindouf apparaissent comme les nouveaux visages d’un djihadisme régionalisé mais aux velléités transcontinentales.
Ce que révèle également ce rapport espagnol, c’est la profondeur de la faillite du modèle algérien de gestion des camps. Depuis cinq décennies, ces zones échappent à tout contrôle international. L’Algérie refuse catégoriquement tout recensement des populations, empêche l’accès à des observateurs indépendants, et laisse le polisario gérer les lieux avec une main de fer et une opacité absolue. Ce vide administratif, institutionnel et humanitaire a généré un terreau fertile à toutes les dérives. L’absence d’espoir, la marginalisation, l’endoctrinement idéologique ont ouvert la voie à une radicalisation systémique, méthodique, irriguée par des réseaux djihadistes toujours plus structurés.
L’analyse de la situation sahélienne actuelle ne peut faire l’économie d’un constat lucide : les camps de Tindouf ne sont plus seulement des enjeux humanitaires ou politiques. Ils sont devenus des éléments constitutifs de l’instabilité régionale. Ils génèrent une main-d’œuvre idéologique au service d’agendas violents et transnationaux. Le passage du séparatisme au djihadisme n’est plus une exception, mais une tendance, encouragée par la porosité des frontières, la faiblesse des Etats dans la bande sahélienne et le cynisme d’un parrain régional qui se lave les mains des conséquences.
L’Espagne, aujourd’hui en première ligne, ne peut plus se permettre la myopie stratégique dont elle a longtemps fait preuve. Madrid réalise brutalement que les ramifications du chaos sahélien peuvent frapper au cœur même de l’Europe. Les deux individus récemment arrêtés au Pays basque, en lien familial avec des figures du polisario et soupçonnés de propagande terroriste, ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Derrière ces faits se profile une réalité bien plus inquiétante : la possibilité d’une infiltration lente mais efficace des idéologies extrémistes dans le tissu social européen, via des canaux culturels, linguistiques ou communautaires.
Ce basculement impose une refonte radicale des paradigmes sécuritaires européens. Il ne s’agit plus simplement de contenir la menace, mais de la neutraliser à sa source. Et cette source, de plus en plus, se localise au sud du Maghreb. Face à cela, le Maroc apparaît comme un partenaire incontournable. Non seulement en raison de sa proximité géographique, mais surtout grâce à l’efficacité prouvée de son appareil sécuritaire, à la densité de son maillage humain dans la région, et à sa capacité à infiltrer les réseaux terroristes par des méthodes éprouvées. La coopération avec Rabat n’est plus un choix diplomatique à géométrie variable. Elle est un impératif stratégique pour l’Europe.
Car ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la stabilité du Sahel ou la lutte contre quelques groupuscules égarés. C’est l’architecture même de la sécurité méditerranéenne qui vacille. L’effondrement des Etats du Sahel, l’émergence de nouvelles formes d’alliances hybrides entre trafiquants, insurgés, et djihadistes, la militarisation croissante de la bande sahélienne, et l’effet domino sur les migrations et les flux illégaux représentent une menace systémique. Et cette menace prend aujourd’hui une teinte hispanophone, avec des ramifications directes vers l’Europe occidentale.
Loin d’être une simple mise en garde, le rapport des services de renseignement espagnols sonne comme une déclaration d’urgence. L’Europe est désormais à portée de souffle du djihadisme sahélien. Et à l’origine de cette nouvelle réalité, il y a un acteur que l’on a trop longtemps traité comme un interlocuteur légitime.
Il est temps d’exiger des comptes à l’Algérie, dont la politique d’hébergement aveugle du polisario a permis à ces dérives de proliférer. La communauté internationale, et en premier lieu l’Europe, doit imposer la transparence dans les camps de Tindouf, réclamer un recensement immédiat des populations, mettre fin au régime d’exception qui y prévaut, et sanctionner tout soutien – même tacite – aux réseaux extrémistes.
Mehdi Ouassat