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D’Aït Benhaddou à Targa en passant par un chapelet d’autres constructions en terre

Les ksours en quête d’une nouvelle vie


A. Saâïdi
Samedi 17 Janvier 2009

D’Aït Benhaddou à Targa en passant par un chapelet d’autres constructions en terre
Des oasis du Haut Atlas à celles du Tafilalet en passant par tous les hauts lieux du Sud marocain, les ksours produisent une espèce de fascination. De la séduction exercée sur le simple visiteur à l’intérêt passionné du chercheur, certains d’entre eux surprennent par la qualité de leur bâti et, parfois, de la vie qui les anime.
De ksar Meski, niché sur la falaise de la hamada du même nom, aux ksours Haroun, El Fida, Oulad Adbelhelim, Maâdid, Targa, Amerdil, Tifoultoute, Taourirt, Tamdaghte ou Aït Benhaddou,  leur beauté indicible fait qu’ils méritent non seulement la plus pointilleuse des attentions, mais aussi une sollicitude constante et à toute épreuve.
Ce n’est certes un secret pour personne que, dans leur écrasante majorité, ils sont dans un état de délabrement inquiétant.
Constructions en terre porteuses de sens en matière d’organisation des espaces de vie, patrimoines architecturaux d’une valeur inestimable, lieux de mémoire, … ces monuments historiques qui font la synthèse entre la maison individuelle et la ville, pourraient, si l’on n’y prend pas garde, disparaître dans l’indifférence générale.
Ce qui sonnera le tocsin de certaines techniques de construction ancestrales, de savoir-faire et de modes d’organisation communautaire traditionnels; voire d’un pan important de la mémoire collective qui constitue le pilier de la vie en société dans les oasis du Sud du Royaume. D’où l’importance que les pouvoirs publics, les ONG et les médias devraient accorder à toute initiative, fût-elle minime, visant à remettre en l’état ces beaux bâtiments menacés non seulement par l’agression des éléments, mais aussi par les mutations sociales, culturelles et économiques des dernières décennies ainsi que par les nouvelles exigences qui en ont découlé en matière de confort, de sécurité et d’organisation familiale et sociale.
Fruit d’une volonté politique, la restauration à grands frais de deux d’entre eux, les ksours  Targa d’Errachidia et Aït Benhaddou d’Ouarzazate, témoignent de la sollicitude particulière qui est parfois accordée à la question de la réhabilitation du patrimoine national.
Ksar Targa est, faut-il le rappeler, un monument historique marquant. Sa fondation remonte au quinzième siècle, en des temps où les rivalités tribales débouchaient souvent sur des affrontements meurtriers.
Son emplacement sur une sorte de «promontoire» surplombant l’Oued Ziz lui permettait le contrôle de la route reliant Fès à Sijilmassa ; passage obligé et axe commercial incontournable entre le Maroc et l’Afrique sub-saharienne. Le ksar servait aussi à contrôler la source de toute vie en région aride ; en l’occurrence l’eau d’un petit barrage appelé Séguia Hajia. D’où son nom Targa qui signifie en Tachelhit « séguia » ou rigole. Si sa haute silhouette de couleur ocre est intimement intégrée au paysage, sur ses façades, le soleil joue à sculpter de nouvelles formes et à projeter les jeux d’ombres qui en accentuent les contours et irisent les couleurs. Son enceinte qui donne sur l’Oued est animée par différents volumes, alors que ses autres côtés sont constitués de simples murailles rectilignes percées, par endroits, de petites fenêtres ou de portes de construction récente. Le ksar est entièrement construit en terre banchée ou en pisé sur un sol rocheux. Ce qui en fait, selon l’un des architectes responsables du projet, «une construction en harmonie avec l’environnement naturel qui peut accueillir avec sérénité les caprices du climat et le défi de la topographie ». Une construction qui, à l’instar de toutes celles faites de terre, exige d’être constamment restaurée mais qui en diffère par sa capacité de vivre en interaction constante avec l’évolution de la société et des mœurs. A preuve, seules peu de familles originaires continuent à y résider. Les autres proviennent de Rissani ou du Tafilalet.
Ksar Targa ne sert, en effet, que de lieu de transit à leur quête permanente de travail et de vie en ville. Ce qui n’est nullement le cas pour Ksar Aït Benhaddou qui n’est plus qu’un simple décor pour des touristes fortunés ou des cinéastes en rupture de ban. Ce site historique situé au cœur d’un oasis à 30 km d’Ouarzazate, constitue un lieu exceptionnel qui exerce une grande fascination aussi bien sur les grands producteurs cinématographiques que sur de simples touristes.
Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, ce village renforcé, agrémenté de tours découpées, est considéré à juste titre comme l’un des plus beaux du pays. Une vingtaine de films y furent tournés, de “Lawrence d’Arabie” à “Jésus de Nazareth”. C’est d’ailleurs pour cette dernière production qu’une bonne partie du village fut reconstruite.
En arrivant sur les lieux, on ne peut qu’être frappé par la splendeur de cette forteresse qui s’étale sur une colline dominant la région. Une véritable ville musée.  Ksar Aït Benhaddou qui attire plus de 100.000 touristes par an, malgré l’insuffisance des infrastructures pour l’accueil, dans les meilleures conditions, des visiteurs révèle l’intelligence des traditions de la construction qui ont traversé les millénaires.
Eternité, beauté et vieillesse, ce ksar atteste de ce contraste  qu’il assume avec fierté en tant que patrimoine architectural et héritage si cher de gens du Sud.  Pour le bâtir, il a fallu des tonnes de pisé et des centaines de stères de  bois. Il a aussi fallu du temps et beaucoup de sueur. Il en faut toujours autant pour le maintenir en l’état.


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