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Violence à l’égard des femmes et harcèlement sexuel : Une loi sonne le glas de l’impunité


Chady Chaabi
Vendredi 14 Septembre 2018

Question de timing, on ne pouvait faire mieux. Alors que plusieurs affaires d’agressions sexuelles défrayent la chronique, la loi 103-13 relative à la lutte contre les violences à l’égard des femmes, publiée il y a six mois au Bulletin officiel (n° 6655 du 12 mars 2018), est entrée en vigueur le 12 septembre.
Malgré les nombreuses garanties qu’elle apporte d’un côté, notamment au niveau de la protection des victimes d’agressions sexuelles, ainsi qu’une définition des violences faites aux femmes comme «tout acte basé sur la discrimination fondée sur le genre, qui soit de nature à causer un dommage physique, psychologique, sexuel ou économique à une femme», de l’autre, ladite loi fait l’objet de plusieurs critiques émises par les associations des droits des femmes.
Outre le sentiment d’avoir été mis à l’écart lors de l’élaboration de la loi dite "Loi Hakkaoui", car portée par la ministre de la Famille, de la Solidarité, de l’Egalité et du Développement social, sont également pointés du doigt par les associations, l’absence de pénalisation du viol conjugal ou encore le manque de précision ayant trait à certaines dispositions, comme dans le cas du mariage, sanctionné mais uniquement en cas d’utilisation de violences ou de menaces.
Tour d’horizon sur les principales dispositions de la loi 103-13.

Le harcèlement
Concernant ce qui est sans aucun doute l’une des plus outrageantes manifestations de la violence à l’encontre des femmes, la loi prévoit de sanctionner sévèrement le harcèlement de rue par une peine d’emprisonnement d’un à six mois et une amende pouvant aller de de 2.000 à 10.000 DH. Ainsi, la loi stipule qu’il «est considéré comme coupable de harcèlement quiconque persiste à gêner autrui dans des lieux publics ou autres, moyennant des agissements, propos, gestes à caractère sexuel. Le harcèlement peut également se faire via correspondances écrites, téléphoniques ou électroniques, des photos et/ou des enregistrements à caractère sexuel».
Dans la sphère professionnelle, la sévérité est plus prononcée en cas de harcèlement, puisque les sanctions sont doublées, soit un risque d’emprisonnement entre 3 et 5 ans et une amende de 5.000 à 50.000 DH s’il s’avère que l’auteur du harcèlement est un ascendant, un mahram (personne qu’il est interdit d’épouser), un kafil, tuteur légal ou si la victime est mineure.

Le mariage forcé
Sujet de discorde, le mariage forcé est désormais lui aussi encadré et puni par la loi 103-13 qui prévoit de sanctionner de «six mois à un an d’emprisonnement et de 10.000 à 30.000 DH d’amende, toute personne qui, usant de violence ou de menace, contraint une autre personne à l’épouser». Des sanctions doublées dans le cas où les contraintes décrites seraient exercées sur une femme ou une mineure. Pour le coup, on est dans l’euphémisme. Difficile d’imaginer une femme forcer un homme à lui passer la bague au doigt. Par contre, les inquiétudes concernent la disposition qui dit que les poursuites ne pourront être engagées que sur plainte de la victime. Alors qu’en réalité, le courage de dénoncer un abus sexuel est souvent annihilé à la fois par notre société qui préfère souvent méconnaître ce problème, en atténuer la gravité, voire le nier totalement et pis, par le sentiment de culpabilité ressenti par la victime. Dans son for intérieur, sans même le dire ouvertement, elle pense : Est-ce que ce n'était pas un peu de ma faute ? Est-ce que je n'aurais pas pu l'éviter ? Est-ce que, étant dans ma situation, quelqu'un d'autre aurait réussi à résister, à se débattre, à s'enfuir?

Injonctions restrictives
Enfin, la loi édicte le cas où les injonctions restrictives peuvent être émises. En effet, ces injections dont l’objectif est d’interdire à une personne accusée de violences de contacter, d’approcher ou de communiquer avec la victime, ne peuvent être appliquées que dans le cadre de poursuites pénales ou après une condamnation pénale. Mais là où le bât blesse, c’est que ces injonctions peuvent être levées s’il y a réconciliation des époux. De fait, on se doute bien que la pression sur les femmes s’accentuera afin de renoncer aux plaintes. Encore une zone d’ombre que la loi 103-13 n’a pas réussi à éclairer.       


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