En effet, pendant cette longue séquence électorale, plusieurs événements majeurs secouent la planète. Pour rester dans les variantes de l’exercice démocratique, on peut citer deux scrutins importants: les élections pour le Parlement européen et les présidentielles iraniennes. Moins médiatisés et néanmoins décisifs pour leurs régions, d’autres événements méritent d’être soulignés. Je citerai à titre d’exemple, la recrudescence du terrorisme contre les forces de l’ordre en Algérie et les événements qui se sont déroulés au Yémen.
D’une élection, l’autre. Les Marocains ont voté, les Européens et les Iraniens aussi. Les exercices se répètent et ne se ressemblent pas. Les enjeux aussi. En Europe, grande déception du côté des forces de gauche. La grande crise qui a secoué le capitalisme ces derniers mois n’a pas eu de grandes conséquences sur le comportement électoral des citoyens européens. Les grandes alliances de droite ont été réconfortées. La colère des masses populaires s’est peut-être exprimée à travers le taux élevé d’abstention. La social-démocratie est sortie vaincue de ce nouveau round électoral, incapable de proposer ni dans le fond ni dans la forme, une alternative au programme de la droite. Le courant écologiste a marqué des points du fait même de ce repli de la gauche traditionnelle. En Iran, le pays s’est réveillé non pas sur un bilan politique du scrutin mais sur sa remise en question. L’Iran qui avait forgé un modèle de consultation légitimé par l’adhésion populaire s’est retrouvé dans une situation de crise de légitimité démocratique. Au-delà du débat sur les résultats eux-mêmes, cette crise de légitimité est la plus grande défaite des Mollahs qui président au destin du pays depuis la “révolution” de 1979. Une défaite idéologique et culturelle qui ébranle un projet politique d’inspiration religieuse bien au-delà du seul cas de figure iranien. C’est la portée stratégique de la crise iranienne actuelle. Les amis d’Ahmadinadjad vont certainement remporter cet épisode. Mais ce sera une victoire au coût politique et “moral” énorme.
N’oublions pas que les Mollahs construisent leur démarche politique non pas sur la base d’un programme économique et social original; leur programme reste d’inspiration capitaliste et libéral mais sur la base d’un discours moralisateur et idéologique. Avec la contestation actuelle qui pointe du doigt les fraudes ayant entaché le scrutin présidentiel, tout un pan de l’édifice idéologique des Mollahs vient de s’effondrer. Au pays de la morale pure et du dogme religieux, la triche est devenue un moyen de perpétuer le pouvoir. Du coup, le régime se banalise et devient un système comme un autre appelé à changer. L’Iran, pays d’une civilisation raffinée, millénaire traverse une période nouvelle de son évolution vers la démocratie. En 1979, les grandes mobilisations autour de Khomeiney avaient séduit et fasciné. Trente ans après, c’est une nouvelle génération qui reprend la rue, s’empare des gadgets de la communication moderne (téléphone portable, twitter, facebook…) pour renvoyer au monde, les images d’un autre Iran; celui confiné dans l’obscurité par un discours hypocrite et opportuniste.