Luca de Meo, le pari gagnant de la "Renaulution"


Libé
Lundi 16 Juin 2025

Le patron du constructeur automobile français Renault, Luca de Meo, dont le groupe a annoncé dimanche le départ surprise après cinq ans de gouvernance, a mené la "Renaulution", accélérant l'électrification du constructeur automobile au losange et sa montée en gamme, pour lui permettre d'accéder à une rentabilité record.
M. de Meo est décrit comme impatient, jusqu'à en être pénible quand il a une idée en tête
Cet Italien francophone a pris le volant de Renault en 2020: excellent communicant, expert en marketing, le nouveau directeur général est arrivé dans une entreprise traumatisée par plus d'un an de crise dans le sillage de l'affaire Carlos Ghosn, entre ventes en chute et cadres dépités qui claquaient la porte.

Un chantier encore inachevé dans son ambitieuse stratégie de relance: le rééquilibrage de la relation entre Renault et son partenaire japonais Nissan.
Luca de Meo n'a rien d'un dictateur. Il a énormément d'éducation, c'est un manager qui ne hurle pas, disait de lui un ancien collaborateur de Seat 
M. De Meo, 58 ans, a démarré sa carrière chez Renault. Ce quinquagénaire souriant, vêtu de costumes élégants, à la chevelure grisonnante bien rangée, a "un sens inné du marketing", affirme un ancien cadre du groupe qui l'a côtoyé dans les années 1990.
Il est ensuite passé à la direction de Fiat, où il a relancé avec succès la petite 500, avant de redynamiser Seat pour le groupe allemand Volkswagen.

Gageure qu'il a tenté de rééditer chez Renault à partir de 2024 avec les Renault 4 et 5 en version électrique. Ces deux modèles devaient porter la "Renaulution", nom de son plan pour relancer la marque au losange, fondée en 1898.

Un pari plutôt réussi, puisque cette nouvelle gamme de voitures et la réduction des coûts ont permis au constructeur de dégager une rentabilité record en 2024 et de résister dans un secteur automobile au ralenti.
 
Ce plan stratégique, qui s'achève cette année, devait laisser place à un nouveau chapitre, "Futurama", selon M. de Meo, qui souhaitait que Renault réinvestisse l'argent gagné ces dernières années, notamment dans l'innovation technologique.

Principal caillou dans la chaussure de Renault, les difficultés de son partenaire japonais Nissan : les deux constructeurs ont déjà considérablement assoupli leur alliance, dont le périmètre avait été limité en 2023, annonçant fin mars un accord pour pouvoir descendre à 10% du capital de l'autre au lieu de 15% actuellement.

"Il n'a rien d'un dictateur. Il a énormément d'éducation, c'est un manager qui ne hurle pas", disait de lui un ancien collaborateur de Seat, à sa nomination en 2020. "Il a un côté charmeur mais en même temps il sait garder ses distances".

Il a "un côté artiste" tout en travaillant ses sujets de façon "quasi scientifique", ajoutait ce cadre, sous couvert d'anonymat.
M. de Meo est décrit comme impatient, jusqu'à en être pénible quand il a une idée en tête. "C'est son principal défaut", reconnaît un collaborateur.

Sous sa direction, Renault a connu un marché automobile mouvementé, touché par les pénuries de puces électroniques, puis par la guerre en Ukraine. Le groupe a dû se séparer de sa filiale russe Lada, et ses chiffres de ventes ont plongé, malgré les excellents résultats de sa marque à bas coût Dacia, avant de redresser la barre.

Et le constructeur a réussi à améliorer ses marges en vendant ses voitures plus cher.
Renault s'est également relancé dans les voitures de luxe en donnant de l'ampleur à sa marque Alpine, à présent connue mondialement via son écurie de Formule 1.

En parallèle, le groupe a limité les investissements dans les motorisations thermiques et hybrides, en lançant la coentreprise Horse avec le géant automobile Geely pour produire et vendre des moteurs pour ce type de voitures.

Les investisseurs ont salué cette stratégie: l'action Renault à la Bourse de Paris s'est en partie relevée de sa descente aux enfers entamée en 2018.
Fils d'un banquier d'affaires, Luca de Meo a vécu dans 12 pays, passant une partie de son enfance au Brésil, en Côte d'Ivoire et au Nigeria.

Francophone quasi parfait, il a été scolarisé en français jusqu'à 14 ans mais a conservé un accent italien. Marié, il est père de jumeaux aujourd'hui adultes.


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