Le reporting Intégré : Un passage obligé


Par Jalil Liassimi
Samedi 12 Août 2017

Si une entreprise désire rester connectée avec ses investisseurs via un lien communicatif concis, qui rassemble données financières et extra-financières et permettre à l’ensemble des shareholders de situer leur entreprise vis-à-vis de son environnement caractérisé par sa volatilité, le passage via un Reporting intégré (RI) s’avère inéluctable. Le rapport intégré intéresse vivement les grands cabinets d’audit,  les communautés d’experts-comptables, les fédérations d’administrateurs,  les responsables RSE, actionnaires, voire l’opinion professionnelle mondiale. Ce nouveau mode de reporting est devenu obligatoire dans certains pays anglophones et est en vogue en Hexagone surtout avec l’avènement de la loi Grenelle 2.

Communiquer la création
de valeur

C’est une pratique courante en Afrique du Sud. D’ailleurs, c’est le pays précurseur dans ce genre de reporting depuis 2009. Le RI est devenu obligatoire selon le Code de gouvernance King III pour les entreprises désirant être cotées à la Bourse de Johannesburg, c’est même pratique pour la cotation au Brésil. Concernant l’Europe, plusieurs pays ont fait un pas en avant à l’instar de  l’Angleterre dont 10% des entreprises du Financial Times Stock exchange FTSE 100 Index publient un reporting intégré, les Pays-Bas suivent avec 6 entreprises.
Cette émergence de ce nouveau mode de reporting résulte de plusieurs constats et réflexions de nombreuses coalitions mondiales, à savoir les investisseurs, les représentants de la profession comptable et d’audit, les instances de normalisation pour se soustraire à une communication traditionnelle (rapports de gestion, comptes annuels audités) où les informations sont jargonneuses, volumineuses et axées sur des données chiffrées dépassées; dont les priorités sont les aspects financiers. L’horizon temporel vise  le court terme vers une communication  concise qui ouvre les parenthèses sur la gouvernance, la stratégie, les résultats et les perspectives, et l’environnement de l’entreprise pour créer de la valeur sur le moyen et le long termes.
Pour saisir la portée du reporting intégré, on devrait mettre en exergue le lien entre la valeur actionnariale (shareholders value) et la valeur partenariale (stakeholders value), deux valeurs intimement liées. On peut jamais concevoir une maximisation des dividendes avec une  clientèle insatisfaite ; des associations à vocation sociale et sociétale alimentées contre vous et des fournisseurs qui enfreignent les lois. Par conséquent,  l’existence d’un rapport qui homogénéise ces variables en mettant le doigt sur la gouvernance qui devrait chapeauter  la création de valeurs à travers la compétence, la motivation et la diversité des collaborateurs , surveiller la culture d’entreprise, l’éthique et la valeur de l’organisation dans ses rapports avec les parties prenantes, outre le fait de les écouter et formaliser surtout leurs remarques et constats s’avère essentielle. Le reporting intégré, l’ADN du reporting RSE  et financier   ?
Il ne s’agit pas de plagier les informations financières et extrafinancières pour les diffuser aux investisseurs. Il s’agit plutôt de dénoter l’importance des enjeux sociaux environnementaux et de gouvernance, trois volets qui deviendront des éléments créateurs de valeurs  alors qu’ils étaient auparavant classés sous forme de programmes accessoires pour que l’entreprise garde une bonne notoriété socio-écologique.
Prise en considération de l’écosystème et du business model dans les RI
L’écosystème dans son intégralité ( pénurie de ressources, conjoncture économique, progrès technologique, nouveaux arrivants, défis sociaux et sociétaux, réglementation vis-à-vis de l’extérieur et de l’intérieur de l’entreprise) devrait être analysé pour identifier les risques et les opportunités eu égard à la stratégie et au business model et décrypter tous les facteurs ayant une incidence sur la capacité de production de l’entreprise de façon directe ou indirecte (influence des capitaux que l’entreprise utilise).
Le business model n’a pas été mis à l’écart qu’il soit pour l’entreprise disposant d’un seul ou plusieurs B.M, le reporting doit s’interroger sur les ressources, les principales activités et réalisations, l’impact du business model et ses résultats internes et externes, positifs ou négatifs.

Préparation du
reporting intégré

Le rapport intégré devrait être préparé en conformité avec le cadre de référence  de l’IIRC (International Integrated Reporting Council) qui n’oblige pas l’entreprise à communiquer une information particulière ou à utiliser des indicateurs précis. Le but du cadre de référence est d’identifier les informations devrant figurer sur le RI pour apprécier la création de valeur par l’organisation. Le cadre de référence n’est pas une norme; c’est à chaque entreprise de s'approprier ce rapport.
Le reporting intégré tire sa force de ‘’l’Integrated Thinking’’ la gestion intégrée ;  les six différents types de capitaux comme catalyseur pour la création de valeur au fil du temps à travers l’implication de l’écosystème  (exemple : autorités de réglementations, ONG, personnel, clients, fournisseur) dans la création de valeur.

Le statu quo du reporting
intégré au Maroc

En ce qui concerne le Maroc,  le reporting intégré   suscite beaucoup d’interrogations et n’arrive pas à séduire une grande majorité de mastodontes, peut-être à cause du coût élevé, par méconnaissance ou par confusion du reporting intégré avec le reporting RSE. Pourtant, le sujet était supposé faire couler beaucoup d’encre auprès des communautés professionnelles et académiques des sciences de gestion et de l’Etat à travers sa réglementation, après le discours Royal du 30 juillet 2014, et l’engagement du Royaume dans la Charte nationale de l’environnement et du développement durable et dernièrement à travers l’organisation de la COP22.
Seul un nombre limité a mis la main à la pâte mais uniquement via la disposition des reportings dans les normes GRI à l’instar de l’OCP, MANAGEM … Mais pour les reportings  intégrés selon le cadre de référence de l’IIRC,  tous les acteurs ont du pain sur la planche  (ministère  de l'Energie, des Mines et du Développement durable , Ordre des experts-comptables, IIA Maroc, CGEM, UNAM …).


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