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Harcèlement sexuel: des Libanaises se rebiffent


AFP
Mardi 20 Avril 2010

Doha appréhende de prendre des taxis: cette femme de 23 ans a été trois fois victime de chauffeurs exhibitionnistes.
Mais elle peut enfin espérer qu'un campagne "anti-harcèlement" au Liban marquera le début de la fin d'un phénomène en augmentation dans un pays encore machiste.
Dans un pays considéré comme l'une des plus "occidentalisés" du monde arabe, aucune loi ne prévoit de sanctions pour des remarques ou des gestes obscènes et parfois des attouchements dont sont victimes de nombreuses femmes au quotidien dans la rue, les transports et le lieu de travail.
Un groupe de féministes a décidé de lancer une campagne "anti-harcèlement" pour sensibiliser l'opinion publique à ce problème qui, pour beaucoup, n'en est pas un, sous prétexte qu'il fait partie de la "culture" du pays.
"Ce phénomène est en augmentation", assure Leen Hachem, coordinatrice de la campagne soutenue par IndyAct, une ONG basée à Beyrouth.
Parmi les rares statistiques sur le sujet, une étude réalisée par le ministère des Affaires sociales en 2007 révèle que trois plaintes pour harcèlement et viol sont déposées par semaine, des chiffres qui sont loin de refléter la réalité, selon les militantes.
Pour de nombreuses victimes du harcèlement masculin, la question reste taboue, explique Mme Hachem. "Notre slogan est +parles-en, n'en rougis pas+".
"Les filles n'osent pas en parler car la société libanaise est encore machiste et rejette systématiquement la faute sur la femme", souligne Raghida Ghamlouch, assistante sociale à l'Association de lutte contre les violences faites aux femmes.
"On lui dit : c'est de ta faute si tu es montée dans un taxi collectif, si tu es habillée de cette manière, si tu es rentrée tard, etc. ", souligne-t-elle.
"S'il s'agit d'une femme adulte, c'est pire: c'est elle qui a délibérément provoqué l'homme".
Dans un vidéoclip conçu pour la campagne sous forme de dessins animés, l'employée Salwa est convoquée par son patron qui, vautré sur un fauteuil, cigare à la main, lui annonce avec un être sournois qu'elle a été promue.
Enthousiasmée, elle s'approche de lui mais il tente de l'embrasser.
Rouge de colère, elle lui assène un coup avec son sac à main avant de repartir en claquant la porte.
"Notre message n'est pas violent mais vise à encourager les femmes à se défendre, à ne pas craindre l'opprobre social et à porter plainte", assure Mme Hachem.
Non seulement la loi ne prévoit aucune clause qui considère expressément le harcèlement comme un délit, mais aussi, les femmes ne peuvent recourir à aucune autorité.
"Au commissariat, on se moque généralement des femmes qui viennent porter plainte pour harcèlement ou pour violence domestique", souligne la militante.
"Elles préfèrent donc se résigner car elles se considèrent victimes quoi qu'elles fassent", dit Mme Ghamlouch.
Pour elle, les autorités n'ont pas encore compris qu'il y a des filles "qui restent marquées à vie et qui nécessitent parfois un soutien psychologique pour surmonter ce traumatisme".
C'est le cas de Joy qui tremble encore en se souvenant de ce jour où, adolescente, un conducteur a touché ses parties intimes.
"J'ai crié et pleuré mais il n'a pas arrêté. J'ai dû me jeter de la voiture", se souvient-elle.
"Je me suis sentie blessée et trahie. Ceux qui harcèlent doivent aller en prison", dit cette jeune fille de 18 ans.
"Si les plaintes augmentent, les autorités se rendraient comptent qu'il s'agit d'un vrai problème", assure Mme Hachem.
Pour le moment, le changement des lois injustes envers les femmes reste improbable et celles-ci sont nombreuses, frôlant parfois l'absurdité: un violeur au Liban peut toujours s'en sortir s'il épouse sa victime.


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