Beaucoup d’opérateurs ont fait les frais de la crise : Le tourisme informel bat son plein à Essaouira


Abdelali Khallad
Jeudi 10 Mai 2012

La ville des alizés qui a misé sur le tourisme comme locomotive de son processus de désenclavement et de relance économique, commence à ressentir l’impact de la crise économique dans la zone euro. Bon nombre d’opérateurs ont mis la clé sous le paillasson suite à une saison ratée et à une conjoncture difficile. Ce marasme n’a pas inspiré les décideurs qui sont censés prendre des mesures pour venir à la rescousse de ce secteur important de l’économie marocaine.
Certes, Essaouira  a toujours été une zone de transit pour les touristes dont le taux de séjour  ne dépasse pas 2 à 3 nuitées. Elle a ainsi toujours dépendu des destinations émettrices, Marrakech principalement, qui subissent à leur tour les retombées  de la crise économique, mais ses problèmes ne se limitent  pas à l’aspect conjoncturel, puisqu’elle est appelée, plus que jamais,   à lutter contre le tourisme informel qui ne cesse de prendre de l’ampleur au centre-ville et les environs.
« On est soumis à des contrôles très rigides de qualité et de sécurité ; on paye nos impôts d’une manière régulière ; on assure des charges mensuelles comme on subit les retombées de la conjoncture qui n’est pas du tout bonne. Tout ce que nous demandons en retour, c’est que nos intérêts ainsi que ceux des centaines d’employés et de fournisseurs soient protégés. Les services compétents ne font rien pour lutter contre le tourisme informel qui se propage d’une manière alarmante à Essaouira. Ici, on est si tolérant avec ceux qui opèrent  clandestinement à tel point qu’on leur accorde ce qu’on refuse à ceux qui travaillent d’une manière légale», s’indignent plusieurs opérateurs touristiques lors d’une rencontre avec «  Libé ».
Effectivement, et comme nous l’avons soulevé à plusieurs reprises, Essaouira est devenue l’eldorado du tourisme informel. Plusieurs dizaines de riads et maisons d’hôtes ont été achetés, aménagés et gérés clandestinement par des acquéreurs qui se contentent seulement d’organiser l’arrivée et le départ de leurs clients qui payent leurs séjours en devises sur des comptes à l’étranger. Dans les maisons d’hôtes en question, vous trouverez seulement une femme de ménage qui s’occupe de l’accueil et du confort des clients en toute discrétion !
Au cœur de l’ancienne médina, on est confrontés à une activité qui rapporte beaucoup à cette catégorie d’investisseurs qui exploitent l’espace, l’histoire, l’environnement, les infrastructures et les services de base sans rien payer en retour à la ville et à l’Etat.
«Il y a une grande complicité entre certains responsables et ces investisseurs qui usent de viles méthodes pour faire tourner leurs affaires. On ne peut pas cacher le soleil avec le petit doigt, il y  a des gens corrompus qui tolèrent et ferment les yeux sur les violations des lois au quotidien», affirme le propriétaire d’un hôtel à l’ancienne médina.
Malheureusement, il n’y a pas que  l’informel géré sans autorisation, il y a aussi  des établissements autorisés, mais qui se permettent d’ajouter certaines activités illégales.
De simples restaurants transformés en dancings, des bars ouverts sans autorisation depuis plusieurs années au cœur même des quartiers populaires, entre autres. Bref, quand on tolère l’informel, on a les réglo qui basculent dans le clandestin !
La question des impôts se trouve aujourd’hui au cœur de cette problématique, car l’Etat y perd énormément au niveau local et national, sans oublier bien sûr son impact sur le climat des affaires et du commerce.
De ce fait, les autorités locales et les élus ainsi que le ministère de tutelle doivent agir à même de juguler cette hémorragie qui risque de ruiner tous les efforts déployés depuis plusieurs années à Essaouira qui s’est toujours efforcée de préserver ses  merveilles naturelles, culturelles et urbanistiques.


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