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Après deux tables rondes organisées dans le cadre de ce projet d’étude et d’enquête sur l’impact de la corruption sur les femmes, la première à Rabat le 11 mai 2017 et la deuxième à Fès le 17 juin 2017 et un séminaire à Rabat en juillet dernier, un autre séminaire vient d’être organisé à Casablanca. Consacré au thème « Secteur privé et lutte contre la corruption basée sur le genre », il a été tenu ce mardi en collaboration avec le CGEM et ses travaux ont été modérés par Rachid Filali Meknassi, ancien président de TM.
Dans ce cadre, Michèle Zirari, juriste et secrétaire général adjointe de TM, a traité de la corruption sexuelle dans la législation pénale marocaine. Laquelle a été définie par elle comme étant « le fait pour une personne de conditionner un acte de ses fonctions à l'octroi d'une contrepartie ».
Elle a ainsi énuméré plusieurs articles du Code pénal qui prévoient des sanctions à l’égard des formes de corruption telles que les articles de 248 à 250 concernant la corruption et le trafic d’influence, ou l’article 538 disposant que «quiconque au moyen de la menace, écrite ou verbale, de révélations ou d'imputations diffamatoires, extorque soit la remise de fonds ou valeurs, soit la signature ou remise des écrits prévus à l'article précédent, est coupable de chantage et puni de l'emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 200 à 2.000 dirhams ».
Elle a cité également l’article 503-1 relatif au harcèlement sexuel. Cet article ajouté en 2004 par le législateur prévoit l'emprisonnement d'un an à deux ans et d'une amende de 5000 à 50.000 DH pour chaque personne «en abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, harcèle autrui en usant d'ordres, de menaces, de contraintes ou de tout autre moyen, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle ». Mais la question sur laquelle l’intervenante s’est focalisée est la suivante : cet article apporte-t-il une solution à la problématique de la corruption sexuelle ? Selon cette juriste, les principaux problèmes ne sont pas liés aux lois, mais résident dans deux choses. La première, c’est l’absence de structures pour recevoir les plaintes et la deuxième a trait à la crainte des représailles et de la stigmatisation, car « tout ce qui a trait au sexe reste tabou dans la société marocaine ».
Amina Sougrati, présidente de l’Union des femmes juges au Maroc a, pour sa part, abordé la problématique de l’extorsion sexuelle entre le texte juridique et la jurisprudence et mis en exergue l’absence d’un texte juridique pénalisant celle-ci.
A cet égard, elle a rappelé le scandale sexuel provoqué par un professeur de la Faculté des sciences accusé d’avoir abusé de sa position pour imposer des relations sexuelles à des étudiantes en contrepartie de bonnes notes. Selon l’intervenante, plusieurs articles ont été avancés par le Parquet pour qualifier son crime. Il y a tout d’abord l’article 485 du Code pénal concernant tout attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violences contre des personnes de l'un ou de l'autre sexe, de l’article 487 dudit Code relatif aux crimes commis par les « ascendants de la personne sur laquelle a été commis l'attentat, etc. ou de l’article 503-1.
Amina Sougrati a également rappelé que la justice n’a retenu en fin de compte que ce dernier article concernant le harcèlement sexuel, ce qui est, selon elle, tout à fait logique en l’absence d’un texte juridique ou d’un article pénalisant ce genre de crime. «L’extorsion sexuelle, a-t-elle expliqué, n’a rien à voir avec le harcèlement sexuel. Pour cela, elle croit que le temps est venu d’élaborer une loi concernant ce phénomène ».
Amina Figuigui, vice-présidente de la commission éthique et gouvernance de la CGEM a, quant à elle, mis en valeur le rôle du secteur privé dans la lutte contre les discriminations basées sur le genre et la prévention de la corruption sexuelle.
Selon elle, cette commission a pour mission de promouvoir la culture de la bonne gouvernance et de l’éthique, d’avoir un rôle proactif dans l’élaboration et le déploiement de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la corruption, de contribuer à développer des approches globales nécessaire à des problématiques telles que l’informel, la contrefaçon, etc., et de développer les partenariats avec les institutions nationales et internationales pour une capitalisation et une diffusion des meilleures pratiques à l’international.
L’intervenante a également proposé plusieurs recommandations dont l’une a trait à la nécessité d’intégrer la corruption sexuelle dans le secteur privé au niveau du Code pénal et des conventions internationales et également de protéger les témoins et les dénonciateurs dans les affaires de corruption, surtout quand cette corruption est liée à l’extorsion sexuelle.
Pour sa part, Naima Benwakrim, experte genre de ce projet, a évoqué des problématiques liées à la définition du phénomène de l’extorsion sexuelle et la différence entre celle-ci et le harcèlement sexuel.
Dans ce sens, elle a appelé à l’étude scientifique de ce phénomène en vue de mettre en place des indicateurs quantifiables permettant premièrement d’approcher l’extorsion sexuelle, et deuxièmement, d’élaborer une vision claire basée sur des données tangibles, et, partant, d’élaborer un plaidoyer pour lutter contre ce phénomène.
Il convient de rappeler que ce projet s’articule autour de plusieurs activités. En plus des tables rondes et des séminaires, TM et ses partenaires ont procédé à la création d’une équipe de travail chargée de faire une étude de l’arsenal juridique et surtout du Code pénal et des textes de loi relatifs à la lutte contre la corruption.
Une enquête de terrain sera menée dans le cadre de ce même projet pour compléter la première étude.
Le projet prévoit également des activités dont une caravane de sensibilisation et un colloque international auxquels prendront part toutes les parties concernées par ce sujet. L’objectif étant d’élaborer une stratégie de communication visant à enrichir le débat public sur la corruption au Maroc et son impact sur les femmes.