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Nouvelle ère en Ukraine Timochenko libérée Ianoukovitch introuvable

Le chef du Parlement Tourtchinov président par intérim


Lundi 24 Février 2014

Nouvelle ère en Ukraine Timochenko libérée Ianoukovitch  introuvable
Une nouvelle ère s'ouvrait dimanche en Ukraine après la folle journée de la veille, marquée par la destitution de facto du président Viktor Ianoukovitch, introuvable depuis, et la libération de l'opposante Ioulia Timochenko.
Tôt dans la matinée, le centre de Kiev, métamorphosé en quasi-zone de guerre après trois mois de crise aiguë, semblait renouer avec un semblant de normalité, même si le service d'ordre des manifestants gardait toujours les barricades. 
Sur le Maïdan (place de l'Indépendance), l'heure était au soulagement et au recueillement. Tôt dimanche matin, quelques centaines de personnes y étaient rassemblées, chantant la main sur le cœur l'hymne national, conclu par de tonitruants "Gloire à l'Ukraine !" 
 A proximité, les magasins, restés fermés ces derniers jours, avaient rouvert dimanche.
Dans le même temps, le siège du parti communiste, allié du parti de Viktor Ianoukovitch au Parlement, a été saccagé par des manifestants et les inscriptions "criminels", "assassins", "esclaves de Ianoukovitch" ont été taguées sur la façade du bâtiment.
Quelque 40 statues de Lénine ont aussi été déboulonnées ou vandalisées depuis le début de la semaine, principalement dans l'est du pays, selon les médias ukrainiens.
 Des documents détaillant un système de pots-de-vin organisé et une liste de journalistes à surveiller ont été découverts dans la résidence du président déchu dans la banlieue de Kiev. Le site, resté ouvert toute la nuit, a été visité par des milliers d'Ukrainiens dont beaucoup sont restés bouche bée devant le faste des lieux, perçus comme le symbole de la corruption du régime.
 Les affrontements à Kiev ont fait près de 80 morts cette semaine, un niveau de violence inédit pour ce jeune pays issu de l'ex-Union soviétique.
 Si l'extrême tension des derniers jours est retombée, les inquiétudes concernant ce pays de 46 millions d'habitants restent très vives. Il apparaît en effet à la fois profondément divisé et au bord de la faillite financière.
L'Ukraine s'est imposée comme thème lors de la réunion du G20 dimanche à Sydney.
 "Les Etats-Unis et d'autres pays sont prêts à aider l'Ukraine dans ses efforts de retour à la démocratie, à la stabilité et la croissance", a déclaré le secrétaire américain au Trésor, Jack Lew, qui a espéré la formation d'un "gouvernement multipartite et technocrate, désireux de mener les réformes économiques nécessaires".
Le processus de formation d'un nouveau gouvernement devrait être lancé dimanche, après des consultations qui ont duré toute la nuit, a annoncé un député.  La communauté internationale a en outre clairement fait part de ses craintes que la crise n'ait encore creusé le fossé entre l'Est russophone et russophile, majoritaire, et l'Ouest nationaliste et ukrainophone.
 
Paysage politique 
chamboulé 
La représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a appelé les responsables politiques ukrainiens à agir "de manière responsable" pour maintenir l'"unité" du pays.
 A Kharkiv, ville de l'est du pays, des responsables locaux des régions pro-russes de l'est ont remis en cause samedi la "légitimité" du Parlement ukrainien qui, selon eux, travaille actuellement "sous la menace des armes". 
 Et à Sébastopol (Crimée, sud), une manifestation pro-russe était annoncée pour dimanche à 14H00 GMT.  Le paysage politique de l'Ukraine a été totalement chamboulé en l'espace de 24 heures avec la libération de l'ex-Premier ministre Ioulia Timochenko, emprisonnée depuis 2011. Elle apparaît dès à présent comme une candidate de poids à l'élection présidentielle anticipée fixée au 25 mai. 
A peine sortie de prison, l'égérie de la Révolution orange en 2004 s'est rendue sur le Maïdan où elle a salué les "héros" de l'Ukraine et leur a demandé de poursuivre le combat.
"Si quelqu'un vous dit que c'est terminé et que vous pouvez rentrer chez vous, n'en croyez pas un mot, vous devez finir le travail", leur a-t-elle lancé.
 
"Coup d'Etat" 
Sa libération immédiate avait été votée samedi par le Parlement. Peu après, les députés ont pris acte de ce qu'ils ont présenté comme une vacance du pouvoir, justifiant une destitution de facto du chef d'Etat et l'organisation d'une présidentielle anticipée le 25 mai.
 "Le président Ianoukovitch s'est écarté du pouvoir et ne remplit plus ses fonctions", selon la résolution adoptée par le Parlement. L'intéressé, élu en 2010 et dont le mandat court jusqu'en mars 2015, a cependant assuré qu'il n'avait nullement l'intention de démissionner.
 "Le pays assiste à un coup d'Etat (...). Je suis un président élu de manière légitime", a-t-il souligné dans une allocution télévisée non datée, diffusée par une chaîne régionale à Kharkiv (est).
Selon le nouveau président du Parlement, Olexandre Tourtchinov, M. Ianoukovitch a tenté samedi de fuir en Russie à bord d'un avion mais en a été empêché par les gardes-frontières. Ces derniers ont indiqué par la suite que M. Ianoukovitch avait tenté en vain de les corrompre pour qu'ils laissent son avion décoller.
On ignorait dimanche où se trouvait l'ex-président.
 "Ianoukovitch a été mis KO", s'est réjoui l'un des principaux responsables de l'opposition ukrainienne, le champion du monde de boxe poids-lourds, Vitali Klitschko.
 Son parti, Oudar (coup), a demandé le lancement d'un mandat d'arrêt international, "pour que les criminels qui se sont enfuis ou qui souhaitent le faire n'échappent pas à la justice".
 Une enquête a déjà été ouverte contre 30 hauts responsables de la police, pour leur rôle dans la répression.
 La Russie avait accusé samedi l'opposition ukrainienne de ne pas avoir "rempli une seule des obligations" figurant dans l'accord signé vendredi avec le président et dénoncé "les extrémistes armés et les pillards dont les actes constituent une menace directe (pesant) sur la souveraineté de l'Ukraine".
 Côté européen, le ton était radicalement différent. "Il n'y a pas de coup d'Etat à Kiev. Les bâtiments officiels ont été abandonnés. Le président du Parlement a été légitimement élu", selon le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, qui a participé cette semaine aux négociations entre opposition et pouvoir. 
Par ailleurs, le président du Parlement a donné aux députés jusqu'à mardi pour former une nouvelle majorité et un gouvernement d'unité nationale lors d'une séance au Parlement, qui a destitué la veille le président Viktor Ianoukovitch. 
 "Je demande aux députés de lancer immédiatement le processus de constitution d'une nouvelle majorité parlementaire et la formation d'un gouvernement d'unité nationale. Cela doit être fait d'ici mardi", a déclaré le président du Parlement Olexandre Tourtchinov.

Qui est Ioulia Timochenko ?

L’opposante ukrainienne Ioulia Timochenko, libérée samedi après plus de deux ans d’incarcération, a la réputation d’une dame de fer et a montré une combativité impressionnante aussi bien au poste de Premier ministre que quand elle était en prison.
Dans la crise qui touche l’Ukraine depuis fin novembre, l’ex-Premier ministre est apparue comme l’opposante la plus radicale au régime de Viktor Ianoukovitch, élu en 2010. 
Elle l’a accusé de transformer l’Ukraine en Corée du Nord et jugé inutile toute négociation avec lui, appelant jeudi, après des tirs à balles réelles en plein centre de Kiev qui ont fait des dizaines de morts, à sa mise à l’écart immédiate et à des poursuites judiciaires contre lui.
 
Tresse traditionnelle 
Agée de 53 ans, cette femme élégante et rompue aux techniques de communication s’est faite connaître du monde entier en 2004. Reconnaissable à sa tresse traditionnelle, elle s’était faite l’égérie de la Révolution orange pro-occidentale qui secouait le pays.
 Elle haranguait les foules à Kiev contre le Premier ministre de l’époque, également candidat à la présidentielle et soutenu par Moscou, Viktor Ianoukovitch.
La coalition «orange» qu’elle formait alors avec Viktor Iouchtchenko l’emporte, soutenue par les Occidentaux, et au grand dam de la Russie de Vladimir Poutine.
Les années de pouvoir ont ensuite défait cette alliance Timochenko quitte le gouvernement, puis en reprend la tête en 2007 jusqu’à la présidentielle de 2010, qui marque le retour victorieux de Viktor Ianoukovitch.
 
 Les ennuis judiciaires 
commencent alors pour 
Mme Timochenko
Elle est condamnée en 2011 à sept ans de prison pour avoir signé en sa qualité de chef du gouvernement un accord gazier avec la Russie à des conditions jugées défavorables à son pays.
 Elle est également soupçonnée de complicité dans le meurtre d’un député. Elle rejette toutes ces accusations, dans lesquelles elle dénonce une vengeance du pouvoir visant à l’écarter de la scène politique.
 Son incarcération et sa condamnation deviennent très rapidement un écueil majeur dans les relations entre l’Ukraine et les Occidentaux, qui demandent sa libération.
Même derrière les barreaux, cette politique aux nerfs solides continue de combattre le pouvoir de M. Ianoukovitch.
Ses références : Jeanne 
d’Arc et Thatcher 
C’est ainsi qu’elle observe une grève de la faim de trois semaines pour protester contre des violences dont elle affirme avoir été victime.
Transférée en mai 2012 à l’hôpital de Kharkiv (est) afin d’y être soignée pour des hernies discales, elle accuse le président de l’y soumettre à une vidéosurveillance de tous les instants, jusque dans les toilettes.
Cette femme menue avait acquis bien avant son incarcération sa réputation de «dame de fer».
 Dans le bureau qu’elle occupait à Kiev, une statuette de Jeanne d’Arc, les mémoires de l’ex-Première ministre britannique Margaret Thatcher et un livre sur l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Madeleine Albright montraient ses références politiques et la hauteur de ses ambitions.
 Née le 27 novembre 1960, ingénieur-économiste à l’époque de l’URSS, elle a dirigé une importante compagnie énergétique, bénéficiant du monopole de l’importation de gaz russe en Ukraine après l’indépendance du pays en 1991.
Son mari Olexandre a obtenu l’asile politique en République tchèque après son emprisonnement. Leur fille unique, Evguenia, a lutté sans relâche pour sa libération en multipliant les rencontres en Occident.


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