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Les budgets des ménages sous haute pression

Les dépenses des vacances estivales, de l’Aïd Al Adha et de la rentrée scolaire mettent à mal la bourse des Marocains


Chaymae Senhaji (Stagiaire)
Vendredi 25 Août 2017

Dur, dur, le quotidien des Marocains en ces temps où les chaleurs estivales se conjuguent avec des dépenses à la fois fortes et incompressibles. A peine les petits plats mis dans les grands à l’occasion du Ramadan, les dépenses vestimentaires de l’Aïd El Fitr ont pointé le nez pour annoncer des congés réparateurs mais onéreux et un Aïd Al Adha qui prélude à une rentrée scolaire qui va obérer davantage la portion congrue qui sert de bourse à la majeure partie de nos concitoyens.
L’Aïd Al Adha intervient donc à un moment où les budgets des ménages sont mis à rude épreuve. Peu importe donc que l'offre en cheptel ovin et caprin destiné à l'abattage puisse répondre à la demande. Peu importe que le Maroc puisse disposer de près de 9 millions de têtes pour une demande globale estimée à 5,43 millions durant l’Aïd.
Peu importe aussi que le cheptel national ovin et caprin puisse compter 19,87 millions d'ovins et 5,6 millions de caprins et que les 5,14 millions d’ovins mâles, 1,75 million d’agnelles et 2,11 millions de caprins soient destinés à l’abattage. Peu importe également que les prix soient stables à l’heure actuelle puisque la surchauffe n’intervient généralement que fort peu de temps avant l’immolation.  Ils varient, en moyenne entre 2700 et 5000 DH contre 3000 et 6000 DH en 2016, année de sécheresse agricole, mais à l’évidence, ils sont appelés à prendre l’ascenseur ne serait-ce qu’à cause du renchérissement actuel des prix du gasoil.
Peu importe aussi que les immolations rituelles puissent générer plus de 10 milliards de DH…
Le vrai problème est ailleurs. Il se situe à la fois au niveau des revenus des ménages et de leur capacité à répondre ou non à une succession aussi rapprochée d’évènements qui induisent de fortes dépenses.
Selon les statistiques officielles, ils le peuvent pour la tranche des 10% des ménages qui se situent en haut de la hiérarchie des niveaux de vie mais pas pour les 10% en bas de celle-ci et qui s’appauvrissent davantage. La première tranche réalise, en effet, une consommation 105 fois supérieure à celle de la  seconde pour les loisirs, 24 fois plus pour les communications et 44 fois pour les transports. Idem pour l’éducation où les 10% des plus favorisés dépensent 24 fois plus que les 10% les moins favorisés.  
En décodé, les enquêtes du HCP révèlent qu’à l’échelle nationale, la consommation alimentaire occupe 37% du revenu, 33,3% en milieu urbain et 14,3% en milieu rural et que la vulnérabilité à la pauvreté est un phénomène encore présent dans notre société avec une incidence de 19,4% dans le monde rural contre 7,9% en milieu urbain.
L’an dernier, le HCP avait publié une Note d’information détaillant les dépenses de consommation des ménages lors de la rentrée scolaire et de l’Aid Al Adha.
Il y a précisé que les ménages urbains sont plus enclins à ne pas immoler de moutons que les ruraux (5,9% contre 2,5%), que les ménages individuels constituent la catégorie la moins concernée par le sacrifice (46,5%) et que cette proportion tombe jusqu’à 0,8% pour les ménages composés d'au moins 6 personnes.
En outre, plus on est riche et instruit, plus on a tendance à s’y soustraire. Près de 12% des ménages appartenant au 10% de la population la plus aisée ne sacrifient pas de mouton à l'occasion de l'Aïd, contre moins de 2% pour les ménages relevant des 10% de la population la plus pauvre. De même, 11,6% des chefs de ménage d’un niveau d’enseignement supérieur s’inscrivent dans cette tendance, contre 4% pour les chefs de ménage sans niveau d'instruction.
De plus, le sacrifice de l’Aïd Al Adha prélève près de 29% en moyenne de la dépense globale mensuelle du ménage marocain. Sur la base de cette moyenne, la charge financière sur le budget des ménages est variable selon leur niveau de vie: cette charge représente plus de la moitié (57%) de la dépense globale mensuelle pour les 10% des ménages les plus pauvres, contre 15% pour les 10% les plus aisés.
Pour s’acquitter du rituel de sacrifice, les ménages marocains optent pour les ovins dans leur majorité (96,2%). Le reste étant orienté vers les caprins (3,3%), comme c’est le cas notamment en milieu rural, et les bovins (0,5%). Par ailleurs, l’Aïd Al Adha représente près de 41% de la quantité annuelle des viandes rouges consommée par les ménages. Cette dernière est plus élevée pour les 20% des ménages les plus pauvres (65,4%), contrairement au quintile le plus aisé (31,3%).
Quant aux dépenses de scolarité que les parents vont être obligés de régler durant la première moitié de septembre, elles ont l’heur d’avoir suivi une courbe ascendante durant les dernières années. Depuis 2007, le prix global dans le secteur s’est apprécié annuellement de 3,4% en moyenne (ce qui a engendré au final une hausse cumulée de 40% sur dix ans).
Les secteurs de l’enseignement secondaire et présecondaire sont plus dynamiques en la matière, avec une hausse moyenne annuelle de 4%. Il est à noter aussi que les frais d’inscription ont le plus tiré vers le haut (+4,7% en moyenne), comparativement aux frais de scolarisation (+3,3%).
La rentrée scolaire 2013/2014 à laquelle ladite note du HCP a fait référence a accaparé en moyenne 26% (environ 1751 DH) de la dépense mensuelle des ménages marocains ayant des enfants scolarisés (qui représentent 62,2% du total des ménages). Par personne scolarisée, cette dépense s’est située à 844 DH. Elle varie selon le milieu de résidence, passant de 1093 DH par enfant en milieu urbain et à 443 DH en milieu rural. Un ménage parmi les 20% les plus aisés supporte une charge 5,6 fois plus élevée que celle d’un ménage appartenant aux 20% les moins aisés. Ces charges avoisinent respectivement 2099 et 373 DH.
Un signe qui atteste des difficultés financières auxquelles les ménages se trouvent actuellement confrontés : les publicités vantant les bienfaits de certains crédits à la consommation fleurissent comme des coquelicots au printemps. Avec ce que cela induit comme pression supplémentaire sur les budgets des ménages. Pour les rééquilibrer un tant soit peu, ça va être la galère en somme.


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