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La terre a tremblé : Petits moyens et grosses inquiétudes


M. Louizi, T. Mourad
Mardi 26 Janvier 2016

Le réveil a été plutôt brutal pour les résidents du préside occupé de Mellilia. Un séisme de magnitude 6,3 s'est produit, hier aux premières heures de la matinée en mer Méditerranée, entre le Maroc et l'Espagne. La terre a tremblé à 62 km au nord de la ville d'Al Hoceïma et à 164 km au Sud-est de Gibraltar. Les secousses ont été ressenties jusqu'au Sud de la péninsule ibérique.
Le préside occupé a été particulièrement touché  puisque les secousses y ont été particulièrement intenses, causant des dommages à plusieurs bâtiments et la panique parmi les habitants.
« Nous avons vécu un très mauvais moment, toute la maison bougeait, tout a été cassé. La maison a des fissures, elle est presque tombée sur nous. Les enfants avaient très peur, tout le monde pleurait, c'était incroyable. Ce n'était jamais arrivé à Mellilia », a déclaré à la presse un habitant.
Plus de peur que de mal en fait. L'heure matinale y est pour quelque chose puisque la plupart des gens n’avaient pas encore quitté le cocon protecteur de sa maison pour vaquer à ses occupations quotidiennes.
"Pour l'instant il n'y a que des dommages matériels et nous n'en avons pas détecté de très graves", a déclaré à la radio Cadena Ser Isidro Gonzalez, responsable municipal en charge de la Sécurité citoyenne du préside. "Il n'y a rien de très grave, certains immeubles hauts ont des fissures", a-t-il ajouté en évoquant aussi des effondrements de pans de façades et de balcons. Les écoles devraient toutefois rester fermées hier, le temps que toutes les installations soient vérifiées.
En fait, c’est le plancher marin situé à 62 km au nord d’Al Hoceima qui a enregistré un séisme de magnitude 6,3 sur l'échelle de Richter, avant que plusieurs répliques dont une de magnitude 5,3, ne surviennent quelques instants plus tard.
Le séisme a été ressenti tant à Nador, qu’à Al Hoceima, Tétouan, Mellilia, Grenade, Malaga, Gibraltar et même dans des villes comme Casablanca et Rabat.
Selon Nacer Jabour, chercheur au Centre national de la géophysique dépendant du Centre national de la recherche scientifique et technique, la magnitude du tremblement de terre qui a touché toute la région du Nord du Royaume et qui a été ressentie par les habitants de la capitale économique, est comparable à celle du tremblement de terre de 2004. « Mais heureusement l’épicentre du séisme s’est trouvé au large de la mer », ce qui explique, selon lui, que les dégâts n’ont pas été importants.
Il convient de rappeler qu’un tremblement de terre d'une magnitude de 6,3 avait été enregistré en 2004 dans le Nord du Royaume faisant 629 morts, 926 blessés et 15 230 sans-abri dans la province d'Al-Hoceima. Son épicentre était situé au village d’Aït Kamara qui été entièrement détruit.
Pourquoi  cette zone est-elle constamment menacée par des séismes ? D’après ce spécialiste, la cause serait imputable au fait que le Nord du Maroc se situe dans une zone où l’activité des plaques tectoniques peut se traduire par des chocs très forts. La région est, en fait, une zone à risque du fait de la rencontre entre les plaques tectoniques eurasienne et africaine.
Selon l’Institut scientifique relevant de l’Université Mohammed V, le Royaume se trouve, en effet, à l'extrémité nord-occidentale de l'Afrique, là où la plaque africaine rentre en collision avec la plaque européenne au niveau du Détroit de Gibraltar. Sa position  se traduit actuellement par une sismicité relativement importante qui reflète la poursuite de la convergence entre ces deux plaques lithosphériques ; la limite entre celles-ci est soulignée par l'alignement des épicentres entre les Açores et le Détroit de Gibraltar.
Sa sismicité est néanmoins relativement modérée, exception faite  des  tremblements de terre de magnitude supérieure ou égale à 6 survenus à Agadir en 1960 (12.000 morts) et à Al Hoceima en 2004 (629 morts) .  Cependant, d'autres séismes de magnitudes inférieures ont provoqué des morts et des dégâts importants
Le Nord du Royaume est particulièrement concerné par ces phénomènes vu que  le Centre national de géophysique y a souvent enregistré des secousses de différentes magnitudes. Les dernières en date sont celles survenues  jeudi dernier et ce lundi.


La sismicité du Maroc

Le Maroc est situé à l'extrémité nord-occidentale de l'Afrique, là où la plaque africaine rentre en collision avec la plaque européenne dont le taux de rapprochement est d'environ 0,4 cm/an au niveau du Détroit de Gibraltar. Cette position  particulière du Maroc se traduit actuellement par une sismicité relativement importante qui reflète la poursuite de la convergence entre ces deux plaques lithosphériques. La limite entre celles-ci est soulignée par l'alignement des épicentres entre les Açores et le Détroit de Gibraltar.
La sismicité observée au Maroc depuis le début du vingtième siècle, a été relativement modérée, il n'y a eu que deux séismes de magnitude supérieure ou égale à 6: Agadir en 1960 (12.000 morts) et Al Hoceima en 2004 (629 morts). Cependant, d'autres séismes de magnitudes inférieures ont provoqué  la mort de nombreuses personnes et causé des dégâts importants (Atlantique, 1969; Rissani, 1992; Al Hoceima, 1994, etc.).
La carte de sismicité du Maroc des régions limitrophes pour la période 1901 à 2010 montre que les épicentres sont répartis dans trois domaines.
Domaine atlasique : où  l'activité sismique est principalement localisée dans le Moyen Atlas et le Haut Atlas central. Cette sismicité est due en grande partie à la présence d'un réseau complexe de failles tectoniquement actif.
Dans le Haut Atlas, l'accident sud-atlasique, qui part d'Agadir et passe à proximité de Figuig, est jalonné par des épicentres qui peuvent être violents comme celui d'Agadir.
Domaine bético-rifain : c'est toute la région comprise entre le sud-est de l'Espagne au Nord et la chaîne rifaine au Sud. Il est le siège d'une activité sismique intense qui témoigne du rapprochement et la collision des deux plaques Afrique-Eurasie.
Domaine atlantique : où on distingue clairement la limite entre les deux plaques, représentée par la ligne sismique Açores-Gibraltar-Sicile. Celle-ci est jalonnée par des séismes de magnitude pouvant atteindre ou dépasser le degré 7. Par ailleurs, ces séismes océaniques peuvent affecter le Maroc et la péninsule ibérique comme ce fut le cas lors des tremblements de terre de 1755 et 1969.

Aperçu historique

Le Maroc a subi par le passé plusieurs tremblements de terre destructeurs. Quelques villes ont même été partiellement ou en grande partie détruites : Agadir (1731, 1761), Fès (1522, 1624, 1755), Marrakech (1719, 1755), Meknès (1624, 1755), Mellilia (1821, 1848), Rabat-Salé (1755), Tanger (1755, 1773).
Ce n'est qu'au début du vingtième siècle que l'on a commencé à  avoir des renseignements scientifiques sur les séismes au Maroc ; où en 1904, les premières études scientifiques avaient signalé que le Royaume, comme les autres pays de l'Afrique du Nord et l'Espagne, était exposé aux séismes.
A partir de 1913, les renseignements sur les tremblements de terre ont commencé à présenter quelque continuité (presse, postes météorologiques, etc.), mais ce n’est qu’à partir de 1932 que des enquêtes macrosismiques pour tout le Maroc ont été organisées par le l'Institut scientifique chérifien (devenu Institut scientifique) grâce au réseau d'observateurs météorologiques et aux enquêtes par questionnaires.
En 1934, une première liste des séismes ressentis au Maroc avant 1932 a été établie.
Ce n'est qu'en 1937 que la première station sismologique a été installée au Maroc à l'observatoire d'Ibn Rochd (Averroès) de l'Institut scientifique (Université Mohammed V-Agdal, Rabat); la deuxième station n'a vu le jour qu'en 1964 à l'observatoire d'Ifrane après le tremblement de terre d'Agadir (1960).
Le développement assez important du réseau sismologique national à partir de 1979 a permis d'améliorer sensiblement la localisation instrumentale des épicentres.

Aléa sismique
et aménagement du territoire
au Nord du Royaume


Là où la terre a tremblé, elle tremblera. C’est une règle élémentaire en sismologie.  Les tremblements de terre se produisent le long des frontières des plaques, et de manière générale, le long des failles,  qui constituent des zones de faiblesse dans la croûte.
Or, le Maroc comporte deux zones sismiquement actives : le Rif et la chaîne atlasique, et deux zones d’une activité sismique faible à négligeable : les Meseta (occidentale et maroco-oranaise) et l’Anti-Atlas et ses confins sahariens.
Aussi, toutes les mesures doivent être prises pour en atténuer les conséquences.
Le nombre élevé des victimes à la suite d’un tremblement de terre est, en effet, dû en général à la mauvaise qualité des constructions. Un sismologue américain avait dit : « Les tremblements de terre ne tuent pas, ce sont les bâtiments qui tuent ».
Rappelons qu’à Agadir en 1960, les constructions bien conçues et bien exécutées ont mieux résisté que les bâtiments de conception traditionnelle et les ouvrages mal exécutés.
Il n’en demeure pas moins que l’application du Code de construction parasismique se traduit généralement par une augmentation des coûts, mais elle constitue le moyen le plus  efficace pour réduire les pertes en vies humaines et autres dommages liés aux séismes.
Au Maroc, la généralisation et l’obligation de construction parasismique sont donc indispensables, car depuis le début de ce siècle, notre pays a déjà enregistré de violents séismes dont les plus connus sont ceux d’Agadir et d’Al Hoceima.

 


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