Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager

Ces fugitifs étrangers qui prennent le Maroc pour un Eldorado, sauf que toute bonne chose a une fin


Chady Chaabi (Stagiaire)
Mercredi 26 Juillet 2017

Les récentes interpellations, sur le sol marocain, de deux ressortissants français et britannique en cavale, au regard de leurs prédécesseurs, ne sont pas uniques en leur genre. Retour sur les quelques cas insolites de ces fuyards. 
Mis en examen pour le meurtre en 2004 de Kamel Laroussi et condamné par contumace à 20 ans de réclusion criminelle par la Cour d'assises des Alpes-Maritimes pour ce meurtre commis sur fond de trafic de stupéfiants, Pierre Baraud, 52 ans, avait pris la fuite un an plus tard, profitant d’une remise en liberté et d’un placement sous contrôle judiciaire. Il a été interpellé le 13 juillet courant au Maroc, après douze ans de cavale.  
A Oued-Zem, la police judiciaire vient d’appréhender un citoyen anglais d’origine irakienne, suite à un avis de recherche international lancé à son encontre. Le fugitif est âgé de 47 ans, marié à une marocaine et père de deux enfants. Il est impliqué dans plusieurs assassinats dans sa ville natale de Soulaimaniya en Irak.
Ce double coup de filet vient s’ajouter aux arrestations d’autres fugitifs dont les cavales ont longtemps défrayé les chroniques de faits divers. Un chanteur de rap, un braqueur qui manque de discrétion ou un baron de la drogue, expert en évasion, autant de profils tout aussi dangereux que différents et qui ont cru que le Maroc est une solution de repli, pour se mettre à l’ombre et échapper aux projecteurs de la machine judiciaire. 

Le baron de la drogue
 et de l’évasion
Lorsqu’il tombe entre les mailles du GIR (groupe d’intervention régional) de Lille, en septembre 2008, Mohamed Benabdelhak, surnommé « Bombay » par ses amis, a en sa possession 580 kilos de cannabis (chira). Il est immédiatement incarcéré à la prison de Loos-les-Lille. 
Une fois en cellule, il se donne rapidement les moyens de s’évader en s’équipant d’un téléphone pour planifier une évasion digne d’un film de John Sturges, rapide et orchestrée de façon très professionnelle. Bombay, âgé à l’époque de 28 ans seulement, est une pointure. Un garçon qui va chercher la dope à la source, la ramène lui-même et dispose des liquidités suffisantes pour organiser une opération d’évasion de cette ampleur. 
Fusils d’assaut M 16 et kalachnikovs à l’appui, gyrophares, gilets pare-balles, brassards de police, deux voitures, une Audi et une Mini-Cooper, rien ne manque à la panoplie, mais l’option retenue n’est pas la plus simple. Ses complices ont pour mission d’attaquer le fourgon cellulaire lors de son transfert vers le palais de justice de Beauvais, le 18 novembre 2008. Non seulement l’opération est un succès, mais en plus aucun coup de feu n’a été tiré.
La cavale est une autre histoire. « Bombay » file vers l’Allemagne à moto, puis, parcourt l’Europe du Nord au Sud. Traqué sans relâche, sa trace est retrouvée en Espagne, mais la police le rate d’un cheveu. Il traverse le Détroit de Gibraltar, l’un de ses terrains de jeu, et se cache au Maroc, où il est propriétaire de cyber-cafés et de boulangeries.
La ministre française de l’Intérieur de l’époque, Michèle Alliot-Marie, tente de mobiliser son homologue chérifien, mais le fugitif est protégé par son passeport marocain. Interpellé en décembre 2008 à Casablanca, après qu’un mandat d’arrêt international a été lancé contre lui, il est condamné, toujours au Maroc, à six mois de prison et par la même occasion à dix-huit mois supplémentaires, car accusé de partager la vie d’une jeune femme sans être mariés.
Après avoir purgé sa peine, il rallie le Vieux Continent où il est rapidement arrêté et plus précisément à Bruxelles. Il y avait été «localisé» après quatre ans de fuite et deux ans de prison au Maroc.

Le rappeur exilé
En mars 2015, Lacrim, un rappeur français d'origine algérienne, de son vrai nom Karim Zenoud, est condamné à 3 ans d'emprisonnement ferme par le tribunal correctionnel de Marseille. Ses empreintes ont été retrouvées sur des calibres, lors de la découverte d'un dépôt d'armes dans les quartiers nord marseillais. Il aurait utilisé des kalachnikovs pour tourner son clip « Viens je t'emmène » en 2011. Lacrim ne se présente pas à son procès le 23 mars 2015. D'après lui, il n'a jamais reçu de convocation pour son procès pendant lequel sa peine est annoncée. Il s'enfuit alors au Maroc.
Si Lacrim raconte qu’il avait parfois « peur de sortir pour acheter une baguette », il ne se prive pas de renflouer son portefeuille, en faisant le show dans les boîtes de nuit de la ville ocre. Il enregistre aussi deux disques pendant cette période, en raison des engagements avec son label.
A l’époque, il défendait son exil, expliquant ainsi les faits qui lui ont été reprochés en mars 2012 : « Cette affaire date d’avant mon incarcération et on me met trois ans ferme. Je ne comprends plus rien. L’Etat, ce système, est en train d’essayer de me briser», déplorait le rappeur, qui s’estimait par ailleurs sali par la presse.
Après huit mois de liberté volée, Lacrim veut se rendre à la police. Son avocat contacte alors le procureur de la République française afin qu'il puisse être arrêté. Il dit être fatigué et avoir perdu 10 kg pendant tout ce temps.

Le braqueur taquin
Nabil Ibelati, lui, ne faisait pas dans le feutré. Il envoyait des messages au tribunal correctionnel de Grasse (Sud de la France) pour narguer les magistrats. La page Facebook du voleur documentait depuis septembre 2013 sa vie de vacancier. En juin 2014, il est à dos de chameau dans le désert marocain, se réjouissant de ne pas être en garde à vue. Début août, trois jours avant son procès, il poste une photo de lui sur une moto, dans une piscine ou encore dégustant des cocktails.
Trentenaire et multirécidiviste, le braqueur en fuite avait été condamné en France à 10 ans de prison ferme par contumace. Il a été le cerveau, il y a deux ans, du braquage, en plein jour et à visage découvert, armé d'un pistolet et d'une grenade, de la bijouterie cannoise de «Kronometry», toujours sur les rives de la Méditerranée. Le butin est estimé à 1,7 million d'euros. Possédant la double nationalité franco-marocaine, il avait ensuite filé au Maroc pour dépenser son butin, dont il aurait retiré au moins 350.000 euros d'un lot de montres, de quoi acheter un garage, une station de lavage auto et un appartement à Marrakech.
Nabil Ibelati y a été finalement arrêté, à la suite d'un avis de recherche international lancé par Interpol. Placé en garde à vue, il n'a pas été précisé si le ressortissant franco-marocain ferait l'objet d'une procédure d'extradition.












Lu 5854 fois

Nouveau commentaire :

Votre avis nous intéresse. Cependant, Libé refusera de diffuser toute forme de message haineux, diffamatoire, calomnieux ou attentatoire à l'honneur et à la vie privée.
Seront immédiatement exclus de notre site, tous propos racistes ou xénophobes, menaces, injures ou autres incitations à la violence.
En toutes circonstances, nous vous recommandons respect et courtoisie. Merci.

Actualité | Dossiers du weekend | Spécial élections | Les cancres de la campagne | Libé + Eté | Spécial Eté | Rétrospective 2010 | Monde | Société | Régions | Horizons | Economie | Culture | Sport | Ecume du jour | Entretien | Archives | Vidéo | Expresso | En toute Libé | L'info | People | Editorial | Post Scriptum | Billet | Rebonds | High-tech | Vu d'ici | Scalpel | Chronique littéraire | Billet | Portrait | Au jour le jour | Edito | Sur le vif | RETROSPECTIVE 2020 | RETROSPECTIVE ECO 2020 | RETROSPECTIVE USFP 2020 | RETROSPECTIVE SPORT 2020 | RETROSPECTIVE CULTURE 2020 | RETROSPECTIVE SOCIETE 2020 | RETROSPECTIVE MONDE 2020











Flux RSS
p