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Approuvé en 2011, l’agenda de l’égalité sera-t-il adopté ? Inquiétudes des femmes sur le programme gouvernemental


Narjis Rerhaye
Samedi 7 Janvier 2012

Le mouvement féminin ne cache pas ses inquiétudes. Depuis la nomination du gouvernement, les activistes des droits des femmes ne décolèrent pas : une seule et unique femme a accédé au pouvoir exécutif. «Et encore, Bassima Hakkaoui, qui est représentative d’une catégorie bien spécifique des Marocaines, a été nommée à la tête du département en charge du Développement social, de la Femme et de la Famille. Un peu comme si les femmes de ce pays n’étaient valables qu’à ce genre de postes et pas ailleurs !» relève avec amertume l’une des fondatrices de l’Association démocratique des femmes du Maroc. Ironie du sort, l’islamiste Bassima Hakkaoui succède à la féministe et femme de gauche, la PPS Nouzha Sqalli…
Et jeudi 5 janvier, au sortir du tout premier Conseil de gouvernement qu’il a présidé, Abdelilah Benkirane a enfoncé plus encore le clou sur la question des compétences féminines. Interpellé sur la sous-représentativité des Marocaines dans son cabinet, le chef de gouvernement s’est voulu rassurant devant la presse, en déclarant qu’il n’y avait «aucune volonté d’exclure les femmes de ce gouvernement». Une seule femme ministre sur les 30 que compte l’Exécutif, et, indique le chef de gouvernement, «aucune raison de s’indigner». «Ce qu’il faut surtout, ce sont des gens compétents. Les partis ont essayé… mais ce n’est pas facile», a poursuivi M. Benkirane accréditant au passage la thèse selon laquelle les compétences féminines sont introuvables au sein des partis politiques. «Les leaders de ces trois partis de la coalition gouvernementale, l’Istiqlal, le PPS et le Mouvement populaire, ont affirmé, main sur le cœur, qu’ils ont été confrontés à une crise des compétences féminines et c’est la raison pour laquelle ils n’ont pas proposé de femmes sur leur liste. C’est extrêmement grave d’avancer de tels propos. Est-ce à dire que les femmes députées qui représentent ces mêmes partis sont des incompétentes ? Ces partis, y compris une formation politique de gauche comme le PPS, sont en train de signifier à la société marocaine qui se compose de femmes et d’hommes que l’expertise et  la compétence sont une affaire d’hommes. Et que la femme n’est au final qu’une présence alibi. Terminés les beaux discours sur l’égalité de la femme et de l’homme et de l’exigence de démocratie et de modernité qui passe indéniablement par la reconnaissance de la citoyenneté pleine et entière des Marocaines», s’indigne cette militante dont le cœur bat à gauche. La célèbre phrase de Françoise Giroud est ici  plus que jamais d’actualité. «La femme serait vraiment l’égale de l’homme le jour  où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente».Dans les rangs de l’Association démocratique des femmes du Maroc, une ONG dont plusieurs membres fondatrices appartiennent ou ont appartenu au PPS, aujourd’hui partenaire des islamistes au sein de la coalition gouvernementale, la déception est immense et la vigilance plus que jamais de mise. La mobilisation a bel et bien commencé chez ces défenseures des droits des femmes.

Un million de signatures
pour l’égalité de la femme
et de l’homme

Dès la nomination du gouvernement, la présidente nationale par intérim de l’ADFM, Amina Lotfi, a adressé une lettre ouverte au chef de gouvernement pour le sommer de «mettre en œuvre les dispositions constitutionnelles relatives à l’institutionnalisation  de l’égalité entre les sexes et ce à travers leur traduction et leur déclinaison opérationnelles en politiques publiques intégrées». «Nous attendons que la déclaration gouvernementale soit en harmonie avec l’esprit et les dispositions de la Constitution, les engagements du Maroc en tant qu’Etat partie à la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et avec les aspirations des Marocaines à la liberté, à la dignité et à l’égalité qui sont les principaux piliers de la citoyenneté et de l’édification de la démocratie», peut-on lire dans cette missive des féministes marocaines adressée au leader islamiste Abdelilah Benkirane. Inquiétudes donc sur le programme gouvernemental en cours d’élaboration mais aussi de grosses interrogations chez les activistes de l’ADFM, une association qui a accompagné  depuis plus d’un quart de siècle les luttes pour la défense et la promotion des droits des femmes. Que va devenir l’agenda gouvernemental de l’égalité approuvé en mars  2011 par le gouvernement Abbas El Fassi sur proposition de la ministre de tutelle, Nouzha Sqalli ? «Cet agenda est un seuil minimal et point de départ pour l’harmonisation des lois discriminatoires en vigueur», font valoir celles du mouvement féminin tout en demandant avec force au gouvernement Benkirane de prendre «les mesures législatives, réglementaires, financières et éducatives requises pour éradiquer les discriminations et violences fondées sur le genre et pour promouvoir la culture de l’égalité et la pleine citoyenneté pour les femmes». Et en attendant, une campagne  «Un million de signatures» pour l’égalité de la femme et de l’homme au Maroc a été lancée sur la Toile. Sur la page d’accueil, on y voit une seule photographie, et elle se passe de tout commentaire, la photo du gouvernement post-nouvelle Constitution, 29 hommes et une femme.


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