Warren Buffett, “l'oracle” milliardaire qui se voulait simple mortel

Les méthodes de management de Buffett? Déléguer le plus possible tout en gardant la main sur les capitaux


Samedi 4 Mai 2019

Légende, icône, gourou: Warren Buffett a la réputation d'être un investisseur sans égal et la troisième fortune du monde pour le prouver... en toute simplicité.
Toujours habillé en costume classique tranchant avec des cravates colorées, M. Buffett, 88 ans, a réussi à développer, grâce à une communication savamment orchestrée, une personnalité accessible.
L'admiration vire au culte: des dizaines de milliers de personnes ayant investi dans son empire Berkshire Hathaway font tous les ans le traditionnel pèlerinage à Omaha (centre), sa ville natale, pour boire ses paroles, lors de l'assemblée générale de son entreprise.
"Il a les pieds sur terre", dit à l'AFP David Kass, professeur de finances à l'Université du Maryland et auteur d'un blog dédié à M. Buffett.
"Il y a un côté héros populaire", sourit Gregori Volokhine, gérant de portefeuille chez Meeschaert Financial Services.
"L'oracle d'Omaha" n'hésite pas à clamer son amour pour la malbouffe. Il mange des nuggets de poulet de McDonald's au moins trois fois par semaine, grignote des chips, prend de la glace en dessert et avale cinq canettes de coca-cola par jour.
Il vit toujours dans la même maison, à Omaha, achetée en 1958.
On ne connaît pas d'excès à ce père remarié de trois enfants.
"Je n'ai pas besoin de vêtements chics. Je n'ai pas besoin de haute cuisine", avait confié à CBS en 2013 le milliardaire aux sympathies démocrates et qui se plaint fréquemment de ne pas payer assez d'impôts.
Warren Buffett symbolise pour beaucoup la réussite dont on peut être fier, au moment où se creusent les inégalités sociales, entraînant le rejet des plus riches.
Il s'est engagé à donner l'essentiel de sa fortune à des oeuvres caritatives --notamment à la fondation de son ami Bill Gates avec qui il aime à jouer au bridge--, une promesse suivie depuis par de nombreux milliardaires américains.
"Quand on m'a diagnostiqué mon cancer de la gorge, il m'a appelé et m'a aidé à comprendre ce que je traversais", raconte à l'AFP Jamie Dimon, le PDG de JPMorgan Chase, qui l'appelle son "ami et mentor".
Warren Buffett est un homme discret et secret, qui s'est entouré d'un petit noyau de fidèles, dont son ami et partenaire en affaires de toujours Charles Munger, 95 ans.
Ses amis, comme Jamie Dimon, le décrivent comme enjoué, plein d'esprit, direct, drôle, sensible aux critiques et n'aimant pas les conflits.
"Il choisit les mots et les images qui vont rester dans les têtes, comme des fables grecques, des images de contes de fées... ça lui permet de faire rapidement passer son message sans verbiage", résume Alice Schroeder, dont la biographie, "The Snowball", a suscité l'ire du milliardaire.
Ainsi dans sa dernière lettre aux actionnaires, M. Buffett évoquant les sociétés de son empire écrit: "Une petite partie de nos arbres sont malades et ne seront probablement pas en vie dans une décennie. Beaucoup d'autres sont toutefois appelés à grandir et à fleurir".
Warren Buffett est né le 30 août 1930 à Omaha, dans une famille de classe moyenne. Cadet d'une fratrie de trois enfants, il montre vite de l'intérêt pour les affaires après avoir lu le livre "One Thousand Ways to make $1000" (mille manières de gagner 1.000 dollars).
Il envisage d'abandonner ses études mais face au veto de son père, parlementaire, il entre à 17 ans à l'école de commerce de Wharton en Pennsylvanie (Est). Recalé ensuite par Harvard, il intègre l'Université Columbia à New York, dont il décrochera un master en économie en 1951.
Il commence une carrière à Wall Street mais fonde dès 1956 sa société d'investissement, Buffett Partnership, qu'il fusionnera ensuite en 1965 avec le groupe textile Berkshire Hathaway.
En cinquante ans, il a transformé cette société en un conglomérat valant plus de 530 milliards de dollars et a acquis la notoriété avec ses placements financiers dans des valeurs sûres.
Ses activités s'étendent des peintures aux chemins de fer en passant par les produits de consommation, l'énergie, l'habillement, la banque, le transport aérien ou encore la restauration rapide.
Apple, JPMorgan Chase, Coca-Cola, American Express, autant de joyaux américains où on retrouve sa patte. Sa grande fierté: l'assureur Geico, connu pour sa mascotte - un lézard à l'accent britannique.
S'il a boudé Google, Amazon, Facebook ou Uber, il n'hésite pas à voler au secours des fleurons américains, comme il l'a fait pour Goldman Sachs au moment de la crise de 2008.
"Il croit en l'Amérique", résume Jamie Dimon.
Ce côté preux chevalier a failli ruiner sa réputation: en 1987, il investit lourdement dans la banque Salomon Brothers, avant qu'elle ne se retrouve quatre ans plus tard au centre d'un scandale financier.
Ses méthodes de management? Déléguer le plus possible tout en gardant la main sur les capitaux.
Sous cet air bonhomme se cache également un homme d'affaires impitoyable. Les ketchup Heinz, dont il est, depuis 2015, un des principaux actionnaires, ont récemment massivement licencié pour préserver leurs bénéfices. 


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