Venezuela : Aux sources de la corruption


PAR Gustavo Coronel *
Mardi 29 Mars 2011

En 1998 Hugo Chávez devenait Président du Venezuela avec la promesse d'éradiquer la corruption. Le Venezuela avait été une vitrine démocratique du Sud de 1958 au début des années 1970. Mais après l’afflux de revenus énormes du pétrole vers le milieu des années 1970, la qualité du gouvernement s'est détériorée, entraînant gaspillages et corruption. En 1998, la plupart Vénézuéliens étaient profondément déçus et souhaitaient un changement radical. Ils l'ont eu avec Hugo Chávez, mais n’avaient pas imaginé que le changement allait être pire.
Au cours des 13 années de règne de plus en plus autoritaire d’Hugo Chávez, la gestion de notre richesse nationale est passée d’insatisfaisante à chaotique. Environ un milliard de dollars de revenu national ont disparu en coûteux projets improvisés, souvent distribués en aumônes aux Vénézuéliens ou pour acheter l'influence politique de Chávez à l’étranger.
Pendant le règne de Chávez deux des principales mesures de la corruption, l'incidence (le nombre de cas de corruption) et l'intensité (les montants en jeu), ont été les pires de l'histoire vénézuélienne. L'indice de perception de la corruption établi chaque année par Transparency International classe le Venezuela parmi les douze pays les plus corrompus dans le monde en 2010.
L'intensité de la corruption dans le Venezuela de Chávez a une forte composante politique et sociale, en plus de l'aspect purement financier. La conversion du Venezuela démocratique en un «État voyou» s’est basée sur des violations systématiques de la Constitution et des lois et sur l'élimination progressive des contrôles et contre-pouvoirs administratifs et institutionnels. Transparence et reddition de comptes ont disparu. Les procédures démocratiques ont cédé la place à un système dans lequel un homme prend toutes les décisions et en informe la nation par la suite.
La corruption est, sans doute, la seule composante du système politique de Chávez qui soit devenue plus « démocratique ». En contraste avec les dictatures du passé, lorsque l'exercice de la corruption était l'apanage d'une élite, Chávez a permis à une masse importante de partisans de participer à des degrés divers à la piñata de l'argent, des terres et des ressources de la nation.
Des quantités importantes d'argent ont été distribuées à de vastes segments de la population. Bien que cela explique la popularité durable de Chávez, une telle stratégie n'a servi qu'à accroître le nombre de Vénézuéliens dépendant d’un gouvernement paternaliste, incapable de se débrouiller par eux-mêmes. Des solutions structurelles à la pauvreté et à l'ignorance ne sont pas au programme.
Une nouvelle classe sociale corrompue est apparue en remplacement de la classe moyenne vénézuélienne traditionnelle, composée d'entrepreneurs ayant des contrats avec le gouvernement, des parents et amis de personnes ayant une position de pouvoir, d’agents de la force armée et des membres de la bureaucratie gouvernementale.
Aujourd'hui, la plupart de la corruption est généré dans quatre foyers principaux:
Le palais présidentiel
de Miraflores, centre
d'opérations du
 Président Chávez
Ici, la nature de la corruption est essentiellement politique même si beaucoup d'argent est conservé dans les locaux, à utiliser selon les nécessités. La légèreté avec laquelle est traité l’argent est illustrée par le journaliste Nelson Bocaranda comme suit : « En Octobre 2010 des gardes du corps cubains ont été envoyés à la banque centrale pour récupérer cinq millions de dollars en numéraire pour un voyage de Chávez à l'étranger. Cet argent n'est jamais arrivé à Miraflores, situé seulement à deux pâtés de maisons ». Il n'a jamais été retrouvé.
Miraflores est l'endroit où les violations de la constitution sont décidées et où le président exerce ses abus de pouvoir. Les règlements électoraux sont modifiés pour favoriser le gouvernement. C'est l'endroit où les Cubains contrôlent les questions sensibles de renseignement. C'est là où est alloué le financement illégal des dirigeants amis dans l'hémisphère et que les alignements sont établis avec les dictatures fraternelles en Biélorussie, Syrie, Iran, Libye ou Zimbabwe.

In La Campiña, le siège de Petroleos de Venezuela, PDVSA
Les bureaux centraux de Petroleos de Venezuela, dans la partie orientale de Caracas abrite le conseil, la planification et les agents financiers principaux de la société.
PDVSA n'est plus une compagnie pétrolière, mais un agglomérat incohérent de différentes activités qui vont de l'importation et la distribution de nourriture à l'entraînement des athlètes. La corruption est principalement générée sous la forme de contrats sans appel d'offres qui sont octroyés à des amis du régime. Les pots-de-vin sont habituels. Le gouvernement ignore sans vergogne les scandales majeurs et mineurs de PDVSA, tels que la contractualisation de la machine de forage offshore Aban Pearl à une société fantôme ou l'utilisation illégale de la Caisse de retraite des employés à des fins spéculatives. Le président de la société est un menteur pathologique qui a systématiquement détourné des fonds de PDVSA vers la direction, pour des activités sans reddition de comptes.

Le ministère de la Défense et la Garde
nationale
Un rapport du US Government Accountability Office devant le Congrès américain a informé de la corruption croissante au sein de l'armée vénézuélienne, en particulier la garde nationale. La corruption, selon le rapport, a atteint le niveau ministériel. En particulier, les liens de l'armée vénézuélienne et les FARC ont été clairement établis, comme le prouve le contenu de l'ordinateur portable appartenant au défunt chef des FARC, Raul Reyes.
La corruption de l'armée vénézuélienne a conduit le gouvernement US à considérer trois membres du gouvernement comme barons de la drogue « fournissant un soutien matériel aux FARC ». Ces trois personnes, les généraux Henry Rangel Silva et Hugo Carvajal et l’ancien ministre de l'Intérieur Ramon Rodriguez Chacin sont encore membres du cercle proche de Chávez. En fait, Rangel Silva a récemment été promu au grade le plus élevé. Le Venezuela est non seulement un petro-État mais devient un narco-Etat.

Le ministère des Finances
La gestion des finances vénézuéliennes pendant le régime de Chávez a été très irrégulière, et c'est un euphémisme. Jouant avec des taux de change doubles, les agents du ministre des Finances associés aux banquiers et courtiers sont devenus instantanément millionnaires. Des fonds parallèles manipulés sans transparence, en dehors des lois et réglementations de la nation ont favorisé une hyper-corruption. En éliminant l'autonomie de la Banque Centrale du Venezuela, les réserves internationales ont été détournées vers les mains de l'exécutif, pour être utilisées à des fins politiques.
Treize ans et un billion de dollars plus tard, le régime de Hugo Chávez s'est avéré être le pire cauchemar du Venezuela. Nous poussons aujourd’hui à nouveau pour le changement. Si nous avons appris notre leçon, nous devrions être beaucoup plus prudents cette fois-ci.

 * Représentant vénézuélien
de Transparency International de 1996 à 2000 et auteur d’une étude du Cato Institute sur la corruption au Venezuela


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