“Mica” ou l’histoire d’une enfance privée de rêve


Chady Chaabi
Mercredi 22 Décembre 2021

“Mica”, le dernier long métrage d’Ismaël Ferroukhi, sorti en salle aujourd'hui, nous plonge dans un univers où cohabitent le mal et le bien, l’espoir et le désespoir. Un dualisme prégnant tout le long du long, reflété par une quête impossible, et à l’image d’une société marocaine où se confondent des individus appartenant à des classes sociales diamétralement opposées, mais qui, au bout du compte, convergent vers un seul et même désir. Celui d'une meilleure vie.

Dans ce film produit par Lamia Chraïbi (La Prod), on commence tout en bas pour finir tout en haut avant d'être violemment projeté à terre. Mica, interprété parle novice et non moins talentueux Zakaria Inan, est contraint de quitter son bidonville, afin d’épauler financièrement sa famille en travaillant dans un club de tennis casablancais. Des institutions creuset de ce que la société marocaine a de plus détestable à offrir, et à l'extrême opposé de leur devoir d’éduquer. Animé par une volonté de dévier le cours de son destin, Mica, dépeint comme un gamin vaillant, courageux et surtout teigneux, s’éprend de la petite balle jaune. Son talent brut saute aux yeux de Sophia.

L’excellente Sabrina Ouazani, dans le rôle d’une ex-championne, va prendre Mica sous son aile pour ne plus le lâcher. Du moins jusqu’au jour où il a foulé la terre battue pour finir sur une terrible déception.C’est lâ toute l’incompréhension qui vous envahit en sortant de la salle. Pourquoi Mica a-t-il surmonté autant d'obstacles pour finir à terre, défait et déçu, après avoir abandonné son rêve d'émigrer à l’étranger? De toute évidence, à vouloir courir deux lièvres à la fois, Mica a tout perdu, son travail et ses rêves, autant que le scénario a perdu en intensité. Des chutes de tensions surviennent à plusieurs reprises, renforçant notre incompréhension quant aux messages véhiculés par le film. Est-ce qu’il faut poursuivre ses rêves coûte que coûte ? Ou bien faut-il laisser tomber car il y a des causes perdues d’avance ?

Une chose est sûre, si le sport, en l'occurrence le tennis, s’est révélé être un vecteur idéal pour mettre le doigt sur des maux de société affligeants et d’actualité, comme le travail des mineurs, le scénario souffre par moments d’un manque de fluidité, alimenté par des quêtes secondaires et des séquences sans grand intérêt scénaristique et encore moins esthétique. Le parallélisme très présent entre la précarité de Mica et le confort des gamins adhérents au club de tennis aurait gagné en puissance avec un zeste de subtilité. Un enfant qui se croit supérieur à un autre parce que son père est propriétaire du club de tennis, c’est un cliché mais tellement vrai.

Les gamins dans le film étaient de vraies têtes à claques, vous en conviendrez certainement. Tout comme le minimalisme du découpage technique. Ce n’est pas forcément péjoratif. Des fois c’est aussi un avantage, en mettant la technique au service de l’histoire. Les plans cadrés à l’épaule avec un objectif de la caméra très proche des protagonistes, amplifient les émotions renvoyées par le grand écran pour nous rapprocher un peu plus de l’état d’esprit des acteurs. Les points de vue subjectifs ont apporté un vent de fraîcheur à une réalisation volontairement classique. Enfin, on ne peut oublier que ces points forts techniques ont été malheureusement contrebalancés par une bande-son beaucoup trop souvent en décalage émotionnel avec les séquences qu’elle est censée magnifier.


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