Intempéries : La “musique des cimes” cède la place au ballet des orages


MOSTAFA Louizi (MAP)
Mercredi 30 Septembre 2009

Bien avant que la musique des cimes n’entame, vendredi soir, ses rythmes et chants envoûtants à Imilchil, les orages du Haut Atlas ont insisté à être de la fête. Pour atteindre Imilchil, il faut passer par la petite ville de Rich. Sur cette distance escarpée, les 38 km à parcourir semblent s’allonger, et la route devient tout simplement périlleuse. Les rayons de soleil qui pointaient au petit matin sur la vallée du Haut Ziz étaient trompeurs.
Les festivaliers empruntant cette route sinueuse roulaient comme dans une course contre la montre. Conduire au plus vite pour éviter l’orage. En vain. Plusieurs visiteurs se sont trouvés menacés par les eaux, la grêle et les crues. La peur et la panique se chargeant du reste.
Les premières pluies cachaient mal la tempête. Derrière ces hauteurs rocailleuses, les nuages s’amoncelaient, en faisant régner une couleur grisâtre. Alors que l’horloge du léger véhicule signalait midi et demi, l’apparence extérieure donnait l’impression qu’on est au coucher de soleil. On frisait le noir. Les gouttelettes qui ont commencé à s’abattre sur la localité d’Amouggar deviennent intenses. La pluie redouble de cadence et la grêle transforme le bitume en long tapis blanc. Son choc sur le pare-brise provocant un terrible brouhaha. Les essuie-glaces ne servent plus à rien, avec une visibilité rétrécie. Et pourtant, pas question de s’arrêter. Il faut surtout rester à l’abri des crues et des eaux à débit élevé en provenance des ravins.
Et puis, une attention particulière doit être accordée aux roches qui tombent d’en haut ! Seul Ziz, maître des lieux, décide quand on doit s’arrêter obligatoirement. Il a occupé tout son lit. Son débit est fort. Impossible de traverser. Rien à faire, sinon maîtriser sa panique et attendre une baisse du niveau des eaux.
L’on s’arrête de penser à autre chose. Rien n’a plus la même importance.
Même mûres et fraîches, les pommes verdâtres et rouges à portée de main n’ont plus le même attrait. Un coup de téléphone même anodin devient aussi une éventuelle issue.
La frayeur que l’on ressent ne s’estompe qu’une fois arrivé au plus proche Ksar. Là, tout le monde voudrait vous prêter main forte. Hospitalité berbère oblige.
“Vous avez de la chance”, disent nos hôtes-, parfois en mots, parfois par le regard. Et si votre sort vous emmène chez des enseignants, vous allez vérifier sur place tous les dires ressassés sur l’enseignement dans le monde rural. Du préfabriqué ne résistant pas aux pluies diluviennes qui s’infiltrent du toit, ni aux vents forts endommageant ce qui faisait office de fenêtres.
Le soir, les rythmes de la “Musique des cimes” n’arrivent pas à vous faire oublier le ballet des orages prévu le lendemain. Si le festival initié par le Centre Tarek Ibn Zyad s’achèvera samedi soir, les services de la météorologie sont catégoriques : les orages ne vont cesser qu’en début de semaine.
Au retour, vous n’allez jamais croire que vous avez frisé une mort certaine.
Vous vous rendez compte de l’ampleur de la situation. Toutes ces crues que vous n’avez pas voulu ou que vous n’avez pas eu le temps de voir sont encore là.
Entassées sur le bas-côté, elles vous racontent votre propre histoire... et aussi votre propre cauchemar. Sans exagération aucune. Et si par malice vous avez pu vaincre les orages en parcourant les 138 km au petit matin, ce n’est que partie remise. Toutes ces pluies d’en haut vous donnent rendez-vous à Oued Essaleh, près de Karandou. Seule consolation peut-être, c’est que là vous n’êtes pas seul. Vous vous rangez parmi des dizaines d’usagers de la route.
Le niveau des eaux de pluie peut diminuer en une heure ou une heure et demie au maximum, mais pas ces éboulements de pierres qui tombent des collines situées à l’entrée de la ville d’Errachidia. Ici, on ne peut attendre plus longtemps. Les conducteurs doivent se frayer, autant que faire se peut, leur propre chemin. Retrouver les siens après tant d’épreuves reste la meilleure consolation.


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