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Face au coronavirus, la mafia italienne plie mais ne rompt pas

La mafia a l'habileté de savoir utiliser ce qui semble une menace pour le transformer en opportunité


Lundi 30 Mars 2020

Face au coronavirus, la mafia italienne plie mais ne rompt pas
La mafia italienne est comme "le roseau qui plie mais ne rompt pas", elle s'adapte à la crise provoquée par la pandémie de Covid-19: le général des carabiniers Giuseppe Governale ne se fait pas d'illusion.
Ce Sicilien de 62 ans était l'ancien commandant des carabiniers dans son île. Il est actuellement le patron de la Direction des enquêtes anti-mafia (DIA), qui coordonne et chapeaute toutes les enquêtes en Italie sur le crime organisé.
"L'expérience nous dit que la mafia italienne a l'habileté de savoir utiliser ce qui semble une menace pour le transformer en opportunité", explique-t-il à l'AFP.
"Les mafieux adopteront le mode de survie de la mafia dans les moments difficiles, que l'on peut résumer par: le roseau plie mais ne rompt pas. La mafia part du principe que c'est un moment passager qu'il faut supporter en faisant moins d'affaires, mais elle regarde déjà avec attention le début du processus de reconstruction économique", met en garde l'officier supérieur.
"Que peut-on prévoir? Que le moment difficile pourrait se terminer en mai-juin, après quoi les économies italienne, française, allemande, devront repartir. Et c'est là que la mafia va chercher à s'immiscer car dans les périodes de reconstruction, on regardera un peu moins les procédures bureaucratiques", prédit le patron de la DIA.
"Ils chercheront les failles du système. La reconstruction économique après le coronavirus sera un très grand événement, il y aura énormément d'argent qui va circuler et notre objectif sera de trouver l'équilibre entre les exigences de la reconstruction et la lutte contre l'infiltration mafieuse", précise le général.
"Nous sommes conscients qu'il y aura des tentatives d'infiltration, la mafia a toujours un coup d'avance, elle prépare certainement déjà des plans pour profiter de cette situation, mais nous avons nous aussi un plan ad hoc contre eux", a assuré M. Governale.
"Mon travail de procureur est plus difficile en ces temps de coronavirus et les procès de centaines d'accusés (de délits mafieux, ndlr) sont à l'arrêt", déclare à l'AFP Nicola Gratteri, procureur de Catanzaro, chef-lieu de la Calabre, terre de la puissante 'Ndrangheta.
Les procès en Italie sont à l'arrêt depuis le début de l'épidémie de Covid-19, la justice ne traitant que les cas les plus urgent.
Le journaliste Roberto Saviano, auteur du livre "Gomorra" sur la Camorra, la mafia napolitaine, qui a donné naissance à une série du même nom, estime que "la pandémie est une situation idéale pour la mafia pour un motif simple".
"Quand tu as faim, tu cherches du pain et tu ne regardes pas qui te le donne; si tu as besoin d'un médicament, tu le payes sans regarder qui te le vend, tu le veux et point final", écrit-il dans le quotidien La Repubblica.
"Parmi les acteurs de ce nouveau départ il y aura aussi, malheureusement, la mafia", renchérit dans un article dans le quotidien La Stampa Giuseppe Pignatone, procureur général de Rome jusqu'en mai 2019 quand il a pris sa retraite.
La mafia va d'abord chercher "l'expansion dans les secteurs où elle est traditionnellement présente" comme le bâtiment ou la gestion des ordures, puis elle va financer de petits entrepreneurs qui auront alors les mains liés puis elle cherchera "à s'infiltrer dans la réalisation des ouvrages et infrastructures nécessaires (...) financés par de très importants investissements publics", assure-t-il.
Trois hommes, dont deux témoins dans des procès contre la mafia, mettent en garde eux aussi, dans une lettre ouverte au président de la République Sergio Mattarella, contre le danger que les petits entrepreneurs, à court d'argent en raison de la crise provoquée par le coronavirus, se tournent vers la mafia pour obtenir de l'argent frais leur permettant la poursuite temporaire de leurs activités.
Les petits entrepreneurs pourraient "dans un geste désespéré" se tourner vers les seuls "disposant en ce moment d'importantes liquidités, les membres de la criminalité organisée qui est toujours prête à faire des affaires sur le dos des entrepreneurs sans oxygène financier et sans perspectives certaines de reprise" économique, écrivent les trois hommes.


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