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Entretien avec Rachida M' Faddel autour de «Canada, aller simple» : “Mon roman est inspiré de récits réels”

Vendredi 19 Février 2010

Entretien avec Rachida M' Faddel autour de «Canada, aller simple» : “Mon roman est inspiré de récits réels”
Rachida M'Fadel, journaliste et auteur, s'est installée au Québec il y  a neuf ans et y a écrit son premier roman. Après sa
parution au Canada, son
deuxième roman « Canada, aller simple » vient de paraître, aux éditions Le Fennec. Cet ouvrage témoigne d'une autre réalité de l'immigration et lève le voile sur le mirage canadien,  considéré souvent comme modèle idéal d'intégration.

Libé : Qu'est-ce qui vous a poussée à écrire ce livre ?

Rachida M'Faddel : Ce sont les découvertes que j'ai faites en arrivant au Québec, surtout les difficultés pour les Maghrébins, et pour tous les nouveaux arrivants, de trouver du travail. J'ai été également très étonnée par le taux de divorce dans notre communauté, près de 50% ! Ensuite,  il y avait des  problèmes par rapport aux médecins que l'on n'arrivait pas à avoir alors qu'au Maroc il y a un médecin presque à tous les coins de rue ! A partir de là j'ai mené l'enquête. J'ai notamment parlé à des chauffeurs de taxi qui avaient des diplômes d'ingénieurs, de médecins afin de comprendre comment ils en étaient arrivés là.

Quelles sont les difficultés principales auxquelles les migrants sont confrontés en arrivant ?

Principalement, la fracture qui se forme au sein du couple, car quand on est au Maroc il y a toujours l'entourage immédiat. Or en arrivant au Québec,  le couple est seul : finies les ambiances festives. Nous sommes confrontés à de nouvelles valeurs que l'on doit accepter et surtout comprendre. Tout cela demande  du temps. Le couple doit être fort pour surmonter les problèmes. Malheureusement, le plus souvent, la femme accepte n'importe quel travail mais  en contrepartie  ne peut plus s'occuper des enfants et assurer la gestion quotidienne du foyer. Or le mari ne parvenant pas à trouver un travail à la hauteur de ses qualifications, reste à la maison, mais  tellement déprimé, il ne fait rien. Les enfants basculent car ils sont livrés à eux-mêmes. Petit à petit, l'écart se creuse jusqu'au divorce.  Il y a également d'autres embûches pour  trouver un médecin traitant, ou les hôpitaux qui sont toujours bondés.

Pourtant, le Canada est souvent vanté pour ses structures d'accueil destinées aux nouveaux arrivants. Qu'en est-il en réalité ?

Les structures d'accueil existent bel et bien et elles sont excellentes, contrairement à la France par exemple. Le problème résulte des choix des migrants eux-mêmes. Beaucoup ne veulent pas aller aux séances de formation, tout simplement parce que cela demande du temps. Lorsque vous arrivez dans un nouveau pays, la priorité est de trouver du travail. Or sans la fameuse « expérience québécoise » vous n'avez aucune chance. Aujourd'hui, je conseillerai aux gens d'aller se former, à la fois pour bénéficier d'un réseau mais également pour avoir un savoir-faire et une meilleure connaissance du pays. Il y a également la difficulté de la langue, notamment la barrière de l'anglais. Imaginez : même pour être concierge, il faut être bilingue ! Bien que les migrants soient prévenus, c'est toujours un choc de constater que la majorité des Québécois sont anglophones avant tout. C'est pourquoi les mises à niveau sont quasi-indispensables.
Par ailleurs, d'autres familles ne veulent pas faire directement appel à l'aide sociale en arrivant, pour des saisons de fierté. Cependant, il y a des avancées positives, car un réseau se met progressivement en place pour les Marocains du Canada, et puis les jeunes se font une place plus facilement aujourd'hui.

L'histoire de Nabil et Samia est-elle inspirée de votre histoire personnelle ?

Non, elle n'est pas inspirée directement de mon histoire mais de récits de vie réels. Au départ, je voulais faire un essai, puis je me suis dit que l'histoire de ce couple parlait plus aux gens, car elle est triste et bouleversante. Finalement, il existe beaucoup de Nabil et Samia au Canada !

Que conseilleriez-vous à nos ressortissants désireux de s'établir au Canada, ou ailleurs ?

L'immigration au Canada peut être favorable aux enfants, car elle leur permet un bilinguisme qui est un atout majeur. Je conseillerai simplement à toutes les personnes désireuses d’émigrer de bien se renseigner. Il faut savoir toutes les choses à ne pas faire. Avant d’émigrer, il faut toujours un plan B ! L'herbe n'est pas toujours plus verte ailleurs. Le Maroc est aujourd'hui un pays en plein progrès, et beaucoup d'Européens viennent s'y installer.  Pour ma part, j'ai écrit ce livre en me disant: « C'est l'ouvrage que j'aurais aimé lire avant d'arriver au Québec. » L'avantage du système canadien, c'est que dans ce pays, chacun garde son identité propre et n'a pas besoin de s'assimiler. Le citoyen reste ce qu'il est avec son identité plurielle. 

Propos recueillis par Sofia Aliamet

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1.Posté par Mostafa le 19/02/2010 20:20
Bonjour,
Je remercie libé, d'avoir abordé un sujet aussi intéressant que compliqué : la situation des Marocains au Canada.
Aussi, je voudrais féliciter l'auteur dans sa tentation de démystifier cette situation.
Par contre, je serais curieux de savoir comment on a procédé à une telle étude, je sais que la majorité des Marocains sont concentrés à Montréal, mais il y en a qui se sont établis à l'ouest, donc il faudrait intégrer aussi les autres provinces dans cette étude (Si ce n'était pas fait).
Partant de mon expérience personnelle et celle de mon entourage, je peux vous dire qu'on s'en sort très bien que ça soit au niveau de la situation économique ou de l'intégration sociale.
Pour moi l'histoire des ingénieurs de taxi et celle de la femme au boulot et le mari au foyer n'est qu'une stigmatisation et une banalisation de la situation des Marocains.
Merci et bon séjour dans notre super pays d'adoption.
Mostafa.

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