Alvaro Uribe, l'ex-président anti-guérilla condamné par la justice en Colombie


Libé
Jeudi 31 Juillet 2025

Alvaro Uribe, l'ex-président anti-guérilla condamné par la justice en Colombie
A la tête de la Colombie entre 2002 et 2010, Alvaro Uribe, déclaré lundi coupable de subornation de témoin, est une figure tutélaire de la droite dans son pays, resté populaire auprès d'une partie de l'opinion pour sa fermeté à l'égard des guérillas durant sa présidence.
Une fois au pouvoir, Uribe a tenu promesse en modernisant l'armée, lancée dans une guerre sans merci contre la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), avec le soutien financier des États-Unis dans le cadre du Plan Colombie
Aujourd'hui âgé de 73 ans, ce fils d'un propriétaire terrien est arrivé au pouvoir alors que le pays sud-américain était plongé dans un conflit sanglant entre guérillas, paramilitaires et forces étatiques.

Après des études de droit, il a été brièvement maire de Medellin, ville du nord-ouest de la Colombie dont il est originaire, avant d'effectuer deux mandats de sénateur de 1986 à 1994 puis de devenir gouverneur d'Antioquia, la deuxième plus grande province de Colombie.

Petit homme aux lunettes fines et aux cheveux blancs, ce catholique pratiquant, au ton posé, est arrivé au sommet de l'Etat en 2002 avec un discours radical promouvant la "sécurité démocratique".

Une fois au pouvoir, il a tenu promesse en modernisant l'armée, lancée dans une guerre sans merci contre la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), avec le soutien financier des Etats-Unis dans le cadre du Plan Colombie.

Alvaro Uribe accuse cette guérilla marxiste d'avoir assassiné son père lors d'une tentative d'enlèvement ratée.
"L'heure de la défaite totale est arrivée pour ces bandits", a déclaré le dirigeant en 2003.

Sous ses gouvernements, l'armée a porté de nombreux coups aux guérilléros sans toutefois les éradiquer, se déployant sur de nombreux axes routiers, abattant ou capturant plusieurs chefs des Farc et libérant des otages dont la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt.

"Uribe a su exploiter la peur que la société colombienne ressentait face à la violence et l'insécurité pour légitimer un projet politique basé sur une politique de fermeté de la part de l'Etat", relève Laura Wills-Otero, politologue de l'Université des Andes.

Alvaro Uribe a également été l'artisan d'un accord de paix avec les paramilitaires des AUC, des milices d'extrême droite accusées d'exactions, conduisant à la démobilisation de 30.000 combattants.

Une réforme constitutionnelle controversée lui a permis de se faire réélire et de rester à la présidence pendant huit années consécutives.

En 2010, le dirigeant a dû se résoudre à abandonner le pouvoir après une décision de justice empêchant un référendum qui lui aurait permis de briguer un troisième mandat consécutif.
Ses détracteurs le qualifient d'autocrate et lui reprochent de ne pas avoir réussi à résoudre les problèmes sociaux dans un pays frappé par la pauvreté.

Les gouvernements d'Alvaro Uribe ont également été vivement critiqués pour les violations des droits de l'Homme attribuées à l'armée, accusée de milliers d'exécutions extrajudiciaires, et pour les liens entre la majorité conservatrice et les paramilitaires d'extrême droite, accusés d'avoir infiltré de nombreuses institutions colombiennes.
 
Loin de renoncer à la politique après ses mandats de président, M. Uribe est retourné au Parlement. En 2018, il est devenu le sénateur le mieux élu de l'histoire colombienne et a promis de servir le pays "jusqu'au dernier jour" de sa vie.
Malgré des scandales de corruption, d'espionnage et de liens avec des paramilitaires qui impliquent son entourage, sa popularité - avoisinant les 80% pendant sa présidence - était encore de 52% en mars, selon un sondage Bloomberg.

Figure centrale de la droite moderne en Colombie, à la tête du parti Centro Democratico, Alvaro Uribe a contribué à l'élection de son successeur, le prix Nobel de la paix Juan Manuel Santos (2010-2018), qu'il a ensuite accusé de trahison pour avoir négocié un accord de paix avec les Farc en 2016.

En 2014, l'ex-président a pris les rênes de l'opposition depuis le Sénat et a orchestré l'élection de son protégé Ivan Duque (2018-2022).

Depuis, il a réuni des soutiens autour de son rejet de l'accord avec les Farc et à ses critiques envers le premier gouvernement de gauche de Colombie, dirigé par Gustavo Petro depuis 2022.
Amateur de chevaux, le politicien, qui a survécu à 15 attentats, est constamment escorté par un imposant service de sécurité et reste discret sur sa vie de famille.

Ses deux fils sont des entrepreneurs prospères, soupçonnés d'avoir tiré profit de la présidence de leur père pour accroître leur fortune.

Lundi, il est devenu le premier chef d'Etat colombien à être déclaré coupable par la justice de son pays. 


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