​Ces commissions universitaires fermées qui font jaser

Copinage, favoritisme ou intermédiation joueraient-ils quelque rôle dans la désignation à des postes de responsabilité ?


Par Omar Cherkaoui
Jeudi 7 Mai 2015

​Ces commissions universitaires fermées qui font jaser
Après des décennies d’expérimentation de différentes réformes, notre Université a connu des avancées essentielles tout en recherchant à être compétitive et contribuer réellement au développement du pays en étant le lieu de la recherche, de la créativité, de l’innovation et de l’ouverture des esprits. 
Pour s’adapter aux transformations de toutes natures qui touchent notre société, on est en train d’accroître la production de compétences pour donner aux citoyens la capacité de comprendre ces transformations et les moyens intellectuels pour y faire face. 
L’enseignement supérieur est aujourd’hui considéré comme un investissement, comme un facteur de compétitivité, à la fois parce qu’il détermine la qualité de la formation du citoyen et aussi parce qu’il participe à l’effort de recherche. Aujourd’hui, tous les acteurs essayent de faire plus et mieux dans le domaine de la recherche, la créativité et l’innovation. 
Au moment où l’Etat est appelé à se délocaliser à l’échelon régional, à intervenir davantage dans la régulation du système économique, un autre modèle de croissance basé sur la connaissance et la compétence se dessine, d’autant que l’investissement dans l’enseignement supérieur et la recherche est un choix rentable. 
La mue que doit connaître l’Université est donc de forger des profils armés d’une solide formation à même de les pourvoir en connaissances, qualifications et comportements et de développer leur capacité à évoluer de façon autonome à l’intérieur du marché du travail, de façon à réaliser le potentiel qu’ils ont en eux. Pour cela, il y a lieu de disposer d’enseignants capables de munir les étudiants d’autres aptitudes : l’ouverture d’esprit, la polyvalence, la capacité à s’adapter, à communiquer, à convaincre. En somme, il faut passer de la transmission d’une logique de la connaissance à la transmission d’une logique de la compétence et il est urgent d’agir sur les ressources humaines. Car ce sont les hommes qui font les moyens et non l’inverse...
Paradoxalement, l’Université qui est par définition le lieu de l’éducation, de la connaissance, de la recherche de la performance et de l’excellence est également le lieu de certaines pratiques étrangères et diamétralement opposées à l’esprit universitaire.
Nombreux sont ceux qui s’indignent de la prolifération de ce qu’ils qualifient de « coups bas », calomnies, magouilles et autres « peaux de banane » utilisés par certains dans leur course aux postes de responsabilité à la tête d’établissements universitaires. 
Au Maroc, nous sommes aujourd’hui, Dieu merci, entrés dans l’ère de l’égalité des chances, du mérite, des compétences, de l’esprit de compétition et de la quête de la performance. 
Ce ne sont pas, là, de simples slogans, ce sont des principes adoptés par l’Etat marocain depuis plus d’une décennie, confirmés par des textes fondateurs comme la Constitution de 2011, relayés par des Lois organiques dans divers domaines : accès aux emplois publics, finances publiques, régionalisation...
Et pourtant, au sein de l’Université marocaine, les attitudes et comportements déloyaux, lors de la compétition aux postes de responsabilité sont légion lorsqu’on ne dispose pas des armes intellectuelles, scientifiques et méthodologiques pour faire face à une concurrence loyale.  C’est malheureux pour un pays qui connaît un élan sociétal, économique et culturel considérable, de voir qu’une partie de son « élite intellectuelle » use d’artifices de ce genre pour arriver à ses fins.
Il en est ainsi, à l’occasion, et surtout à la veille, de certains concours et entretiens de candidature pour un poste de responsable d’un établissement universitaire, pour lesquels certains candidats font l’objet d’un acharnement médiatique de la part de « diffamateurs anonymes et occultes » qui inventent chaque fois des histoires pour remettre en cause la neutralité et l’objectivité de la procédure de sélection à ce genre de poste. 
L’exemple le plus récent est la publication dans le journal Al Ittihad Al Ichtiraki, dans la rubrique « Moujaz wa sirri » (Bref et Secret), en première page, d’une information sous le titre « Daoudi porte atteinte aux conditions de concurrence équitable » dont voici le contenu : 
« Nous avons appris de plusieurs sources parmi les prétendants au poste de doyen de la Faculté de droit Ain Sbaa de Casablanca dont le poste est devenu vacant depuis le 20 mars, que l’un des candidats, qui est un nouveau venu à la faculté, arrivant de Mohammedia, a utilisé sa relation avec l’un de ses anciens confrères afin de demander la médiation de ce dernier auprès de sa femme, qui est ministre du parti majoritaire pour que cette dernière intervienne auprès du ministre de l’Enseignement supérieur en sa faveur. Et en effet, selon plusieurs sources, ce dernier a été reçu par le ministre de l’Enseignement supérieur qui lui a promis le poste, ce qui a été confirmé par le candidat lui-même à beaucoup de ses collègues, déclenchant une vague d’indignation et de colère parmi les sept candidats pour le poste en raison de cette intervention préalable du ministre avant même la mise en place de la commission de sélection prévue par la loi. »
Des allégations qui seraient pour le  moins et au cas  où elles s’avéreraient indignes d’une élite intellectuelle universitaire qui se respecte et qui se doit de ne jamais verser dans la concurrence déloyale.
Il est plus que temps de mettre fin à ce genre de pratiques, et pour ce faire la solution existe, et consiste en le remplacement de l’actuelle procédure sélective par la mise en place d’une procédure élective des responsables d’établissements universitaires, chose qui a toujours été réclamée par les concernés.
Cette procédure consisterait à organiser l’entretien de sélection des candidats au poste de responsable d’établissement de manière publique et ouverte, car en travaillant de manière « fermée », la commission de sélection encourage ce genre de pratiques portées par des énergumènes qui sont prêts à inventer toute sorte de balivernes et de donner libre cours à leur imagination dans l’objectif d’écarter déloyalement ceux qui constituent pour eux de sérieux concurrents.
C’est pourquoi le département de tutelle est appelé à prendre la décision de rendre publique la séance de sélection des candidats, une séance qui doit être ouverte à toute personne désireuse d’y assister : enseignants, étudiants… car de cette façon, ce ne seront plus les rumeurs ni les fausses informations qui vont se confronter, laissant la place à la confrontation de projet contre projet, vision contre vision et Plan d’action contre plan d’action.
Ainsi organisée, cette procédure permettrait également de mesurer, en public, quel projet est le plus méritant, le plus apte et  celui qui recherche la performance par le passage d’une logique de moyens à une logique de résultat. L’attribution de la responsabilité se fera à des profils qui présentent des projets performants tenant compte des objectifs et des résultats de programmes déterminés au préalable. La performance ne sera appréciée qu’à l’aune des conditions d’efficacité, d’efficience et de qualité des projets présentés et au grand jour.
L’information étant le corollaire du principe de transparence. Ce sera donc l’occasion pour la consécration et la mise en œuvre du principe de transparence contenu dans la Constitution et dans toutes les nouvelles lois, principe qui vise à informer par l’institution du droit d’accès à l’information. Ce qui barrera la route à la désinformation dont sont victimes beaucoup d’hommes et de femmes publics.  


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