Yassir Ali : Les caricatures sont les plus sévères des critiques


Propos recueillis par Mehdi Ouassat
Jeudi 24 Juillet 2014

Yassir Ali : Les caricatures sont les plus sévères des critiques
Issu d’une famille
d’artistes, Yassir Ali est un caricaturiste tunisien, qui vit actuellement en France. Il lutte depuis quelques années pour
mettre en avant cet art, dans son pays natal.  
A travers ses dessins, il met à nu certaines
pratiques malsaines, telles
que la violence et la
corruption, tout en
évoquant l’impact du
chômage sur la société.


Libé : Pourquoi avez-vous choisi de vivre en France ?

Yassir Ali : C’était le meilleur endroit pour continuer à travailler. D’autre part, nos deux cultures ont beaucoup de choses en commun et nos plus célèbres intellectuels et artistes ont vécu en France.

C’est quoi une caricature efficace pour vous?

Là où le débat est bloqué, le dessin le débloque. Avec un bon dessin, les gens disent des choses qu’ils n’auraient pas dites si ce dessin n’avait pas existé. C’est ça la magie de cet art. C’est pour cela que beaucoup ont peur des images… La caricature suggère et contourne les interdits.

Le dessin est-il plus expressif que l’écrit?

Evidemment! Comme on dit : «Un dessin vaut mieux qu’un long discours». Pour exprimer le fond de mes pensées, j’ai opté pour la caricature car elle convient le plus à ma personnalité. A quoi bon chasser le naturel?
J’aime rigoler, tout comme j’aime voir les autres en faire autant. Avec mes amis, je n’arrête pas de m’éclater. Le rire est mon sport-roi. L’humour est l’outil captivant d’une caricature. De ce fait, les messages passent facilement à travers ce moyen d’expression.
On ne naît pas caricaturiste, on le devient. Au départ, c’est certain, il faut avoir le don mais le don à lui seul ne suffit pas. Il faut travailler sans relâche à son développement. De mon côté, je suis toujours en quête de perfection par la lecture et le travail de recherche entres autres. Je dois être à la page, donc je suis tenu de suivre l’actualité.

Il paraît que vous avez un projet de revue spécialisée.

Oui, c’est une revue mensuelle de bande dessinée. C’est un autre exercice. Le titre n’a pas encore été choisi. La revue aura par ailleurs une dimension continentale puisque des dessinateurs africains participeront au projet.

Est-ce que vous vous autocensurez?

Je fais attention aux sujets politiques, mais je ne me censure pas. Des sujets comme les religions peuvent choquer, mais la réaction n’est jamais violente. On n’a pas de tabou à ce niveau. Le plus sensible, c’est la question des ethnies, parce que chaque parti politique s’apparente à un groupe ethnique et quand on commence à rentrer dans ces débats-là, ça peut devenir houleux. On avance prudemment. D’autant plus que les caricatures sont les plus sévères des critiques

Comment voyez-vous l'évolution de l'art de la caricature en Tunisie ?

«La caricature, c'est l'oxygène de la démocratie». Malgré le manque d'oxygène depuis plusieurs années, on s'est battus, nous les caricaturistes, à l'ère de l'ancien régime, pour faire vivre cet art et pour la liberté d'expression. J'ai beaucoup critiqué, avec mes caricatures, mes personnages et portraits, la situation politique, sociale et culturelle de l'époque.
Aujourd'hui, cet art connaît, avec les jeunes, un grand essor à travers l'émergence de nouveaux supports sociaux de communication, comme Facebook.


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