VMoon, le Sud-Coréen qui croit pouvoir dire “non” à Washington


Libé
Lundi 8 Mai 2017

Le favori de la présidentielle sud-coréenne, Moon Jae-In, est un vétéran de la lutte pour les droits de l'Homme qui espère reprendre langue avec Pyongyang et croit possible de dire "non" à Washington.
Le candidat du Parti démocratique, principale formation de l'opposition, a été porté aux nues dans les sondages du fait de son implication dans les manifestations monstres de 2016 contre l'ex-présidente Park Geun-Hye, destituée pour son rôle dans un énorme scandale de corruption.
"Nos efforts pour promouvoir un pays où il fait bon vivre ont commencé lors de veillées aux bougies", a dit cette semaine l'ancien membre des forces spéciales âgé de 64 ans: "Ils doivent trouver leur issue dans les urnes."
Mme Park sera prochainement jugée pour corruption et abus de pouvoir dans cette affaire de corruption où sa confidente est accusée d'avoir profité de ses entrées pour extorquer des dizaines de millions de dollars aux grands conglomérats du pays.
Classé plutôt à gauche, M. Moon était l'ami et le directeur de cabinet du président Roh Moo-Hyun qui s'est suicidé en 2009 après l'ouverture d'enquêtes pour corruption visant des collègues proches et des parents.
"La corruption est le plus gros sujet de la vie politique sud-coréenne", explique Robert Kelly, de la Pusan National University. "Tous les présidents ont de près ou de loin été mêlés à des affaires de corruption ou de pots-de-vin."
Deux anciens chefs d'Etat, Chun Doo-Hwan et Roh Tae-Woo, ont même purgé des peines de prison pour ce motif dans les années 90.
Mais M. Moon jouit d'une image d'homme honnête, relève Kim Neung-Gou, du site Polinews, et il a "surfé sur la vague des manifestations contre Mme Park".
Il est né en pleine Guerre de Corée sur l'île de Geoje, dans le Sud du pays, d'une famille pauvre de réfugiés qui ont fui le Nord. Sa mère, raconte-t-il dans son autobiographie, vendait des oeufs dans la ville portuaire de Busan avec son bébé, lui, accroché dans le dos.
Il commence à étudier le droit en 1972 mais est arrêté et exclu de sa faculté pour avoir conduit une manifestation étudiante contre la dictature de Park Chung-Hee, le père de la présidente destituée.
Il se lie d'amitié en 1982 avec le futur président Roh et les deux hommes ouvrent à Busan un cabinet d'avocats spécialisé dans les droits de l'Homme et les droits civiques.
Tous deux sont des figures majeures du mouvement prodémocratique qui fait basculer le pays et permet les premières élections libres de Corée du Sud. Mais si M. Roh se lance en politique, M. Moon poursuit sa carrière d'avocat.
Quand le premier est contre toute attente élu président en 2002, le second le rejoint comme conseiller puis comme directeur de cabinet, et participe à l'organisation du deuxième sommet des dirigeants du Nord et du Sud qui réunit M. Roh et Kim Jong-Il en 2007.
Candidat, M. Moon a promis de réduire le pouvoir économique détenu par les conglomérats familiaux sud-coréens, les fameux "chaebols", dont les relations troubles avec le pouvoir politique ont à nouveau été exposées par le scandale Park.
Mais ses détracteurs l'accusent d'être obtus et entouré de conseillers dont les ambitions ont contribué à la division de l'opposition.
Surtout, M. Moon est accusé de manquer de poigne à l'égard de Pyongyang, en pleine période de tensions relatives aux ambitions nucléaires du Nord.
L'avocat préconise en effet le dialogue et la réconciliation avec le Nord pour calmer la situation et ramener Pyongyang à la table des négociations.
En décembre, il avait affirmé qu'une fois élu, il irait en Corée du Nord avant de se rendre aux Etats-Unis, puissance protectrice du Sud.
Interrogé sur cet étonnant positionnement, il avait expliqué qu'il voulait dire que sa priorité était de faire retomber la tension avec Pyongyang. Il s'est en outre montré plus hostile au déploiement en Corée du Sud du bouclier américain antimissiles Thaad qui provoque la colère de la Chine.
Dans un récent livre, M. Moon écrivait que Séoul devait apprendre à dire "non" à Washington, plaidant pour des relations "plus justes et plus équilibrées" avec les Etats-Unis.


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