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USA-Pakistan, partenaires et ennemis


PAR MALOU INNOCENT *
Mercredi 11 Mai 2011

USA-Pakistan, partenaires et ennemis
Au cours de la semaine dernière, la suspicion généralisée de la complicité du Pakistan avec Al-Qaïda a jeté une lumière crue sur les relations entre Washington et Islamabad. L’indignation à Capitol Hill est compréhensible, mais, il faut bien l’avouer, aussi quelque peu étrange. Car après tout, à l’exception de Tehrik-e-Taliban Pakistan et d’autres groupes militants issus des tribus, depuis des années c’est un secret de polichinelle que des éléments au sein du gouvernement pakistanais ne perçoivent pas les talibans afghans originaux, Lashkar-e-Taiba, le réseau Haqqani, et d’autres groupes spécifiques comme des ennemis, mais bien comme des atouts pour la politique pakistanaise.
Il suffit de relire les commentaires formulés par le lieutenant général Ahmed Shuja Pasha, le chef de l’Inter-Services Intelligence (ISI) du Pakistan. Il y a à peine deux ans il défendait les talibans et leur chef, le mollah Omar, dans le magazine allemand Der Spiegel:
« Ne devraient-ils pas être autorisés à penser et à dire ce qui leur plaît ? Ils croient que le djihad est leur obligation. N’est-ce pas la liberté d’opinion? ».
Bien entendu, « la liberté d’opinion » du mollah Omar exhorte les militants à traverser la frontière de l’Afghanistan voisin et tuer les troupes américaines infidèles. L’insistance de Pasha à soutenir que de telles opinions sont défendables résume bien le défi constant de l’Amérique en matière de sécurité avec le Pakistan.
Depuis le 11 septembre, le gouvernement pakistanais affirme que son armée est trop mal équipée et mal entraînée pour lutter efficacement contre son insurrection de guérilla interne. Cela peut être vrai, mais il est également clair que le militantisme dont souffre la région est en partie un sous-produit de l’ambition autodestructrice de l’armée pakistanaise visant à étendre sa portée géopolitique en Afghanistan et dans toute la région. Pour cette raison, jusqu’à ce que des éléments au sein de l’Etat pakistanais opèrent un changement fondamental dans leurs priorités stratégiques, les tentatives des États-Unis et de l’OTAN pour stabiliser l’Afghanistan resteront vaines. En outre, malgré ce que les autorités américaines voudraient croire, aucun degré de pression ou de persuasion ne fera modifier ses politiques au Pakistan, en particulier lorsqu’il s’agit de contrôler et calmer les extrémistes qu’il encourage depuis plus de 30 ans.
La dure réalité de la région est que, après le 11 septembre, plutôt que de se restructurer, le Pakistan s’est « rééquilibré » : le président et général de l’armée Pervez Musharraf et ses commandants de corps d’armée ont décidé de s’allier ouvertement aux Etats-Unis dans la «guerre contre le terrorisme» tout en préservant leurs pions en tant que protection contre l’influence indienne. En conséquence, le Pakistan est entre deux feux : d’un côté, des responsables américains descendant Islamabad en flammes pour avoir refusé de coopérer pleinement, de l’autre, des extrémistes islamistes à l’intérieur du Pakistan qui se sont retournés contre le gouvernement parce que ce dernier apporte son soutien aux États-Unis.
Dans de telles circonstances, la relation bilatérale a été marquée par un certain nombre d’épisodes mélodramatiques. Se rappelle-t-on du récent imbroglio diplomatique autour de Raymond Davis, le contractant de la CIA détenu en Janvier pour avoir tué deux citoyens pakistanais ? De même, quand l’année dernière le Pakistan a arrêté le flot des convois de ravitaillement pour la mission de l’OTAN en Afghanistan? Ou juste après que le président Obama a pris ses fonctions, quand des responsables américains eurent des convulsions à l’annonce que les talibans pakistanais n’étaient qu’à une centaine de kilomètres d’Islamabad?
Malgré tous les discours faussement rassurants sur le partenariat et la coopération, la réalité est que l’Amérique et le Pakistan ont des intérêts stratégiques concurrents. De toute évidence, les deux gouvernements ont des définitions très différentes et fondamentalement antagonistes de la « coopération conjointe ».

* (Analyste au Cato Institute à Washington DC)
Article publié
en collaboration avec
www.umondelibre.org


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