Société civile, médias et services de sécurité


Par Abdellatif Kinini
Mercredi 29 Octobre 2014

Société civile, médias et services de sécurité
Ce qui se passe actuellement au Proche-Orient, plus particulièrement en Egypte, en Libye, au Bahreïn...nous invite à reposer la question du financement étranger de la société civile et de certains des organes de presse. Et ce dans leur rapport avec la stabilité politique des pays. Autrement dit avec la sécurité, de manière générale, et les services connexes de tutelle. La question devient brûlante et soulève pour le moment des débats houleux dans la plupart des pays arabes.  Le président égyptien, en effet, a confirmé lors d’une rencontre, le 24 août dernier, avec des leaders et des agents de médias publics et privés, que le Qatar et la Turquie financent dans le monde arabe des projets médiatiques d’envergure visant à semer confusion, anarchie et déstabilisation. Il a ajouté que des millions de dollars ont été consacrés à cet effet et que de grandes sociétés d’information spécialisées ont été investies de ces missions. Un volume financier important a été élargi également, en plus des journalistes, aux intellectuels et aux créateurs artistiques pour garantir l’aboutissement efficace d’un tel projet. Le but non avoué étant évidemment de s’assurer le silence des élites par la promotion de leur compétence dans le sens de la neutralisation et la maîtrise de leur future réaction. Car le procédé est désormais connu, assimilé. Depuis le fameux Printemps arabe, on sait que des médias arabes, dont Al Jazeera plus particulièrement, travaillent à la manipulation de l’opinion publique en coordination “informelle” avec des pans de la société civile. L’objectif? Renverser les régimes arabes dits «corrompus» ou «despotes». Des structures de la société civile, dont les leaders ont nécessairement résidé à l’étranger où ils ont reçu des formations ponctuelles, une fois le processus de rébellion déclenché, reçoivent des instructions des services de renseignements des pays occidentaux, “tuteurs” de la révolte arabe en marche, et travaillent à la sombre besogne de confondre l’édifice des États. Lesdits services supervisent le mouvement complexe du «chaos créateur» générant les nouvelles donnes géopolitiques à même d’accélérer la refonte, sur de nouvelles bases, des territoires et des stratégies militaires dans l’ensemble du Maghreb et du Proche-Orient.   Au début de ce vaste projet dévastateur, le simple citoyen, trahi par l’éclat redondant des slogans de «Liberté et dignité» ne pouvait pas voir que derrière les coulisses de ce théâtre de génie démoniaque, se tenait, avec un couteau sacrifiel, un personnage assez sombre.
L’élément profanateur de ces mêmes valeurs qu’il exhibait; le bourreau des beaux espoirs, le terroriste allié des enjeux planétaires macabres, l’assassin de milliers de victimes promues à de cruels exils. Dans la mouvance complexe du Printemps arabe, personne ne pouvait savoir, par ailleurs, que Madame Hillary Clinton qui signifiait clairement en février 2011 à Hosni Moubarak de quitter le pouvoir, allait nous dire dans son livre «Hard Choices» publié cette année 2014, que c’est bien l’administration américaine qui a crée Daech (Etat islamique en Irak et au Levant). Ajoutant que cette organisation terroriste a été créée dans le but de procéder à un nouveau partage dans la région du Moyen-Orient et qu’une coordination a eu lieu à ce sujet entre Washington et les Frères musulmans pour créer un Etat dans le Sinai. Daech, Al Nosra, en Syrie, Ansar Acharia, en Tunisie et en Libye… étaient l’autre face cachée du Printemps. Que le Qatar, la Turquie et leurs partenaires des services spéciaux de certains pays occidentaux dissimulaient via une fourberie diabolique derrière les slogans éclatants portés par les vastes mouvements de jeunesse. Une jeunesse enthousiaste et rêveuse, malheureusement instrumentalisée par les cheikhs occultes de l’islam politique. Cheiks à la solde du renseignement international qui ne disaient pas les intentions qui les mobilisaient contre les intérêts de leurs propres pays. Le tout chapeauté par Al Jazeera qui, pour appuyer la validité de ses thèses complotistes, passait le micro à Al Qaradaoui en tant que référence religieuse incitant les foules aveugles à renverser leurs monarques. Sinon plus :le cas Kadhafi. Avec un peu de recul, on peut maintenant voir plus clairement d’une part dans l’opacité des fonctions des médias, de la société civile et, d’autre part, dans le redoublement des charges des services de sécurité. Sans toutefois oublier de rapprocher ces trois pôles de l’élément le plus dangereux de l’équation :le djihadisme terroriste; composante fondamentale de l’islam politique, ou si l’on veut, son aile militaire parallèle. Pour ce qui est des médias, il est devenu difficile, dans le contexte actuel de la globalisation et des nouvelles technologies de l’information, d’’aborder ce volet sans avoir présent à l’esprit trois cas atypiques de modes d’expression de presse. Savoir le scandale politique, porté devant la justice britannique, de Robert Murdoch et des écoutes téléphoniques, en deuxième lieu l’affaire de Julian Assange (Wikileaks) en rapport avec la fuite de l’information stratégique et, tout dernièrement, celui d’Edward Snowden dans son rapport avec avec le renseignement et la sécurité. Trois modes avec leur implication dans la redéfinition des relations internationales et des stratégies de la communication politiques et militaires. Ce qui tout simplement nous dit que le cadre de l’information géopolitique, ainsi que les politiques nationales des médias, relèvent désormais de macro-structures étatiques qui ne peuvent plus souffrir de traitement aléatoire ni abandonnés à une ’appréciation hasardeuse de type amateuriste.  Relativement à ce que nous avons vécu pendant ces trois dernières années, dans le monde arabe, il s’avère que les supports médiatiques doivent intégrer un corpus d’analyse plus complexe et plus approfondi. Notamment le corpus délicat de sécurité et des institutions de veille politique pour inscrire les modes d’expression sur un axe de lisibilité plus conforme aux exigences de la conjoncture. En tant que facteur de propagande, d’influence de l’opinion publique, de garantie de paix sociale, la dimension médiatique mobilise pour le moment les intérêts des secteurs les plus sensible de l’Etat. De ce fait, elle requiert une attention plus accentuée sur le discours et le comportement de ses acteurs. Il devient décisif, en effet, de soumettre le profil de ses décideurs au regard d’une évaluation prospective plus rentable. Voir par exemple la qualité de leur formation, de leurs motivations, ainsi que leur part de production relative aux contributions intellectuelles dans le domaine. Il serait intéressant, dans un second lieu, de s’enquérir sur la moyenne de leur âge pour comprendre leur manière de travailler, leur disponibilité, la nature de leurs relations au sein de la sphère nationale d’information et de leur prégnance dans le contexte international…Poser ainsi la question du profil des acteurs nous obligera à examiner, à la base, le volume de mobilité des compétences et sa conformité avec les attentes du moment. Par ailleurs, cela permettra de s’interroger sur certains monopoles handicapant la marche sereine et cohérente de ce secteur stratégique dans l’ensemble des pays du monde arabe.
Quand, dans un pays émergent, comme le Maroc, vous avez des ombres de fantômes qui planent sur le secteur depuis des années et qui le traînent dans l’improvisation, le statu quo stérile et imprévoyant, attendez-vous à de sérieux problèmes d’instabilité et d’insécurité. Ceci parce que les nécessités actuelles de la bonne gouvernance médiatique se compliquent davantage et se doublent de missions nouvelles qui imposent une restructuration dans le sens d’une vision politique plus volontariste nécessairement consciente des enjeux complexes nationaux et interrégionaux. Le secteur ne peut plus évoluer, grâce à des efforts d’individualités, dont on ignore tout; plus particulièrement, sur leur manière de concevoir les nouveaux dispositifs qui régissent ou investissent le secteur. Plus spécialement lorsque ces mêmes dispositifs sont combinés aux voix venues d’ailleurs qui forcent l’expression médiatique à des performances franchement antinationale. C’est ainsi qu’il faudrait revenir, au Maroc comme ailleurs, à l’examen minutieux du discours politique véhiculé depuis 2011 par certains supports afin de mettre le doigt sur des mobiles bizarroïdes d’expression. Comme pour comprendre, par exemple, l’intérêt accru porté à certaines institutions stratégiques de l’Etat, la dramatisation de faits banals relatifs aux droits de l’Homme, l’insistance agressive sur des écarts de l’administration publique, le franc appel à la zizanie, à la descente dans la rue, le débat faussé sur les cahiers de charge, le contexte politique du débat sur le Code de la presse….Discours relayés au sein de la société civile par la recherche délibérée des affrontements avec les forces de l’ordre. La provocation pour précipiter les secousses et l’ébranlement tant souhaités du système politique. Relativement à ce volet, le redoublement des efforts et la complication des tâches des services de sécurité lors du Printemps arabe s’expliquent par le faits que ces services n’ont pas été formés dans le sens de l’ampleur de ce phénomène massif et imprévisible dans sa teneur et son volume violents.
Un phénomène inédit avec des instruments nouveaux et des acteurs s’écartant des repères classiques d’identification.
On avait effectivement, dans les cas extrêmes, une idée précise des innovations possibles au sein du mouvement syndical ou partisan. On savait à peu près jusqu’à quel point il peut aller et ses meilleurs militants suffisamment connus. Or ce qui arrivait dans le cadre des révolutions printanières était entièrement nouveau. Le mouvement du Printemps arabe s’inscrit effectivement en rupture avec l’esprit des revendications sociales dont on avait l’habitude. Il semble interpeller un discours relativement ambigu mais sachant s’adapter aux exigences de la rébellion au fur et à mesure de la montée de la colère et des instructions venues d’opérateurs résidant à l’étranger. Ce rapport structurel avec les forces de décision résidant ailleurs ne pouvait être mis au clair que tardivement. Au moment où les liquidations physiques et les disparitions surprenantes du personnel politique hautement qualifié prennent une tournure professionnelle et trahissent à l’horizon un réaménagement géopolitique et militaire d’envergure, encore mal défini mais inéluctable: assassinat du général Abdelfettah Youness (28 juillet 2011) du consul américain Christopher Stevens (11 septembre 2012) en Libye ; liquidations de Chokri Belaid (6 février 2013), de Mohamed Brahmi (25 juillet 2013 ), ;subite disparition du général Soleiman (19 juillet 2012) en Egypte,. .. 
L’empreinte symbolique de certaines de ces violences charge le contenu des fonctions de sécurité de nouveaux paradigmes qui le force, de manière à élargir son champ de lecture politique des manifestations massives et des discours ambiants. Une lecture forcément qui déborde le cadre du champ national pour embrasser des niveaux de représentation planétaire plus complexes. Au Maroc, en effet, on ne peut pas comprendre l’intention du mouvement du 20 février d’investir la prison de Salé ou le Centre des services secrets de Témara si on ne voit pas ce qui s’est passé ailleurs. En Egypte, en Libye et en Tunisie, le mouvement du Printemps arabe s’est caractérisé par une focalisation particulière sur les institutions sécuritaires. En Tunisie et en Egypte, les manifestants ont assiégé des édifices publics dépendant des services de renseignements, se sont emparés de documents précieux et ont brûlé le reste.  Partout le mouvement du Printemps arabe a ouvert les prisons et libéré des prisonniers politiques et des forçats du crime organisé. Des dérives apparemment improvisées et incontrôlables apparaissent à présent comme parfaitement adaptées à l’esprit d’anarchie générale qui guidait souterrainement les opérations de manifestations dans la sphère du Printemps.  Ainsi donc, l’entrée impromptue des groupuscules extrémistes de l’islam politique, sur la scène publique allait aggraver davantage la situation d’intelligence du phénomène du Printemps et participe des écueils supplémentaires des missions de sécurité. Ce qui va imposer l’introduction du segment du renseignement militaire dans l’interprétation et l’analyse des faits; segment doublé d’une vision géostratégique à même de remettre à niveau les moyens disponibles pour mieux saisir le sens des événements ainsi que “les mécanismes“ géopolitiques qui les gouvernent en profondeur.  Maintenant, que dire, de plus précis, sur la société civile? Au Maroc, le journal “Akhbar Al Youm“ du 03 septembre 2014 titre en haut de la une: “Le ministère de l’Intérieur se vengera-t-il d’Amnesty international?”. L’article s’explique sur le malentendu entre le ministère et la section nationale d’Amnesty. Il s’agit de l’interdiction, par les autorités, à Bouznika, d’une activité de l’association pendant laquelle celle-ci envisageait l’organisation d’un stage au profit de 40 militants de différentes nationalités. Le journal, qui a contacté un responsable de la section, rapporte que celui-ci a soutenu que pareille manifestation se tenait régulièrement depuis 16 ans sans entrave aucune de la part de l’Administration. Il a ajouté que, probablement, les pouvoirs publics éprouvaient une sorte de gêne ou de répulsion face aux multiples rapports d’Amnesty sur la situation des droits de l’Homme au Royaume. En particulier, une campagne contre “la torture” qui se solderait par un sit-in international devant le Parlement le 18 septembre.  Ce bras de fer entre le ministère de l’Intérieur et les Associations des droits de l’Homme n’est pas nouveau. On se souvient qu’à la mi-juillet, Mohamed Hassad, avait tenu devant la Chambre des représentants un discours qui avait choqué les acteurs de ces associations. Un discours qui va dans le même esprit que celui d’Abdel Fattah Al-Sissi, président de la République d’Egypte, souligné ici au début de notre analyse.  Mohamed Hassad, en effet, posait on ne peut plus clair la question des sources de financement des associations concernées. Il a souligné, par ailleurs, que ”les services sécuritaires se trouvaient confrontés durant l’exercice de leurs missions aux agissements de certaines associations et entités nationales qui, prétextant la défense des droits de l’Homme, n’hésitaient pas à accuser à tort les services de l’ordre. Leur but étant d’affaiblir la vigilance de l’appareil sécuritaire et de miner le moral de ses agents “ Ce dur propos, direct mais lucide, ne devait pas oublier que les sources de financement de ces associations provenaient des sphères étrangères pour satisfaire à des agendas visant à porter atteinte aux intérêts stratégiques du Maroc. En fait, Mohamed Hassad, et Abdel Fettah Al Sissi, en Egypte, ne font que redire ce que tout le monde, bien mis dans le bain de l’’information politique, sait. Et ce, même si certains acteurs de la société civile, et les porteurs de projets de déstabilisation dans le monde arabe, continuent à nous la jouer en termes de “slogans libérateurs“ et “anti-corruption”...
Il s’agit d’une véritable guerre livrée au monde arabe. Non pas une guerre classique opposant Israël à nos pays mais bel et bien une guerre la plus crapuleuse et la plus terrible orchestrée avec “des ressources humaines” rétrogrades qui vivent malheureusement parmi nous : un type particulier de la société civile et un mode agressif du journalisme combinés à un islam politique extrémiste qui ont confisqué la parole en notre nom. Un amalgame dangereux aux attaches occultes avec des services secrets étrangers qui menace la paix sociale et la quiétude de nos citoyens. C’est l’idée même d’une journaliste de Bahrein, Sawsan Al Shaer, que rapporte Al Sharq Al Awsat le 20/08/2014. Pour corroborer sa thèse de véritable guerre contre la nation arabe, elle s’appuie sur une déclaration d’un ancien directeur de la CIA, James Woolsey, qui affirme “que les Américains allaient renverser les trônes des systèmes politiques arabes en utilisant les peuples arabes contre leurs propres gouvernements”. Et la journaliste expose avec une précision ahurissante un mouvement d’acteurs de la société civile dans trois continents pour précipiter, par exemple, le renversement du régime de Manama. Elle cite, à juste titre, des partenaires américains, anglais, français et iraniens qui adhèrent à ce projet du renvoi catastrophe du régime et traite du financement conçu à cet effet.. C’est dans cet ordre d’’idées que National Endowment for Democracy a fourni 27 mille dollars pour couvrir les dépenses d’un rapport s’intitulant :”Baherin :le silence est un crime de guerre”. Une autre organisation américaine, National Democratic Institute, a déboursé 30 mille dollars pour l’encadrement et la formation des défenseurs des droits de l’Homme. Cette même association a révélé qu’en 2012, elle avait fourni 320 mille dollars pour le “Programme de conversion politique à Bahrein”. Ceci sans relever d’autres activités de propagande empoisonnées qui travaillent à présenter Manama comme le pays de la torture par excellence. C’est à dire exactement le même mensonge qu’on est en train de préparer contre le Maroc ces derniers jours. Au monde arabe, le différend des associations des droits de l’Homme avec le ministère de l’Intérieur n’est pas propre au Maroc. En Egypte, la question prend plus d’ampleur et de virulence. Certains pensent désormais interdire systématiquement ces organismes aux attaches internationales “louches et complotistes”.
A cet égard, des avocats ont récemment porté plainte contre des structures de la société civile s’intéressant à la question des droits de l’Homme. Ils ont demandé notamment de geler les activités de Human Rights Watch invoquant qu’elle opérait en Egypte sans couverture légale. Mais la question de bannir ces associations de l’espace public égyptien ne fait pas l’unanimité. Des cercles du pouvoir s’y opposent avançant que Le Caire n’a rien à cacher et ne craint pas les rapports abusifs qui cherchent à salir son image aux yeux de l’opinion publique internationale. Des cadres de la société civile soutiennent qu’au lieu de suspendre les organismes au service des agendas identifiés, il valait mieux procéder à la redynamisation des enquêtes judiciaires autonomes. C’est, à leur avis, le seul moyen de contrecarrer l’offensive partiale de ces organes à la solde des services de renseignements et d’espionnage étrangers.
A l’origine du profond désaccord opposant le pouvoir égyptien et Human Rights Watch se trouve le rapport d’enquête sur l’évacuation du sit-in Rabaa le 14 août 2013. Ce rapport publié le 12 août 2014 considère que cette évacuation s’inscrit sous la rubrique de “Crime contre l’humanité” puisque, selon cette enquête, 817 personnes au moins ont été tuées sur ce lieu. Le rapport de 195 pages intitulé “All According to plan :The Rabaa Massacre and Mass Killings of Protesters Egypt” (Conformément au plan: le massacre de Rabaa et les tueries de masse des manifestants en Egypte) informe sur la manière dont la police et l’armée ont évacué la place et comment elles ont ouvert le feu sur les manifestants qui s’opposaient au renversement, par les militaires le 3 juillet 2013, de Mohamed Morsi.  Kenneth Worth, directeur exécutif de Human Rights Watch a déclaré, à ce propos, “qu’il ne s’agit pas seulement d’un recours excessif à la force ou d’un enchaînement insuffisant de forces de sécurité. Mais d’une répression violente et planifiée au plus haut niveau du gouvernement égyptien. Beaucoup de ces représentants de l’Etat sont encore au pouvoir alors qu’ils ont bien des comptes à rendre“. Cependant plusieurs associations mobilisées pour la question des droits de l’Homme, en Egypte, trouvent ce rapport accablant dans son injustice partiale et minutieusement orientée. Ils jugent son apparence d’’humanité comme un subterfuge maladroit ne pouvant camoufler les violences meurtrières perpétrées par les Frères musulmans; sur lesquelles violences, le fameux rapport ne dit mot. Il ne dit pas non plus que le sit-in n’avait rien de pacifiste ni ne relève la teneur des discours d’un Mohamed Baltaji, par exemple, qui menaçait de paralyser les secteurs clefs de l’économie jurant d’incendier Le Caire. Le même Baltaji qui disait impunément que les attaques criminelles contre l’armée égyptienne provenant du Sinai seraient stoppées une fois que Mohamed Morsi est remis naturellement à sa place de président de la République.  Et des incendies ont effectivement éclaté dans l’ensemble du pays mettant à feu les Eglises et les départements de sécurité. Un silence radio dudit rapport est constaté relativement aux meurtres d’officiers de police et de l’armée par les milices qui opéraient partout et dont le nombre a dépassé les 475 victimes. Silence aussi sur l’initiative qui avait mobilisé le soutien à l’armée après avoir fait signer, à une masse de 22 millions de citoyens, une pétition demandant le départ de Morsi et le renvoi de la piètre gouvernance des Frères musulmans. Initiative qui avait rallié l’écrasante majorité des forces politiques égyptiennes représentant les ambitions du peuple et son refus du fascisme politique. Tamarod qui s’était, on s’en souvient, approprié la place Al Attahrir comme symbole … 
Nous arrivons à la fin de cette réflexion sur la société civile, les médias dans leur rapport actuel avec les services de sécurité. C’est une relation très complexe qui appelle des investigations minutieuses à même de soutenir la compréhension de la confusion politique qui sévit dans les pays arabes depuis le déclenchement du fameux Printemps arabe. Un Printemps parvenu à semer le désordre et l’anarchie quand il n’a pas mis en place une forme de gouvernance politique des plus désastreuses.
A l’origine de ce dérapage foudroyant se trouvent, paradoxalement, des idées référant à un idéal humaniste auquel aspirent les jeunesses du monde arabe. Un idéal de liberté rêvé en tant qu’horizon suscitant l’adhésion des pans entiers de la société. Mais au fur et à mesure du déroulement des événements, nous avons assisté à la mise en place de monstruosités irréparables. Cela continue en Libye, en Syrie, en Irak, au Yémen. Au Liban, la menace de guerre civile est sérieuse alimentée par les discours sectaristes ou «confessionnalistes» haineux. En Tunisie, malgré la relative maîtrise de la question sécuritaire, le doute persiste. Le monstre politique de la haine s’étant uniquement retiré dans le pli de la parole mielleuse de transition démocratique.  Désormais, des pays arabes comme le Maroc doivent revoir plus profondément la mission de la société civile par l’examen circonspect des sources de financement ainsi que les recoupements constatés entre des organismes “libéraux et progressistes” et les mouvements de l’islam politique. Leur activisme commun relativement à des questions comme celles de l’environnement et des droits de l’Homme. . intrigue. Ce qui repose plus sérieusement la question de l’avenir sécuritaire du pays. Enfin, un type de journalisme qui a tout dit sur sa proximité politique avec le Qatar et la nébuleuse des Frères musulmans doit répondre de certains positionnements qui vont à l’encontre des intérêts nationaux. De même, une analyse géopolitique des grandes décisions des pays du Golfe, de l’Egypte et même d’un pays européen comme le Royaume-Uni, concernant le terrorisme, doit mobiliser le plus d’attention des experts. A ce titre, par exemple, posons cette question : quelle est la validité du rapport d’enquête de l’ambassadeur britannique John Jenkins, en Arabie Saoudite, sur ce sujet porteur des plus grandes déstabilisations ? 
 


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