Radouane Mrabet, président de l’Université Mohammed V-Souissi: “Avec les départs à la retraite, il y aura un grave déficit d’enseignants”


PROPOS RECUEILLIS PAR NEZHA MOUNIR
Lundi 10 Septembre 2012

Radouane Mrabet, président de l’Université Mohammed V-Souissi: “Avec les départs à la retraite, il y aura un grave déficit d’enseignants”
Et rebelote ! Les vacances sont terminées et la  nouvelle rentrée universitaire pointe déjà son nez. Celle de  l’Université Mohammed V-Souissi démarre sous de favorables auspices. Nul doute que le lancement du projet pilote de l’éducation tout au long de la vie demeure une initiative performante. Mais en parallèle d’autres projets tout aussi importants sont en vue et visent un meilleur encadrement des étudiants voire  celui des ressources humaines. La recherche scientifique n’est pas en reste puisque d’énormes efforts sont déployés pour la  débarrasser de l’étiquette de  «parent pauvre » du système
éducatif qui lui colle à la peau. Pour faire le tour d’horizon de tous ces projets et bien d’autres, Radouane Mrabet, président de ladite université, a bien voulu nous accorder l’entretien suivant.


Libé : Comment s’annonce la rentrée universitaire 2012-2013 ?

Radouane Mrabet : Pour comprendre ce qui suit, il faut avoir déjà une idée sur l’architecture de l’université. Nous avons sept établissements de formation dont cinq à accès régulé. Les deux facultés de sciences juridiques, économiques et sociales de Souissi et Salé comptent deux filières qui ne sont pas à accès régulé (mais plutôt à accès ouvert). Il s’agit en l’occurrence de la filière du droit en arabe et d’économie et gestion. Elles comptent beaucoup d’étudiants et nécessitent de ce fait plus d’encadrement. On y enregistre un taux d’abandon fort important vu que généralement pour les étudiants, ces filières représentent le dernier recours. C’est à nous d’essayer de les motiver. Ils ont besoin de tuteurs pour les coacher au cours de l’année. Cette année, on  table sur 20% d’inscrits  plus que l’année dernière. Beaucoup d’efforts ont été déployés pour les accueillir notamment au niveau des locaux. Un nombre plus important de classes et une remise à neuf pour un cadre agréable.

Et les ressources humaines ?

Elles posent évidemment un problème. Avec les départs à la retraite, il y aura un déficit de 25% dans les 8 prochaines années. Si on veut maintenir le taux d’encadrement actuel, il faut remplacer les départs actuels et procéder à de nouveaux recrutements. En médecine, le problème de la relève ne se présente pas mais plutôt par rapport à d’autres disciplines comme les sciences de l’éducation et du droit privé. Bien sûr, on fait appel à des praticiens. Mais je souhaiterais qu’à côté des professeurs permanents et des vacataires, il y ait un autre statut intermédiaire pour des vacataires qui s’investiraient davantage dans l’université. Ils porteront le titre de  « professeurs associés » et seraient partie prenante dans le devenir de l’université. On y aurait recours pour des  think-tanks.

Quid du projet pilote de  l’éducation tout au long de la vie?

C’est une expérience qui sera lancée en collaboration avec un organisme allemand DVV international avec qui on compte signer une convention de coopération à la fin du mois. Au-delà de la mission classique de l’université qui est celle de la formation des étudiants, on souhaiterait qu’elle ait une mission auprès de son environnement. Répondre aux attentes des personnes qui voudraient profiter des compétences présentes au sein de l’université voire améliorer leurs conditions de travail. Il s’agit d’une formation à la carte sous forme de modules que les participants choisissent selon leur disponibilité. Des ateliers comprenant une vingtaine de personnes.

C’est payant ?

Effectivement. 50 DH par heure tout en sachant qu’un module compte 20h à 30h. C’est plutôt symbolique. Mais il va sans dire que tout « acte payant est plus motivant ».

Avez-vous prévu une formation à distance ?

Elle n’est pas prévue dans ce cadre mais l’université dispose d’un centre e-learning. Beaucoup de cours sont disponibles sur la plateforme de l’université dont l’accès est soit général soit limité aux seuls étudiants inscrits dans la filière en question. L’un de nos projets est de  mettre en ligne  tous les cours des filières à accès libre pour aider les étudiants dans leur apprentissage. Ils peuvent visionner les cours comme ils le souhaitent et même les utiliser par la suite comme éléments de recherche.

On a tendance à dire que la recherche scientifique est le parent pauvre du système éducatif. Qu’en est-il  au niveau de votre université ?

En fait, le ministère nous accorde un budget que nous gérons comme nous le souhaitons. Ces dernières années, beaucoup d’intérêt a été porté à la recherche scientifique au niveau de notre université. Ainsi une cinquantaine de projets ont été signés avec les chercheurs de l’université d’une durée de 2 à 3 ans. Les moyens financiers nécessaires leur sont accordés et sont soumis à une évaluation au bout de chaque année.  C’est dans ce cadre que seront évalués cette année les centres d’études doctorales créés en 2008. Quatre évaluateurs dont deux Marocains et deux Européens procéderont à une évaluation externe. Il faut signaler également que chaque année, l’université organise la journée de la recherche. Le thème choisi pour 2012 est «Les études doctorales, quel bilan ? ». Une autre réalisation dont nous tirons beaucoup de fierté réside dans le fait que nous avons déposé sept brevets d’invention auprès de l’OMPIC. C’est une grande première qui prouve la présence d’un potentiel non négligeable de recherche chez nous. C’est en même temps le résultat d’une politique de proximité qui vise à montrer aux chercheurs que leurs travaux peuvent être transférables en brevets. Maintenant, il existe une étape plus élaborée où le brevet sera commercialisé ; une valorisation de la recherche. Au niveau de la Faculté de médecine et de pharmacie, la courbe des publications ne fait que progresser et ce, depuis six ans. C’est un travail au quotidien qui commence à donner des résultats concrets.

Des projets ?

Il va de soi que notre souci, c’est de mettre en place des procédures à même de permettre à l’université de fonctionner dans de bonnes conditions et à l’aider à faire face à cette massification au niveau des facultés. Pour ce,  les projets ne manquent pas. Ainsi, nous avons, entre autres, un projet de création d’un centre d’admission ; une sorte de guichet unique qui accompagne l’étudiant depuis son inscription jusqu’à l’obtention de son diplôme. Le suivi de son parcours est ainsi assuré.
Un autre projet vise à structurer les activités des étudiants et à leur donner plus de solennité voire plus de professionnalisme. Accréditer les associations et les clubs des étudiants verse dans ce sens. Un autre projet qui me tient à cœur, c’est le complément de diplôme. C’est un concept qui consiste à encourager les étudiants à avoir des centres d’intérêt autres que leur formation classique. Une façon de les aider à s’épanouir et à développer leur esprit d’initiative.  Il va sans dire qu’un étudiant qui s’investit dans d’autres activités, culturelles, sportives..., est mieux armé à affronter le monde du travail. Une attestation signée par le doyen devrait le prouver et constituerait un plus pour son CV. Il faudrait avoir un plan de développement durant toute l’année pour faire profiter le maximum d’étudiants. Un autre projet et non des moindres consiste à accorder à notre université le label d’«université verte». Un processus de développement durable qui prendra peut-être 2 ans sera ainsi entrepris. La formation d’un certain nombre de professeurs  et du personnel administratif s’avère dans ce cas nécessaire afin que nous puissions participer aux manifestations nationales  et internationales traitant de ce sujet. On pourrait par ailleurs développer des filières de formation axées sur l’environnement et le développement durable. Ce projet a été déjà mis sur les rails puisqu’un comité ad hoc a été créé afin d’accélérer le processus.


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