Quand la mémoire nous interpelle…

La mémoire nous appelle. La mémoire nous interpelle. Le Centre Jacques Berque (CJB) en est bien conscient. Il répond aux signaux de la mémoire par un atelier qui sera organisé, à son siège à Rabat, le 3 avril 2014. Le thème retenu : «La mémoire de la violence politique». 

Une initiative qui s’inscrit dans le cadre de deux projets de recherches entrepris par le Centre, en partenariat avec les Archives du Maroc et financés par la Commission européenne dans le cadre du programme IER2 du Conseil national des droits de l’Homme – «Luttes politiques et mémoire collective au Maroc (1961-1999) : parcours militants, récits de légitimation et élaboration de la mémoire» et «L’histoire du soulèvement du Rif (1958-59) : reconfiguration du champ politique et consolidation monarchique».

Selon un communiqué du CJB, cette rencontre entend approfondir la question complexe des rapports entre histoire et mémoire. Quand ces deux registres d’expression du passé aux logiques propres s’entremêlent – détermination de la véracité des faits pour l’histoire ; respect de l’injonction du respect de la fidélité à la mémoire –, il convient de préciser la nature des liens qui les unissent et brouillent parfois leurs rapports.

Aussi, cet atelier s’assigne-t-il un double objectif, ajoute la même source : baliser les principales étapes d’un cheminement méthodologique opératoire et confronter les expériences de recherche. Dans cette perspective, quatre thèmes de discussion seront privilégiés. D’abord, une nécessaire mise au point notionnelle devra fixer le cadre conceptuel de ce que l’historien Henry Rousso qualifie de «nouvel atelier d’historien».

En effet, apports des philosophes (Paul Ricoeur), concepts empruntés à la sociologie («Les cadres sociaux de la mémoire», Maurice Halbwachs), réflexions menées en histoire (Philippe Joutard, Pierre Nora), prescience des poètes («Notre héritage n’est précédé d’aucun testament», René Char) doivent être convoqués, qui permettront d’introduire des interrogations : qu’est-ce que la mémoire? Qu’est-ce que l’histoire? Comment envisager faire l’histoire de la mémoire?

L’atelier animé notamment par Jean-Noël Férrié (DR, CNRS) et Nabil Mouline (CR, CNRS), débattra d’une réflexion sur l’émergence des phénomènes mémoriels (re)présentant les séquences de violence à l’œuvre au sein des sociétés maghrébines à l’époque contemporaine. Dans cet ordre d’idées, trois questions seront posées, lesquelles motiveront échanges et débats : quels acteurs de mémoire sont principalement actifs? Quels discours sur le passé fabriquent-ils et quels sont leurs registres préférentiels d’expression (vecteurs de mémoire)? Quelles concurrences de mémoire se déploient dans l’espace social, selon quel rythme et avec quelle intensité ? 

Troisième axe de réflexion, celui des singularités nationales. L’on tente de savoir si les pays de l’espace maghrébin et aussi certaines zones (le Rif marocain par exemple) développent des spécificités dans la mise en place des phénomènes mémoriels. Une fois établie cette «cartographie mémorielle», la confrontation entre ces expériences que l’on suppose différentes pourra déboucher sur des comparaisons pertinentes.

Le communiqué conclut que fort de ces échanges, le projet tentera de délimiter le champ des études à mener en matière d’écriture de l’histoire de la mémoire/des mémoires des sociétés maghrébines.