Lucile Bernard : J’ai pris le risque de parler de l’amour et du bonheur dans ce monde où tout va de travers


Propos recueillis par Alain Bouithy
Samedi 3 Janvier 2015

Lucile Bernard : J’ai pris le risque de parler de l’amour et du bonheur dans ce monde où tout va de travers
Publié aux éditions
L’Harmattan, le livre
«La vie comme un poème»
est un hymne au bonheur, à l’amour mais aussi à toute la beauté du monde, confie son auteure : Lucile Bernard. Cet ouvrage est le second de l’écrivaine française résidant au Maroc, après «Dernières nouvelles avant le jour».
Entretien.


Libé : vous avez récemment publié un nouveau livre «La vie comme un poème». Avant d’en parler, direz-vous que vous êtes satisfaite de votre précédent livre «Dernières nouvelles avant le jour» ?

Lucile Bernard : Oui, tout à fait. « Dernières nouvelles avant le jour » est un livre qui, tout de suite, a interpellé les lecteurs. Ils ont été touchés, bousculés. J’ai reçu de nombreux témoignages qui m’ont émue, interpellée aussi. C’est un livre dérangeant qui nous met face aux questions essentielles, où j’ai abordé des problèmes de société, la misère, la maltraitance, la liberté bafouée, les problèmes que rencontrent les jeunes notamment ici au Maroc, le chômage, leur désir de « l’ailleurs ». Les médias m’ont beaucoup suivie et soutenue, les libraires m’ont fait confiance. « Dernières nouvelles avant le jour » a reçu notamment le coup de cœur des libraires chez Decitre en mars 2013.

Dans ce recueil de nouvelles, «Dernières nouvelles avant le jour», vous avez confié à Libé que vous voulez «donner la parole aux voix du silence, celle des petites gens et des laissés-pour-compte». Votre nouveau livre explore-t-il de nouvelles voix?

Je me suis toujours sentie proche des gens simples, concernée par tout ce que je vois autour de moi : le beau comme le moins beau. Dans «La vie comme un poème », Tristan, Marie, Léo, Jules et Sarah sont des jeunes, tous issus de condition modeste. Léo et Jules font les trois huit à l’usine, Sarah vient de quitter un poste de vendeuse dans un magasin de chaussures, Marie fait des gardes d’enfants et Tristan est au chômage. Et puis il y a aussi Bougeo, ce gamin des rues d’à peine dix ans, réduit à la mendicité par l’une de ces mères «adoptives».

Pourriez-vous nous présenter ce livre un peu plus en détail?

« La vie comme un poème », c’est avant tout l’histoire d’une rencontre, de la brûlure d’une rencontre entre Tristan et Marie dans le soleil d’été. Tristan va tout de suite tomber fou amoureux de Marie. C’est un être un peu fragile, un peu poète, un peu déboussolé par les aléas de la vie. Cet amour, ils vont le vivre en lien puissant avec la nature, la mer et le soleil, avec aussi leurs trois amis Léo, Jules et Sarah qu’ils rencontrent régulièrement dans un petit café au bord de la mer où ils entretiennent des discussions animées sur la vie, l’amour, la mort, le bonheur aussi. Tous ont en eux cette fureur de vivre, cet instinct puissant de liberté. J’ai cheminé avec cette question du bonheur en tête tout le temps quand j’ai écrit ce livre.  J’ai essayé de l’aborder avec des mots simples, la voix de ces jeunes pas forcément éduqués, pas forcément lettrés mais conscients de cette urgence de vivre, parce que la vie est courte, parce qu’il y a toujours la mort quelque part, collée aux trousses. Et puis il y a aussi cette beauté du monde qui se balade dans le livre, qui est là, omniprésente, même au milieu des turpitudes de la vie, des moments les plus noirs. On pourrait dire que ce livre est un hymne au bonheur, à l’amour mais aussi à toute la beauté du monde.

Vous êtes en pleine promotion du livre. Comment a-t-il été accueilli ?

Le livre vient de sortir ce premier octobre 2014 aux éditions L’Harmattan et déjà les lecteurs m’écrivent. Il semble qu’ils soient à nouveau bouleversés, chamboulés par le livre. L’histoire les a pris, elle les a embarqués à leur insu. Les médias me font à nouveau confiance : « La vie comme un poème » a reçu le coup de cœur de Maroc Hebdo et fait l’objet déjà de nombreux articles tant dans la presse marocaine que française avec la participation à des rencontres-signatures en France, au Salon du livre de Paris. D’autres sont à venir : le 8 janvier prochain à 18h à Casablanca, je ferai une rencontre-signature à la librairie Carrefour des livres, une autre le 23 janvier à l’Institut français de Marrakech.

Quel message aimeriez-vous véhiculer à travers ce livre ?

Dans ce livre, j’ai pris délibérément le risque d’aller à contre-courant des tendances du moment, toutes tournées vers la morosité, le pessimisme actuel. J’ai pris le risque de parler de l’amour, du bonheur dans ce monde où tout va de travers, où tout n’est bientôt plus que chaos, violence et haine, où atrocités, horreurs se côtoient chaque jour. J’ai décidé de tourner le dos à la désespérance et pris, comme le dit Tristan dans le livre, «le parti d’être heureux». Ceci ne veut pas dire occulter cette noirceur, être indifférent mais porter un autre regard sur le monde. Il s’agit d’être acteur, responsable de ce monde, dire non à la haine, non à la violence, oser dire oui au bonheur, à la beauté, à la voie de l’amour. En un mot prendre le risque d’aimer.

Un mot sur le Centre de création artistique Riad Sahara Nour dont vous êtes la fondatrice?

J’ai effectivement fondé le Centre de création artistique Riad Sahara Nour à Marrakech en 2003. Nous avons accueilli depuis lors de nombreux stages (peinture, écriture, chants, carnets de voyage), organisé pendant huit ans des rencontres internationales de la poésie, ainsi que des concours de poésie ouverts aux jeunes du Maroc. Pendant cette période et encore maintenant, nous avons toujours été conscients de maintenir cette option d’échange interculturel, de liberté d’expression. Depuis 2012, je me consacre à nouveau à l’écriture. Je sais que d’autres rencontres poétiques sont nées un peu partout au Maroc, les graines ont germé. Je sais que la poésie est en passe de grandir. Je fais confiance à toutes ces voix en devenir. Le Maroc est bourré de talents !

* «La vie comme
un poème », Lucile Bernard, éditions L’Harmattan, 2014


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