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Les rituels ramadanesques d’Essaouira menacés de disparition

Un patrimoine en danger


Abdelali Khallad
Vendredi 25 Juillet 2014

Les rituels ramadanesques d’Essaouira menacés de disparition
Parler du Ramadan à Essaouira, c’est évoquer les vieilles et belles images de synergie, de convivialité, de simplicité et de cohabitation entre religions et générations. Ramadan à Essaouira, c’était Maâlem Dabachi, Aicha Ben Daoud, Si Chichti, et  Madame Chère, la voisine juive qui partageait avec ses voisins marocains sa « Skhina » et prenait avec eux le repas du « Ftour » recelant des valeurs religieuses  musulmanes.
Essaouira connaît, à l’instar des autres villes du Royaume, des mutations sociales et des changements de valeurs  qui n’ont pas épargné l’héritage social et culturel  du Ramadan. Au bout de vingt ans, il n’y a plus de  place au   fanfare de Si Chichti, ni à la  « Ghayta » des Hamdouchyine, ni au  rituel de l’escargot et encore moins  à celui du « Kanoune »  commun.
La «Ghayta» des Tarawih était un moment de plaisir, de détente et d’éducation musicale pour les jeunes et moins jeunes qui s’empressaient après la prière de prendre place près des minarets de l’ancienne médina qui soufflaient des « Snayea » du Malhoun, du Madih et de la Ghayta pendant une heure et plus.
Lors d’un reportage réalisé par « Libé » quatre ans auparavant, on avait déploré la précarité dans laquelle vivaient  bon nombre de « Gheyata » dont le métier a été dévalorisé.  Ils ne touchaient que 200 dirhams par mois du ministère des Habous ! On se souvient de Maâlem Dabachi, le Hamdouchi qui jouait du violon, du luth, et la « Ghayta ». À l’exception de la nuit sacrée, il dominait les airs  de l’ancienne médina après « Tarawih » et avant le « Shour » offrant aux ruelles, aux murailles et aux bastions  une vie et une voix.
La table du Ftour  souiri se distinguait par «  Amlou », mais avec  la surenchère du prix de l’huile d’argan, il a disparu cédant ainsi la place à la « Chebakeya » et au « Sellou »  comme les autres villes  marocaines. Même sort pour le poisson dont les prix sont devenus inabordables pour les familles, et ce depuis plusieurs années.
Les familles partageaient  le panier de Ramadan, certes, pour des raisons purement sociales mais  cette pratique concrétisait une merveilleuse culture de soutien et de solidarité. Une action pleine d’enseignements pour les jeunes.
Et il y avait aussi Madame Chère, la juive qui frappait à la porte de sa voisine musulmane à l’heure du « Ftour » offrant sa « Skhina » ou des gâteaux. Le caractère humain et éducatif du moment primait sur toutes autres considérations religieuses.
Le Ramadan est un mois de piété et de ferveur par excellence. La fréquentation des mosquées atteint son pic surtout pendant les « Tarawih » et la prière du vendredi.
Les enfants n’étaient pas en reste, car leur premier jour de jeûne faisait la joie et la fierté de toute la famille. L’enfant rompait le jeûne avec sept soupes et sept dattes apportées de chez les voisins en signe d’estime et de respect de la part  des habitants du quartier pour  ses efforts. Les mamans  faisaient boire de l’eau à l’enfant dans la carcasse de l’escargot qui symbolise la patience et l’endurance. Certaines familles servaient le repas du « Ftour » à l’enfant sur la première marche des escaliers. Une façon de lui signifier qu’il est juste à ses débuts.  Lors de la nuit sacrée, les enfants sont portés aux nues.  On leur offrait de jolis habits et  leur faisait porter « Tackchmicht »,  le fameux chapeau  avant de les emmener chez le photographe pour immortaliser la scène.
Contrairement aux autres villes du royaume, les familles souiries visitent les cimetières  le vingt-sixième jour du Ramadan. La nuit, et avant de se rendre aux mosquées, les femmes exécutaient le rituel de la « Bsisa » qui consistait à arroser toute la maison avec un liquide préparé à base de lait, de l’eau de rose, de  l’huile d’olive, d’encens, et de gingembre. 


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