Les péripéties d’une histoire sans issue


Mustapha Elouizi
Mercredi 23 Janvier 2019

Les péripéties d’une histoire sans issue
Les histoires d’enfance sont si particulières qu’elles ne se ressemblent jamais, bien qu’elles s’inspirent souvent de la réalité. L’histoire du petit Abdellah est la preuve de cette mémoire qui s’attache aux détails et aux images. «Un rude parcours sans issue de secours» est un récit en français, de son auteur Abdellah Mastass.
Paru fin 2018, ce livre présente une couverture où l’on découvre deux images et deux textes. D’une part, en médaillon, le portrait de l’auteur avec un prolongement sur son nom et prénom et au milieu le titre en majuscule, pour donner toute l’importance aux mots écrits avec une image qui occupe les deux tiers de la page, et où deux écoliers se donnent la réplique, l’un ne trouve aucun obstacle à son parcours et l’ascension sur les escaliers paraît bien balisée, alors que le second peine à trouver le chemin des escaliers et reste en bas à regarder son vis-à-vis en train de creuser son bonhomme de chemin. La messe est dite !
Détrompons-nous. Le récit n’est pas uniquement une dénonciation de l’état de l’enseignement au pays, à une période donnée, mais aussi un voyage heureux dans un pays, un terroir et un amour premier : Gzenaya  Situé sur les hautes montagnes du Rif, le village est ici chanté, aimé, chéri… le beau paysage, la belle nature, les belles hauteurs, les arbres verdoyants et la vue splendide. Un sentiment évoqué dans la dédicace puisqu’il lui réserve une demi-page, au grand bonheur des petites gens qu’on appelle en amazigh : Igzenayn. « Cette terre qui a noyé mon émotivité dans la nostalgie incurable de ses collines, ses vallées, ses rivières, ses mottes et ses pierres », lit-on.
Et pour ancrer cet attachement à « cette terre », Abdellah Mastass s’efforce aussi de rafraîchir la mémoire en usant d’une toponymie révélatrice de cette amazighité du terroir : Ihammouthan, Izammouran, Tizi Ousli, Aknoul Ajdir, et bien évidemment Gzenaya. Et dans un style autobiographique manifeste, avec un « je » fort présent, sinon omniprésent, il décrit aussi ses quotidiens : « Je faisais du ski », « je m’allongeais », « j’ai appris à conduire », « je jouais »… mais pas seulement L’on s’arrête aussi sur un « on » collectif mais jamais impersonnel, puisque le pronom renvoie à un « nous » familial ou collégial : «Notre immunité », « notre vie simple », «nos espoirs et notre force morale »…
A l’opposé de tout un tableau plutôt gai et agréable, l’auteur ne pouvait cacher son désarroi et sa colère par rapport à la condition d’une vie détériorée, marquée par l’indigence, la misère et moult souffrances, liant le passé de l’écolier qu’il était, au présent des jeunes Rifains d’aujourd’hui, en évoquant au passage l’histoire d’un Hirak assez houleux. Accuser, dénoncer et condamner … trois actes de la part d’un auteur qui aurait pu se contenter d’une description et offrir toute la latitude critique à l’intelligence de ses lecteurs !


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