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Les Gagaouzes veulent sauver leurs chevaux, au cœur de leur histoire


AFP
Vendredi 18 Avril 2014

Les Gagaouzes veulent sauver leurs chevaux, au cœur de leur histoire
Des écuries de Ceadâr-Lunga (sud de la Moldavie) héritées de l’Union soviétique abritent le seul haras national de Moldavie. Mais l’éleveur Constantin Keles craint que ses chevaux baptisés “Jean-Paul Belmondo”, “le Président” ou encore “la Reine” ne deviennent victimes du désintérêt des autorités.
La ferme se trouve dans la région autonome de Gagaouzie, adossée à l’Ukraine et peuplée de 160.000 habitants d’origine turque convertis à l’orthodoxie et parlant russe entre eux.
Pour les Gagaouzes, la passion pour les chevaux est un marqueur identitaire.
Mais l’indifférence des autorités centrales moldaves, pro-européennes, déçoit les Gagaouzes, dont nombreux estiment que des liens plus étroits avec la Russie seraient la clé pour une vie meilleure. 
“Le cheval est un élément important de notre culture nationale”, indique à l’AFP M. Keles, 54 ans, en ouvrant tour à tour les enclos abritant ses “amis”. “J’aime les chevaux depuis que je suis petit ; mon père, mon grand-père et mon arrière-grand-père ont tous fait ce métier”, dit-il, assurant pouvoir retracer jusqu’aux années 1780 l’arbre généalogique de chacun des 63 chevaux élevés actuellement à Ceadâr-Lunga. 
Tous sont issus des trotteurs Orlov, la race de chevaux russe, réputés pour leur force et leur élégance. Depuis 1982, plus de 500 sont passés par ce haras.
Aujourd’hui, sa survie est de plus en plus menacée, en raison notamment d’un financement au compte-gouttes par le gouvernement central moldave. Depuis quelques mois, le haras est privé d’électricité et la nourriture pour les chevaux suffit à peine. Mais M. Keles voit une menace encore plus grande dans la volonté des autorités de privatiser le haras, au grand dam de la minorité gagaouze. 
“Les investisseurs privés n’ont qu’un seul intérêt: gagner de l’argent le plus vite possible. Ils pourraient décider de fermer l’élevage ou de le transformer en ferme d’autruches, comme cela s‘est déjà passé ailleurs”, explique-t-il, en pensant à l’échec de nombreuses privatisations dans l’ancienne république soviétique, aujourd’hui le pays le plus pauvre d’Europe.
Dans un champ à quelques km de la capitale gagaouze Comrat, Vitalie Tchakusta, 20 ans, s’entraîne plusieurs heures par jour avec la jument Lépistok (“petite feuille”, en russe) pour la course traditionnelle du 6 mai à l’occasion de Hederlez, une grande fête gagaouze dédiée aux chevaux.
“Si le haras de Ceadâr-Lunga est privatisé, il n’y aura plus de fête”, dit amèrement Vitalie. “Cela veut dire que nous aurons travaillé deux mois pour rien”.
Le maire de Comrat Nikolaï Dudoglu espère qu’une solution sera trouvée. “Le gouvernement moldave doit renoncer à privatiser le haras ou le transférer sous administration gagaouze”, dit M. Dudoglu, dont le bureau est décoré d’un tableau représentant un cheval noir.
“Comrat vient de +kömur at+, qui en turc signifie +cheval noir comme le charbon+”, explique le maire. Selon lui, la ville doit son nom au vainqueur d’une course de chevaux au XVIIIe siècle.
La municipalité aimerait aussi créer une école équestre, de nombreux parents souhaitant voir leurs enfants apprendre ce sport.
Membre de l’assemblée populaire de Gagaouzie, Ivan Mardari ne rêve que de ça. Depuis trois ans, ce quinquagénaire qui possède 1.300 hectares de terres arables, de vignobles et de vergers a investi entre 30.000 et 40.000 dollars pour acheter des chevaux.
“Nous avons les meilleurs chevaux et les meilleurs entraîneurs, il ne manque plus que l’argent pour construire une école équestre”, dit-il, espérant que le champ où s’entraînent ses 15 chevaux pourra un jour être transformé en hippodrome.
“Les chevaux nous ont accompagnés tout au long de notre histoire”, souligne M. Keles. “Quand nous faisions des maisons en torchis, quand nous labourions la terre ou quand les jeunes allaient demander leur fiancée en mariage, les chevaux étaient toujours là. Cette tradition doit être préservée”.
 


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