Le tout Rabat “Face à Picasso”

Plus qu’un voyage dans le temps, l’expo est un témoignage sur l’évolution de l’œuvre de l’artiste par étapes successives


Assia Bennani (stagiaire)
Samedi 10 Juin 2017

Bien que disparu depuis près d’un demi-siècle,
Picasso fascine toujours, et dans l’agora des arts,
il occupe la même place de prestige qu’autrefois.
Le Musée Mohamed VI d’art moderne et contemporain
de Rabat, lui consacre une exposition passionnante
“Face à Picasso” jusqu’au 31 juillet 2017.



A peine la porte vitrée de la galerie poussée, que nous nous retrouvons plonger dans le regard dense et magnifiquement libre du maestro. Face au portrait noir et blanc, on lit inscrite sur la cloison une de ces citations célèbres : «Je mets dans mes tableaux tout ce que j’aime. Tant pis pour les choses, elles n’ont qu’à s’arranger entre elles ». Les choses se sont donc adaptées, pour faire de l’artiste la figure prééminente du XXème siècle. Plus qu’un voyage dans le temps, « Face à Picasso » est un témoignage sur l’évolution de l’œuvre de l’artiste par étape successive, qui aboutira à la fin, vers le mouvement cubiste.
 L’exposition remonte à sa période bleue, entre 1901 et 1904. Bleue, car c’est la couleur qui domine sa palette de l’époque. Le peintre traverse une dépression. Ses thèmes sont moroses, ses sujets solitaires et ont le regard éteint, comme il le paraît dans  « Portrait d’homme ». Viennent ensuite sur les cimaises quelques esquisses exprimant la complexité de la recherche cubique. Picasso et George Braque travaillent conjointement à poser les grandes lignes du mouvement. Les formes sont étudiées avec minutie, les visages sont décortiqués, les silhouettes éclatées, l’ensemble se transforme en sphères, cubes et  cônes. Les perspectives sont brisées, les conventions, aussi. Tout n’est plus que géométrie. Bien que méprisé à ses débuts, l’art novateur des deux peintres est adopté par de nombreux artistes parisiens, et, jusqu'à aujourd’hui, il continue d’intriguer et de séduire la création artistique contemporaine.
Les 6ième et 7ième salles de l’exposition, déroulent un des nombreux fils de la vie amoureuse de l’artiste.  Pendant un temps son cœur restera partagé entre deux femmes. Marie-Thérèse dont le portrait « Femme assise au chapeau » est exposé, et Dora Maar photographe de renom, qui a joué un rôle capital dans les engagements politiques de l’artiste. Elle l’a inspiré et aidé par ses photographies, à réaliser en 1937, le fameux « Guernica », tableau qui porte le même nom que la ville basque bombardée par Franco et ses alliés. Pablo, exprime ainsi les angoisses, et espérances du peuple. Cette œuvre historique et universelle, ne fait pas partie de l’accrochage. En revanche, notre regard pourra s’attarder sur «La femme qui pleure » réalisé la même année, qui en plus d’être un écho à « Guernica », représente le portrait de Dora Maar, sa compagne pendant 10 ans.
Après la guerre, viennent les beaux jours. La thématique change à nouveau. C’est sa période méditerranéenne, les couleurs sont plus gaies, les modèles sensuels, « La grande baigneuse » trône joyeusement dans ce coin de la galerie.
Le musée n’a rien oublié. Pablo Picasso a toujours cherché la mouvance. Son évolution stylistique et sa variation thématique circulent de façon fluide dans les différents espaces de la galerie. Pour diffuser ses idées, il absorbe tous les genres, dont la sculpture en céramique. Charmante, belle et décorative, comme on aimerait bien en avoir dans son salon.
La pièce maîtresse de l’exposition est sans nul doute « La lecture », peinture de sa compagne Marie-Thérèse. On y voit la jeune femme blonde tenant un livre ouvert sur ses genoux. Cette œuvre magnifique est estimée à près de 30 millions d’euros.
En 1907, le maestro présente son premier tableau cubiste «  Les demoiselles d’Avignon » ouvrant ainsi les portes du cubisme et de l’art moderne en général. Il aura anticipé le futurisme, le mouvement dada, le surréalisme, le Pop art, l’abstrait. Aujourd’hui, il n’est pas rare de trouver la figure de l’artiste dans bons nombres de tableaux contemporains comme « Picasso » de Chéri Samba, où on voit l’icône assise devant une table vide, s’interroger sur la paix, l’Afrique et l’art africain. On le voit aussi debout dans le coin de l’œuvre de l’artiste Faith Ringgold « Picasso’s Studio », en train de peindre « Les Demoiselles » avec au milieu une jeune femme africaine.
Loin d’être une visite contemplative des œuvres de Pablo Picasso, cette exposition est aussi une argumentation sur l’évolution stylistique du mouvement cubique. Le dépassement du créateur d’art sur la réalité matérielle, est illustré dans tous les coins de la galerie. Le rayonnement du légendaire Pablo Ruiz Picasso, continue de fasciner la sphère artistique au delà des frontières et des époques.


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